Vente de peaux de vache, Ponts-de-Cé, 1656

Oui, vous avez bien lu, je parle aujourd’hui de peaux de vache ! Rassurez-vous j’en parle au sens propre.
Autrefois, les bouchers tuaient eux-mêmes les bêtes, et vendaient donc les peaux aux tanneurs. Les bouchers demeuraient généralement au coeur des villes, proches cependant d’une rivière où s’écoulaient les sangs, etc… Nantes et Angers ont eu ainsi en plein coeur de la ville toute une concentration de bouchers oeuvrant à tuer les bêtes, le tout dans une odeur pestilentielle et les rivières des moins potables. Il est vrai qu’on n’avait pas encore découvert la bactériologie et en conséquence la notion d’eau potable…
Comme les Nantais ont 2 rivères, dont l’une assez stagnante, l’Erdre, ils avaient les bouchers près de l’Erdre… bien odorante !

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E90-369 – Voici la retranscription intégrale de l’acte, avec mes commentaires en italique : Le 13 mars 1656 après midy, devant nous Nicolas Bellanger notaire royal à Angers résidant aux Ponts de Cé furent présents establis et duments soumis chacuns d’honneste homme François Duchesne marchand maistre boucher d’une part,
et honneste homme Charles Marchais marchand tanneur demeurant en le lieu des Ponts de cé paroisse St Maurille d’autre part

    Voir ma page sur les tanneurs

entre lesquels a esté faict le marché tel que s’ensuit, c’est à scavoir que ledit Duchesne a vendu et par ces présentes vend et promet livrer en sa maison en cedit lieu audit Marchais toutes et chacunes les peaux de bœufs, vaches et veaux qu’il habillera ou fera habiller à commencer du jour et feste de Pasques prochain jusqu’au mardy gras ensuivant

HABILLER se dit en parlant De certains animaux qu’on écorche & qu’on vide pour les mettre en état de pouvoir être accommodés à la cuisine. Habiller un veau, un mouton, un lapin. On dit aussi, Habiller une carpe (Dict. Académie française, 4th Edition, 1762)

ce marché fait pour en payer et bailler par ledit Marchais audit Duchesne scavoir pous chascunes douzaines de peaux desdites vaches en poil, à raison de treize pour douze, la somme de cent livres tz,

    treize à la douzaine : très ancienne pratique commerciale, que je rencontre toujours dans les marchés de vente. Surtout n’allez pas sur le Net, on ne vous remonte pas si haut que moi cette charmante expression !

et en cas qu’il habille des thores en passera trois peaux d’icelles pour deux desdites peaux de vaches, et les peaux des thores qui auront poussé deux grandes dents de lait passeront pour peaux de vaches suivant la coustume de ce pays

    la thore, ou taure, est la génisse, qui est la jeune vache n’ayant pas encore eu de veau. L’acte précise comment on distingue alors, selon la coutume, la peau de taure de peau de vache, par les dents de lait.

et outre promet et s’oblige ledit Marchais payer lesdites peaux de bœufs au prix qu’elles pèseront à raison de 9 sols tz la libre, et au cas où il se trouvera quelques peaux desdits bœufs qui ne pèseront que 40 livres et au dessous passeront au rang desdites peaux de vaches, et lesquelles surpassant ledit poids de 40 livres seront payées à la susdite raison de 6 sols chacunes livres,
et pour le cas desdites peaux de veaux et thores à raison de 104 pour 100 promet comme dit est ledit Marchais en payer audit Duchesne la somme de 72 livres tz pour chacun d’iceux payable scavoir 100 livres tz par une part dans la feste Dieu prochaine à valoir et desduire sur lesdites peaux que ledit Duchesne luy aura livrées dans ledit temps, et luy pourra livrer,
et pareille somme de 100 livres dans le jour et feste de St Berthelemy prochain, à valoir et desduire comme dit est sur lesdites peaux, du nombre et quantité de toutes lesquelles ils auront et tiendront registre d’icelle séparément, et compteront ensemblement ledit jour de mardy gras prochain,
payera ledit Duchesne sans prétendre aucun remboursement le droit de pesage desdites peaux de bœufs, et en retirera billet du poids d’icelle,
en faveur duquel marché baillera ledit Marchais audit Duchesne la somme de 10 livres tz dans le jour de Quasimodo prochain

