Office de langueyeur, vente à Angers de Lhostelier meunier à Prudhomme sergent royal, 1626

Je vous mets ce jour, puis demain à suivre, 2 billets concernant des cessions d’office de langueyeur. Un peu de vocabulaire sera nécessaire, d’autant plus que la maladie a disparu en France, même si je me souviens que petite fille, c’est à dire pendant la seconde guerre mondiale et juste après, j’entendais parler de cette maladie, rare certes, mais qui faisait peur. Aujourd’hui, on sait mieux éliminer cette maladie, sans doute éradiquée, donc cette peur appartient au passé, mais pour se rendre compte à quel point elle terrifiait, lisez votre dictionnaire habituel à l’article TENIA et vous ne serez par décu (e).

la cysticercose est une infestation parasitaire due à la présence de larves de ténia dans les muscles, appelée aussi ladrerie. La cysticercose du porc, fréquente au Moyen âge, a disparu, mais pas celle des bovins. (Lachiver, Dict. du monde rural)

jadis donc, un langueyeur était chargé d’examiner la langue des porcs mis en vente
le langueyeur était un officier établi dans les foires & marchés, pour visiter ou faire visiter les porcs, & pour qu’il ne s’en vende point de ladres (Encyclopédie de Diderot et d’Alembert).

Il y a cinquante environ, alors que la race porcine était souvent atteinte de ladrerie, un droit de langueyage de 0,10 F par tête d’animal exposé, était perçu sur les marchés de Baugé. Le droit était dû par le vendeur, si l’animal était reconnu ladre : dans le cas contraire, il était acquitté par l’acheteur. – Le langueyeur, comme on l’appelait, introduisait dans la gueule de l’animal un petit bâton, renversait le porc et se rendait compte si des pustules existaient sous la langue. Il était responsable des dommages que pouvait causer l’examen, ainsi que de l’erreur qu’il pouvait commettre. L’article 12 du Règlement de police fait défense au charcutier de vendre du porc ladre « sans exposer une lumière sur l’étal, ainsi qu’il est d’usage » – « Le prévost de Montlehery lui défendit vendre et longoyer pourceaux » (1378, L. C) (Dict. du parler de l’Anjou, 19e siècle)

Les langueyeurs étaient des officiers jurés qui examinaient la langue des porcs, pour s’assurer s’ils n’étaient pas atteints de ladrerie, et marquaient à l’oreille les animaux malades. Louis XIV supprima ces offices, puis les rétablit, puis les remplaça en 1704 par des offices de vendeurs-visiteurs de porcs qui furent eux-mêmes remplacés en 1708 par des offices d’inspecteurs-contrôleurs. La vente de ces derniers rapporta au Trésor 990 000 livres. On trouve aussi langayeur, langoyeyr, langayeyr, langueieur, essayeur de pourceaux etc…(Dict. Hist. des métiers exercés dans Paris depuis le 13e siècle).

En d’autres termes (c’est Odile qui parle maintenant), c’était une idée géniale de supprimer l’office pour le rétablir, car le Trésor empochait alors un pactol… Louis XIV me surprendra toujours…, par forcément en bien…

Maintenant que vous savez, d’après les dictionnaires anciens, à quoi servait le langueyeur, vous allez être surpris (e) de voir que ce n’était pas un métier mais un office qui venait s’ajouter à un autre revenu de base lorsqu’on l’avait acquis, mais par contre, il suffisait de l’acheter pour l’exercer et n’importe qui pouvait donc l’acheter et l’exercer, c’est ce qui va apparaître dans les 2 cessions d’office que je vous propose, l’une ci-dessous, et demain, une 2e cession d’office, dont l’acte sera très détaillé.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5 – Voici la retranscription de l’acte : Le 19 mars 1630 avant midy, par devant nous Nicolas Leconte notaire royal à Angers personnellement estably
Urban Lhostelier marchand meusnier demeurant en ceste ville paroisse de la Trinité lequel deument soubmis a volontairement confessé avoir vendu quitté ceddé délaissé et transporté par ces présentes
à René Prudhomme sergent royal demeurant en la paroisse de St Maurille présent