comme aussy ont esté à ce présents establis et duement soumis chacuns de honnestes hommes Jean Barbot et Estienne Gaultier marchands, maistres bouchers, demeurant en cedit lieu des Ponts de Cé, dite paroisse, d’une part, et ledit Marchais d’autre part,
lesquels ont fait et font entre eux le marché qui s’ensuit, c’est à scavoir que lesdits Barbot et Gaultier ont pareillement vendus et promettent livrer en leurs maisons et demeure audit Marchais, toutes et chacunes les peaux des bœufs, vaches et veaux en poil qu’ils habilleront ou seront habillés pendant ledit temps cy-dessus mentionné, le tout aux mesmes closes charges et conditions de marché fait entre ledit Marchais et ledit Duchesne, for que lesdits Barbot et Gaultier ne seront payés à chacune des peaux que de la somme de 50 livres tz chacun,
ce qui a été voulu stipulé et accepté par les parties auxquels marchés et tout ce que dit est tenir etc dommages etc s’obligent lesdites parties
ledit Marchais au paiement desdites sommes aux termes susdits luy ses hoirs biens et choses à prendre vendre etc renonçant etc dont etc advertys du scellé suivant l’édit
fait à notre tablier en présence d’honorable homme Vincent Gaultier marchand Me apothicaire dudit lieu, d’honorable homme René Maugin et Brillault marchands, demeurant en la paroisse St Aubin des Ponts de Cé tesmoins,
ledit Barbot a déclaré ne scavoir signer
Signé : C. Marchays, F. Duchesne, R. Maugin, E. Gaultier, C. Brillault, N. Bellanger, V. Gaultier

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Vente d’outils de maréchal, Mozé, 1705

Nous restons aujourd’hui à Mozé-sur-Louet, que vous commencez à connaître ici. Vous avions vu qu’en 1666 le rôle de taille donnait pas moins de 7 maréchaux.
Ce nombre, relativement élevé, tient sans doute à l’usage du cheval dans les vignes, alors qu’en région de polycultures c’est le boeuf qui laboure à cette date. Les outils ici vendus attestent qu’il s’agit bien de maréchal ferrant, celui qui s’occupe des chevaux.

Voir ma page sur les métiers de la forge, qui explique aussi le maréchal en oeuvres blanches, fort différent.

MARECHAL FERRANT, (Art méchan.) est un ouvrier dont le métier est de ferrer les chevaux, & de les panser quand ils sont malades ou blessés.
Les instrumens du maréchal sont les flammes, la lancette, le bistouri, la feuille de sauge, les ciseaux, les renettes, la petite gouge, l’aiguille, les couteaux & les boutons de feu, le brûle-queue, le fer à compas, l’esse de feu, la marque, la corne de chamois, le boétier, la corne de vache, le cuiller de fer, la seringue, le pas d’âne, le leve-sole, la spatule.
Chaque maître ne peut avoir qu’un apprentif outre ses enfans : l’apprentissage est de trois ans.
Tout maréchal a son poinçon dont il marque son ouvrage, & dont l’empreinte reste sur une table de plomb déposée au châtelet. (Encyclopédie Diderot)

Pour la durée d’apprentissage, je rappelle que l’Encyclopédie Diderot se base sur les statuts parisiens, et que la France offrait quelques différences avec Paris, c’est le moins qu’on puisse dire ! Ainsi, j’ai mis sur ce blog un contrat d’apprentissage beaucoup plus court, à Soulaines (49), en 1692

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E9/228 – Voici la retranscription intégrale de l’acte, avec en exergue mes explications : Le 31 mars 1705 avant midy, par devant nous René Rontard notaire de la baronnie de Blaison résidant à Mozé, et René Rontard notaire royal à Angers, résidant à Charcé, furent présents en leurs personnes establis et soumis, chacun de Gabriel Tacheron marchand demeurant au boug et paroisse de Mozé d’une part et Jullien Challon maréchal demeurant au village de la Fontenelle paroisse d’Érigné d’autre part
entre lesquels a été fait le marché qui ensuit, à scavoir que ledit Tacheron a vendu et par ces présentes vend audit Challon ce acceptant qui a achepté et achete pour luy ses hoirs
scavoir est un soufflet, une enclume, une bigourne,

bigorne : sorte d’enclume dont chaque extrémité est en pointe, et qui sert à tourner en rond ou à arrondir les grosses pièces (Dict. du Monde Rural, Lachiver, 1997)

4 petits marteaux de poincts, un marteau à frapper d’erain, 3 paires de tenailles à mettre au feu et une paire de tenaille à ferrer, un soufflet, une estampe,

estampe : terme de maréchalerie. Outil servant à estamper, en forme de poinçon qui sert à percer les trous dans les fers à cheval pour y placer les clous. Etamper un fer à cheval, y faire 8 trous (Idem).

un poinson,

poinçon : terme de maréchal. Tige de fer teminée par une pointe, pour contrepercer les fers du cheval. (idem)

une tourne,

tourne : espèce ce tenaille avec laquelle le forgeron peut saisir et tenir fortement les grosses pièces (idem)

une tranche à couper le fer et un crochet à peser, le tout pour servir à un maréchal regardant son métier, tout ainsi que lesdites choses se poursuivent et comportent comme le preneur les a dit avoir vues et visitées,
le présent marché fait pour le prix et somme de 40 livres, laquelle somme iceluy acquéreur pour ce duement estably et soumis, a promis et promet icelle payer et bailler audit Tacheron dans 3 ans, et pendant lequel temps l’intérêt au sol livre suivant l’ordonnance,

    le sol est la vingtième partie de la livre, donc c’est du 5 %. On voit encore, même pour une somme relativement peu élevée, une vente à crédit, et faute de banques autrefois, c’est le vendeur qui fait le crédit.
    Donc, en absence de banque, le crédit fonctionnait, et c’était sans doute plus sérieux que tout ce qu’on entend depuis quelques temps sur le métier de banquier ! Je ne sais pas si on y a gagné quelque chose en tout cas pour moi c’est totalement incompréhensible, et je comprends beaucoup mieux le fonctionnement du crédit au 17e et 18e siècles que je ne le comprends de nos jours…

et en cas que ledit Challon ne paye ladite somme de 40 livres dans ledit temps de 3 ans, promet et s’oblige de fournit caution solvable qui s’obligera solidairement avec luy au payement de ladite somme de 40 livres et intérêts qui en auront couru et qui courront jusque et à compter depuis le fournissement de ladite caution jusqu’à 5 ans à peine autrement et à faute de ce, la paiement de ladite somme de 40 livres de principal demeurera exigible et jusqu’au dit, ladite boutique de maréchal demeure spécialement obligée et affectée la part où elle puisse estre, oultre le général des autres biens,

et en cas que ledit Chaslon baillat ladite boutique de maréchal à autre personne promet et s’oblige pareillement de faire obliger celui qui la posséderait et qui déclarera l’endroit là où il la transportera
et en faveur dudit marché iceluy promet payer audit Tacheron dans 8 jours 30 sols pour le denier à Dieu et fournir copie dans ledit temps de 8 jours, le tout à peine etc, ce qui ainsy voulu consenti stipullé et accepté par les parties et à ce tenir etc obligent à défaut etc renonçant etc dont etc
fait et passé au bourg de Mozé demeure de nous notaire en présence de Pierre Baudriller praticien demeurant paroisse de Mûrs et Pierre Thoret serrurier demeurant audit Mozé témoins à ce requis et appelés.
Signé : J. Challon, G. Tacheron, R. Rontard, P. Thoret, Baudriller, R. Rontard

    Challon n’a pas les moyens de payer comptant les 40 livres mais il sait signer. Comme quoi, il ne faut pas se fier aux apparences, par exemple en supposant que tous ceux qui savent signer sont riches ou vice versa.