la quarte partie de l’estat et office de langayeur de porcs tant gras que de noriture qui entredont et se vendron en ceste ville et faux bourg foyre et marchez d’icelle à l’advenir et à perpétuitté pour en jouir par ledit acquéreur ses hoyrs et ayant cause tout ainsy qu’eust faict peu faire et faire pourroict ledit vendeur en vertu de son contract passé par Becheu notaire de ceste cour le 18 mars 1625, lettres de création et provision dudit office de laquelle provision en date du 19 novembre 1606 signée par collation à l’original Rembouillet notaire secrétaire du roy et plusieurs autres, la grosse d’un transport dudit office faire par devant deffunt Roger Vinant (pas de dépôt aux AD) notaire de ceste cour le 23 octobre 1611 fait par Anthoine Carron Sr de la Villette ayant les droictz ceddez de Arnault Legascon exempt des gardes du corps du Roy et de Jan Godefroy controlleur et clerc du guet, ledit Hostelier a présentement baillées et deslivrées audit Prudhomme qui les a receues jusqu’au nombre de (blanc) pour par luy en jouir comme dict est aux conditions raportées par ladite création et autrement suivant l’édict de sa majesté dès à présent et pour toujours sans aucune garantie de la part dudit Lhostelier sinon ainsy qi’om sera garanty par le Roy et ses auditeurs pour lesquels garantages il a fourny lesdites pièces,

ceste présente vendition cession et transport faicte pour et moyennant la somme de 400 livres tournois payées audit Lhostelier la somme de 285 livres tournois qu’il a receue en pièces de 16 sols et autre bonne monnoye courante suivant l’édict du roy et le surplus montant 115 livres ledit acquéreur par hypothèque spécial reserve sur ledit office promet et demeure tenu le payer audit vendeur dedans le jour et feste de Pasque prochain (qui est le dimanche 31 mars 1630 et on est le 19 mars, donc il a 12 jours pour payer) et de tout ils sont demeurez d’accord et l’ont ainsy voullu stipullé et accepté tellement que ce que dict est tenir et entrenir …

    (attention, souvenez vous que ces 400 livres sont pour la quarte partie de l’office, car il y a sans doute un office tenu par 4 langueyeurs, qui se relaient les jours de foire ou officient ensemble ? Dans tous les cas, ceci signifie que l’office de langueyeur pour Angers rapportait 1 600 livres à la couronne)

fait audit Angers à nostre tabler en présence de Pierre Gendron marchand demeurant en la paroisse St Michel du Tertre de ceste ville, Pierre Lecoussier langayeur demeurant la paroisse St Berthélemy, Guillaume Buret aussy langayeur demeurant en la paroisse St Silvin, lesdit Lhostelier Gendron Buret ont dict ne scavoir signer. Signé Prudhomme. (AD49 série 5E5)

A demain pour un second acte de cession d’office de langueyeur à Angers, toujours aussi vieux. Je vous signale toutefois que j’avais classé cet acte dans ma catégorie METIER mais que je viens de réviser mon jugement et le mettre dans HYGIENE ET SANTE, compte tenu que ce métier illustre une crainte sanitaire du passé que nous avons oubliée en 2008, et en outre que ce n’était pas à proprement parler un métier mais un office rapportant un revenu supplémentaire au détenteur. Le détenteur que nous verrons demain exerce encore un métier différent de ceux d’aujourd’hui, et ne sait pas signer.

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Lanfaissier, métier qui apparaît, entre autres, à Cossé-le-Vivien (53), 1633

terme qui vient de lanfais : paquet de filasse

En réponse à une question qui m’est posée :

Le lanfais ou lanfet est un terme utilisé localement, surtout en Normandie, pour désigner le paquet de filasse. Le lanfaissier est donc l’équivalent du filassier.

La filasse étant elle-même les filaments tirés de l’écorce du chanvre ou du lin, mis sur la quenouille pour donner le fil à l’aide du fuseau.

En Anjou, le filassier aliàs lanfaissier, s’appelle le poupelier, car après avoir roui les tiges en filaments, il les met en poupée de filasse. Et, dans les inventaires après décès, on compte, généralement au grenier, combien il y de poupées de lin ou poupées de chanvre, et on les estime à la poupée, c’est à dire au paquet de filasse, qui était l’unité marchande.

Pas étonnant de retrouver le terme lanfaissier jusqu’à Cossé-le-Vivien, qui était encore le Maine, mais sur la route de Normandie en Anjou, sur la route du clou. Plus bas, on arrive au terme de poupelier ou filassier.

Je me souviens de la première fois que j’ai rencontré le terme de poupelier et de mes doutes devant les poupées… Mes doutes sont aujourd’hui clairement dissipés… heureusement !

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Un gagne-denier place 120 livres, Angers, 1643

au profit de Jean Boulay et Charles Manceau, de Marans (49), par obligation (AD49 série 5E5)

Dans l’autre billet de ce jour, nous avons vu que les co-emprunteurs d’une obligation étaient tellement liés par ce prêt qu’il étaient le plus souvent proches parents.