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Contrat d’apprentissage de couvreur d’ardoise, Saumur, 1735

L’Anjou est pays d’ardoise.
Voici un contrat d’apprentissage de couvreur d’ardoise.
Qui vient s’ajouter aux nombreux contrats d’apprentissage déjà sur ce site-blog.

J’ai été frappé par la durée : 5 ans. C’est considérable, et comme en contre-partie, l’apprenti ne paye rien au maître, je pense qu’en fait il lui sert d’ouvrier.
Aussi par une précision : sera nory à sa table des mesmes mets que luy
Mais le plus frappant concerne l’habillement, car nous avons là un détail précieux. Il est dit entre autres vêtement à fournir : 6 chemises. Or, la chemise était un vêtement que tout le monde ne portait pas, en quelque sorte, elle a suivi un parcours de démocratisation au fil des siècles, et j’apprends donc ici qu’en 1735 un couvreur d’ardoise porte chemise. Je songe à vous préparer un article sur cette pièce du vêtement, à travers mes inventaires après décès, pour que vous voyez à quel point elle est synonyme de rang social.

Extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série E2170 (fonds famille Crosnier) – Voici la retranscription intégrale : Le 14 juillet 1735 avant midy par devant nous les notaires de la chatellenie de l’abbaye royale de saint Florent les Saumur furent présents et soumis Pierre Rathouis maistre couvreur d’ardoise d’une part Jean Crosnier âgé de 20 ans fils de deffunt François Crosnier et de Florence Badin ses père et mère, et François Crosnier frère dudit Jean Crosnier, tous demeurant audit saint Florent
entre lesquels Pierre Rathouis et Crosnier a esté fait et convenu ce qui suit c’est à savoir que ledit Rathouis a déclaré prendre ledit Jean Crosnier sous la caution dudit François son frère, pour aprenty du mettier de couvreur d’ardoise, pour le temps de 5 années qui ont suivant la déclaration dudit Rathuis commencé dès le 25 juin 1733 de ce dont ledit Jean Crosnier a convenu et déclaré vouloir faire ledit apprentissage et promis de vouloir finir son temps desdites 5 années

pendant lequel temps ledit Rathouis s’est obligé de luy bien enseigner toutes les conditions qu’il convient audit métier et de l’entretenir de vestement de culottes bas souliers chapeau et linge selon son estat,
sera nory à sa table des mesmes mets que luy, s’oblige en outre ledit Rathouis donner audit Jean Crosnier une année devant les 5 années expirées un habit d’étoffe de pinelière (que je n’ai pu identifier), et 6 chemises pareilles à celles qu’iceluy Crosnier a à préents, s’oblige aussi ledit Jean Crosnier de bien travailler pendant ledit temps desdites 5 années pour le profit dudit Rathouis de luy estre fidèle et obéissant et iceluy Rathouis s’oblige d’entretenir ledit apprenti de travail sans lui laisser perdre aucun temps

et si au cas que ledit Jean Crosnier s’absentoit par libertinages dans le cours desdits 5 années ledit François Crosnier s’oblige comme caution faire raison audit Rathouis du temps que ledit apprenti auroit perdu soit de faire employer ledit temps perdu par ledit apprenti ou de payer audit Rathouis ce qui sera arbitré par d’autres maistres couvreurs d’ardoise

à quoy tout ce qui a esté voulu consenty stipulé et accepté les parties se sont respectivement obligées mesme ledit Rathouis avec tous ses biens meubles et immeubles présents et futurs pour l’entretien dudit aprenty comme à ses habillements linge et abits qu’il luy doit donner

dont fait et passé à Saint Florent en la maison de demeure de Jacques Charpentier l’un de nous notaires soussignés en présence de l’autre soussigné, ont lesdits Rathouis et Crosniers déclaré ne savoir signer enquis –
Signé : Charpentier, Bonnet

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Transaction pour un porc ladre que le langueyeur a mal visité au marché de Brissac, 1625

Sur ce blog, vous trouverez, en date des 23 et 24 juillet 2008, 2 articles traitant de ventes d’office de langueyeur. Je vous suggère vivement de lire ces articles pour comprendre ce qui suit. Vous y accédez en cliquant sur le tag (mot-clef) langueyeur au bas de cet article. Les tags vous permettent d’accéder directement aux articles traitant du même sujet (lorsque je les ai correctement renseignés, et si je ne l’ai pas correctement fait, soyez assez sympa de me le signaler chaque fois que vous observez mes lacunes sur ce point ou d’autres…)

L’acte qui vous est proposé ce jour vient les compléter, à travers une affaire de visite mal faite, ayant donné lieu à la vente d’un porc ladre. Il s’ensuit une plainte de l’acheteur et un procès.

Mais cet acte nous délivre une information très particulière, à savoir une femme possède l’office de langueyeur. Or, si vous avez lu attentivement les ventes d’office de langueyeur, le travail était un peu physique, puisqu’il fallait maintenit le porc, dans toutefois lui rompre le cou, et je vois mal une femme… sans doute ai-je tort.
Alors, comme elle est veuve, je suppose qu’après le décès de son époux, elle a assumé l’office en question, probablement aidée d’un tiers.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E1-308 – Voici la retranscription de l’acte par P. Grelier et O. Halbert : Le 29 novembre 1625 après midy devant nous Jean Cahy notaire royal Angers furent présents en leurs personnes chacun de Augustin Boudigueau demeurant au village de Boucher paroisse de Charcé d’une part
et Perrine Vivien veuve de defunt Pierre Macé demeurante en la paroisse de Vauchrétien, ladite Vivien dans l’office à langaier les porcs qui se vendent au marchés de Brissac

entre lesquelles parties a esté fait la transaction et accord qui s’ensuit c’est à scavoir que sur le procès meu entre eux par davant le séneschal de Brissac touchant la demande de dommages et intérests prétendus par ledit Boudigueau contre ladite Vivien d’un porc que ledit Boudigueau contre ladite Vivien d’un porc que ledit Boudigueau aurait acheté au marché de Brissac qui aurait été visitté par ladite Vivien qui l’aurait vérifié net de ladrerie

NET, [n]ette. adj. Qui est sans ordure, sans soüilleure, propre. (Dictionnaire de L’Académie française, 1st Edition, 1694)

et néanmois quelque temps après ledit Boudigneau ayant reconnu que ledit porc estait ladre il aurait fait convenir ladite Vivien par devant le juge de Brissac pour être condamné en ses dommages interests
ensuite de quoy ledit Boudigueau aurait obtenu sentence dudit juge portant que ladite Vivien aurait été condamnée à dommages et intérests et dépends par sentence du (blanc) jour de décembre 1622 de laquelle sentense ladite Vivien aurait interjeté appel qui aurait été relevé par devant messieurs les gens tenant le siège (présidial de cette) ville et après quelques procédures faites audit appel lesquelles auraient été … (idei, un passage juridique qui nous dépasse totalement, veuillez nous excuser, mais son absence ne nuit en aucun cas à la compréhension de cet acte) occasion que ledit Boudigueau aurait fait appeler ladite Vivien par devant lesdits sieurs présidiaux pour icelle la voir déclarer,