L’acte qui suit est une obligation, et comme elle concernait Charles Manceau de Marans, je l’ai étudiée. Or, en retranscrivant l’acte entièrement, je découvre que le prêteur est gagne-denier, c’est à dire un commissionnaire quelconque car sans plus de précision on ne peut correctement définir quel type de courses il faisait.
L’une des courses dont on parle le moins mais dont je soupçonne l’importance, était de communiquer entre notaires dans les grandes villes. En effet, dès qu’un client frappait à la porte, venant souvent de la campagne, et nous avons vu qu’on venait aussi de 70 km à la ronde, c’était souvent pour emprunter ou pour échanger, bref une place financière sans le téléphone et sans Internet. Donc, immédiatement, le notaire faisait circuler un billet à ses confrères, par voie de commissionnaire, afin de savoir qui avait la somme disponible sous 48 h.

Donc, l’un de ces commissionnaires, encore appelé gagne-denier, a des économies, et il va les confier au notaire pour une obligation. Il place 120 livres, ce qui n’est certes pas une fortune considérable, mais certainement comme si de nos jours un foyer modeste plaçait 3 à 5 000 euros. Dans tous les cas cette somme de 120 livres représente un revenu annuel pouvant faire vivre honorablement une famille de classe moyenne, et le revenu à 5 % de cette somme constitue un revenu appréciable.
Je salue ici par la pensée, la personne qui m’a dit un jour, d’un ton péremptoire, que si je pouvais faire les notaires c’est que j’avais des familles aisées ! Sous-entendu, les familles peu aisées n’ont laissé aucune trace dans les actes notariés, ce qui est inexact, puisqu’à titre d’exemple, les baux concernent toujours le preneur autant que le bailleur, et bien d’autres actes encore…

Je tiens cependant, pour être honnête, à présicer que j’ai vu des milliers d’obligations, mais qu’il est rare que le prêteur soit très modeste. Cet acte est donc la preuve que certains parvenaient à faire quelques économies…

Retranscription de l’acte : Le 4 juillet 1643 avant midy, par devant nous Nicolas Leconte notaire royal et gardenottes à Angers, ont esté présents
vénérable et discret Messire Jean Boullay prestre curé de Marans,
et honneste homme Charles Manceau marchand tant en son privé nom que comme procureur spécial de Françoise Boullay sa femme par procuration du 2 de ce mois passée par Lerbette notaire de Marans, demeurée cy attachée pour y avoir recours et à laquelle en tant que besoin est ou seroit, ils promettent et demeurant tenus faire avoir ces présentes agréables à l’accomplissement d’icelles solidairement obligée o les renonciations au bénéfice de division discussion et ordre etc et en fournir acte de ratiffication obligation vallable dans d’huy en quinze jours prochains à peine ces présentes néanmoins,
lesquels establiz et deument soubzmis ont confessé avoir vendu créé et constitué et par ces présentes vendent créent et constituent promis et garantit fournir et faire valloir tant en principal que cours d’arrérages
à Toussaint Boutton gaigne deniers en ceste ville y demeurant paroisse St Maurille présent et stipulant,
la somme de 6 livres 16 sols 4 deniers d’annuelle et perpétuelle rente hypothécaire rendable et payable franchement et quitement chacuns ans par les années à la fin de chacune dont le payement de la première année eschera d’huy en un an prochain venant et à continuer etc faisant assiette de ladite rente laquelle lesdits vendeurs ont du jour d’huy et par ces présentes assize et assient et assignent généralement et spécialement sur tous et chacuns leurs biens meubles et immeubles rentes et revenus présents et futurs quelconques et sur unepièce d’héritage seule et pour le tout sans que les générales et spéciales hypothecques se puissent nuire ne préjudicier ains confirmer et aprouver l’un l’autre o pouvoir express audit acquéreur d’en faire déclarer plus particulière assiette en assiette de rente sur une pièce ou plusieurs des biens et choses desdits vendeurs et à eux de l’admortir toutefois et quantes
ceste présente vendition création et constitution de rente faicte pour et moyennant la somme de six vingt (120) livres tournois payée et fournye présentement contant au veu de nous notaire et des tesmoings par ledit acquéreur auxdits vendeurs qui ont receu ladite somme en bon payement courant suivant l’édit du roy s’en contentent et en quittent etc…

La signature de Charles Manceau est belle, et je sais par les registres paroissiaux qu’il est tailleur d’habits au bourg de Marans. Mr le curé de Marans, est proche parent, puisqu’on a :

Charles LEMANCEAU †/1674 Tailleur d’habits au Bourg de Marans x Marans 1.5.1634 (sans filiation) Françoise BOULAY †/1667

Charles Manceau est probablement lié aux miens, aussi depuis longtemps il figure dans ma rubrique PROBABLEMENT LIéS. Sa signature en tout cas vient confirmer cette piste, qui ne reste à ce stade qu’une piste.