en laquelle instance il aurait esté apoincté de ce jour par lequel ladite Vivien aurait recogneu que ladite instance est … il aurait esté ordonné que ladite sentence dont est appel soit exécutée et sortirait à son effet et elle condamnée auxdits despends de l’instances de préemption,

desquels despends dommages et intérests de la cause principale et despends de l’instance de préemption lesdites parties en ont présentement composé et accordé à la somme de 24 livres payable scavoir 12 livres dedans Noël prochain et pareille somme de 12 livres dedans Pasques prochaine venant, le tout à peine … par ladite Vivien audit Boudigueau

de laquelle somme de 24 livres en sera payé et délivré par ladite Vivien en déduction de ladite somme, la somme de 8 livres audit terme de Noël à Me Jacques Chauveau tant pour ses vacations que celles de Me Jean Dufroger advocat dudit Boudigneau qu’ils ont faites en ladite instance

ce que dessus stipullé et accepté par lesdites parties respectivement et à ce tenir obligent etc renonçant etc foy jugement condamnation etc

fait Angers à notre tablier présents honorable homme René Maugean marchand teinturier et Jean Boceau clerc demeurant audit Angers tesmoins, lesdits Baudigueau et Macé ont dit ne savoir signer, plus présent honorables personnes Jean Bourigault et Jean Macé marchands demeurant audit Brissac.
Signé J. Macé, J. Bourigault, Cahy

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Jacques Briant engage Pierre Coiscault, Soudan, 1603

Comment un Breton de Bretagne, puisque Soudan est en 1603 en pays de Bretagne, vient-il engager à Angers un assistant pour traiter ses affaires dans différents procès ?
Je suis surprise, car on aurait pu penser que Nantes était le lieu de prédilection !

Nous avons un véritable contrat de travail, avec un salaire, et des clauses de frais de voyages : cheval, bottes et éprons fournis.
Mais, le plus surprenant est bien que ce Jacques Briant est un grand procédurier, et pas n’importe lequel, puisqu’un peu plus tard, il va même aller jusqu’à l’assassinat de Philippe du Hirel, dont nous avons vu ici la veuve, Henriette de Portebize, faisant face à des frais de procédures délirants, une vraie fortune. Voir Henriette de Portebize face à 3 000 livres de frais de procédure pour l’assassinat de son époux Philippe du Hirel par Jacques Briant.

Jacques Briant m’est apparu, petit à petit au fil de mes recherches, sur de très longues années. Je me souviens du premier acte concernant la succession sans hoirs de Philippe du Hirel, dans laquelle, une petite phrase, loin dans les longues pages, laissait échappé qu’il était mort assassiné (d’où l’intérêt qu’il y a toujours à d’abord tout retranscrire, ligne par ligne, un acte). Puis au fil d’autres découvertes d’actes, j’ai pu apprendre que l’assassin se nommait Jacques Briant, puis je trouvais Jacques Briant dit Chopinière, puis Jacques Briant sieur de Vaudurant.
Donc, dans l’acte qui suit, même s’il est antérieur de 25 ans, je suis sur la même famille père ou fils, car ici j’ai bien Jacques Briant seigneur de Vaudurant demeurant au lieu seigneurial de la Chopinière à Soudan.. Du même coup, je découvre que la Chopinière est à Soudan, or, Charles Hirel possédait la Verrerie à Soudan et demeurant à la Hée à Villepôt. Comme quoi, on ne s’entend pas toujours entre voisins !

Vaudurant est un lieu disparu, mais je trouve dans l’Armorial de Bretagne, de Potier de Courcy, article Gouyon, que cette famille posséda, entre autres, Vaudurant en Rougé. Cette terre était située autrefois sur Rougé, et j’ignore comment Jacques Briant en est seigneur. J’ignore encore plus à quel endroit de Rougé, car j’ai regardé en vain le cadastre napoléonien en ligne.

Avec ce Jacques Briant, j’ai le sentiment de comprendre enfin Les Plaideurs, qui m’étaient passés par dessus la tête en mon jeune temps, faute de comprendre tout ce fatras de procès. Et par ailleurs, je le trouve résoluement moderne, puisque de nos jours il existe des juristes d’entreprise.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E36 – Voici la retranscription de l’acte : Le 5 décembre 1603 après midy, devant nous François Prevost notaire de la cour royal d’Angers ont esté présents et personnellement establiz Jacques Briant écuyer sieur de Vaudurant demeurant au lieu seigneurial de la Chopinière paroisse de Soudan pays de Bretagne d’une part
et Me Pierre Coiscault Sr de la Carte, praticien demeurant en la cité de ceste ville d’autre part

lesquels soubmis respectivement etc au pouvoir etc confessent avoir fait entre la convention qui ensuit c’est à scavoir que ledit Coiscault a promis promet et demeure tenu aller au premier jour de janvier prochain demeurer avec ledit sieur de Baudurant et dudit jour jusqu’à 3 mois qui éscheront au premier jour de juillet prochain, vacquer et soliciter diligemment et fidèlement aux affaires et procès qu’il a ou aura et ou il le vouldra employer pendant ledit temps soit en ceste ville, à Rennes, à Paris, ou en autres lieux, et y faire telle fidèle poursuite et diligence que ledit sieur de Vaudurant le chargera et qui y seront requises, l’advertir de tout ce qui se passera esdits procès en des expéditions et procédures et en tenir et bailler requérir garder ledit sieur de Vandurant de toutes surprises

pour le sallayre (salaire) et vacations duquel Coiscault ledit sieur de Vaudurant a promis promet et demeure tenu en payer et bailler d’huy en 3 mois prochain et à la fin desdits 6 mois la somme de 80 livres tz et quand ledit sieur de Vandurant envoyera ledit Coiscault hors de sa maison soliciter et vacquer à sesdites affaires et procès il luy fournira d’un cheval bottes et espron, argent tant pour sa despense que frais et procédures dont ledit Coiscault en tiendra loyal estat et coust,
et a ceste convention accord respectivement entretenir faire payer oblige respectivement lesdites parties
fait à notre tablier en présence de Me Jacques Blais? et Rolland Gault

Curieusement, je vois double : 2 signatures Coiscault, très ressemblantes. Aurait-il signé 2 fois, c’est pourtant improbable ! Ou alors, il était vraiement fou de joie de signer ce curieux contrat !

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Pour teindre la peau de mouton or, rouge, bleu et vert 1766

Secrets concernant les arts et métiers, tome 2, Bruxelles, 1766. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

  • Chapitre 37 : Pour appréter et dorer la peau pour faire des garnitures de meubles.
  • Préparez la peau comme il est dit ci-devant en la manière de la passer en chamois, à l’endroit comme à l’envers, lissez-la avec le lissoir de verre à l’endroit, donnez-lui une couche de colle de retailles de peau, et appliquez-lui des feuilles ou d’étain ou d’argent ; ayez fiel de boeuf, mêlez-y de l’orpiment, incorporez-les bien ensemble dans un pot de terre vernissé, faîtes-les bouillir au feu jusqu’à ce que le tout soit bien mélangé ; ensuite mettez la peau attachée sur une table au soleil, donnez lui le fiel composé, et la laissez sécher ; ensuite vous lui donnerez une autre couche de la couleur suivante ; savoir, mettre bouillir du brésil avec du fort vinaigre blanc, tant que la couleur disparoisse, ajoutez-y un peu de gomme arabique ; coulez le tout, et metez-le au soleil, tirez vos filets où il vous plaira ; faîtes-en même de noirs, que vous ferez avec des noyaux de pêches brulés an charbons et broyés sur le porphyre, ayant oté le mauvais, et appliqué avec de l’huile de lin ; vous pourrez dessiner avec cela ce que vous voudrez ; quand vous lui donnerez le fiel, vous pourrez réserver les endroits que vous voudrez laisse de la couleur naturelle de l’argent ; imprimez, et si vos fers sont humides, faîtes que vos peaux ne le soient pas, puis cela sera fait.

  • Chapitre 28 : Pour teindre une peau en couleur d’or.
  • Prenez litharge d’or deux onces, et trois onces d’huile de noix ; ayant bien broyé la litharge, faîtes-les bouillir ensemble à diminution du tiers ; du reste, donnez-en la couleurà la peau du côté où a été le poil ; que si le reste ne suffit pas, à mesure que vous l’emploierez, vous y en ajouterez un peu d’autre.

  • Chapitre 39 : Pour teindre la peau de mouton en rouge
  • La peau étant passée en chamois sera bien lavée, jusqu’à ce qu’elle rende l’eau claire ; étendez-la, et mettez-la sécher à l’ombre et au vent ; étant sèche, maniez-la, frottez-la un peu, et l’étendez sur une table. Mettez dans une écuelle une once de brésil bien fin, avec autant de la plus forte lessive qu’il en faut pour le couvrir un peu plus, et les mettez dans un pot vernissé, avec environ trois verres d’eau claire, ou plus si vous le jugez à propos, avec une pincée de trois doigts de fenugrec bien pilé, et autant de plâtre gris bien pilé ; mettez le tout bouillir à évaporation d’un tiers, ou un peu plus, tirez-le, laissez-le reposer et clarifier, versez-le dans un écuelle, et donnez-en une couche avec un drapeau à la peau bien également, qu’elle ne faisse par d’ondes, laissez-la sécher et lui donnez le frottoir partout, ensuite une autre couche et le frottoir, et continuer ainsi jusqu’à ce qu’elle ait la couleur à votre gré. Souvenez-vous de donner la couleur toujours chaude, telle qu’elle soit. Si vous la voulez faire couleur de rose, prenez une éponge trempée dans la lessive, pressez-la bien, passez-la sur toute la peau teinte en rouge, et la laissez sécher, elle deviendra couleur de rose comme si elle était teinte en graine.

    Bois de Brésil, in Vincard, lArt du teinturier coloriste, 1820, f°23
    Bois de Brésil, in Vincard, l'Art du teinturier coloriste, 1820, f°23
  • Chapitre 40 : Pour teindre une peau en bleu.
  • Prenez une once d’indigo bien en poudre, faîtes-le bouillir dans une pinte d’eau jusqu’à réduction de moitié un peu plus, retirez du feu, et y mettez un once de gomme arabique, laissez-le reposer, tirez-en le plus clair, en teignez la peau, laissez-la sécher, donnez lui une autre couche, et continuer jusqu’à ce que la couleur vous plaise ; servez-vous du pinceau de poil de porc, ou de brosse à grand poil.

  • Chapitre 41 : Pour faire une peau verte.
  • Prenez les fruits d’aubépine cueillis en septembre, pilez-les en marmelade, et en faîtes de petits pains, que vous laisserez sécher ; quand vous voudrez teindre, preniez la moitié de ces pains, qu’on mettra à tremper en vin blanc un peu de temps, et étant trempé, délayez-le, y ajoutés trois chopines d’eau, un quart et demi d’indigo, autrant d’alun de roche, mêlez bien le tout, faîtes-les bouillir qu’il s’en évapore chopine, tirez-le du feu, le laissez reposer, et du plus clair donnez-en la couleur à la peau avec la brosse ou gros pinceau, une couche après l’autre, et continuez jusqu’à ce que la couleur plaise ; ensuite laissez sécher la peau, frottez-la bien avec le bouchon de jonc, elle deviendra belle et lustrée.

    Secrets concernant les arts et métiers, tome 2, Bruxelles, 1766. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

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