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Contrat de mariage de Pierre Bleiberg, arquebusier Allemand de Zülich, à Angers, 1643

Contrats de mariage retranscrits et analysés sur ce blog.

l’origine des arquebusiers est parfois lointaine ! en voici un en Anjou, épousant la fille d’un coutelier (Archives Départementales du Maine et Loire, série 5E5)

Ehevertrag in Jahre 1643 in Angers, von Peter Bleiberg, Arkebusier, geboren in Zülich neben Köln-am-Rhein und Aachen, wo der Vater auch Arkebusier war. Falls Sie Zülich in Jahre 1643 kennen, Bitte, schreiben Sie hierunter Ihre Kommentar ! Vielen Dank ! Ich verstehe Ihre Sprache und möchte gern wissen wie ein Arkebusier nach Frankreich ging.

Les noms de familles sont souvent très parlants en langue allemande. Ici la montagne de plomb. Il se trouve qu’il existe aussi un lieu du Bleiberg à Saint-Avold, qui fut une mine de plomb devenue Monument Historique.
Nos voisins Allemands, selon leur accent régional, prononcent le CH final parfois comme CQ, et c’est le cas dans l’acte qui suit. J’identifie alors la ville de Jülich qui est à 60 km O. de Cologne, et 35 km N.E. d’Aix la Chapelle. Voici le site de la ville de Jülich. Le duc de Jülich, cité dans l’acte, possédait Aix-la-Chapelle, etc… et Jülich a donné Julier en Français.
Au passage, je me suis étonnée que ce soit Cologne qui soit citée car le duc de Jülich était en fait à Aix la Chapelle. Il faut croire que Cologne était mieux connue à cette époque qu’Aix la Chapelle. On avait à ce point oublié Charlemagne !

Notre Montagne de plomb est arquebusier, fils d’arquebusier, et épouse ici la fille d’un coutelier, qui lui, fabrique des armes tranchantes ! Bref, on est quasiement dans des métiers voisins !
Mais, le contrat ci-dessous a plusieurs particularités :

  • la dot (ou avancement d’hoir) fait l’objet d’un solde de compte entre père et fille au sujet de pension et succession de la mère défunte. Le père n’a pas les liquidités pour la payer de suite, et la donnera en rente à 5 % (denier vingt) tant qu’il n’a la somme ! Ceci dit, la dot n’est pas très élevée, car en 1643 elle est de 600 livres, ce qui correspondrait à un métayer ou un meunier aisés, en aucun cas à un avocat, plus aisé.
  • il n’y aura pas communauté de biens, et c’est la première fois que je vois cela ! Pourtant j’ai lu beaucoup de contrats de mariage attentivement. Je l’ignore, mais j’en conclue que la coutume du pays d’origne de notre Montage de plomb, n’était pas fondée sur la communauté de biens.
  • bien entendu, la dot de madame devra être utilisé en acquêts en Anjou à l’exclusion d’autres contrées… Je comprends que cette clause fixe le couple en Anjou, et élimine en principe l’hypothèse d’un départ avec l’épouse en Allemagne.
  • Attention, je passe à la retranscription intégrale de l’acte, orthographe comprise : Le 11 août 1643, par devant nous Nicolas Leconte notaire royal et gardenotte à Angers, ont esté présents
    Pierre Bleiberg Me arquebusier en ceste ville filz de deffuntz Henry Bleiberg vivant aussy arquebusier et de Catherine Calle ses père et mère qui estoyent natifs et demeurant en la ville de Zeulicq près Coulogne soubz la domination du duc de Jullicq demeurant de présent en la paroisse St Maurice de ceste ville d’une part,
    et honnestes personnes Michel Fonteneau Me coutelier en ceste ville et Anne Fontenau sa fille et de deffuncte Anne Barbesore sa femme demeurant en ladite paroisse St Maurice d’autre,

    lesquelz respectivement establyz et soubzmis ont sur le traicté du futur mariage d’entre ledit Blei-berg et ladite Fonteneau accordé ce que s’ensuit, à scavoir que iceux Bleiberg et Anne Fonteneau se promettent mariage et icelluy solemniser sy tost que l’un par l’autre en sera requis pourveu qu’il ne s’y trouve légitime empeschement
    en faveur duquel mariage ledit Fonteneau père promet et demeure tenu faire valloir le bien maternel de sadite fille la somme de 30 livres de rente par les années et à la fin de chascune dont le payement de la première année eschera un an après ledit mariage et à continuer etc à laquelle rente ledit Fonteneau admortira toutefois et quantes que bon luy semblera pour la somme de 600 livres à un seul payement (c’est donc un artisan assez aisé)
    moyennant quoy jouira de la part afférante à sadite fille en la succession de ladite déffuncte Barbesore sa mère
    et demeure icelle Anne Fonteneau quitte vers sondit père de ses pentions noritures et entretenement au moyen de ce qu’il demeure aussy vers elle quitte des jouissances de ladite part afférante à sa dite fille en ladite succession de sa déffuncte mère de tout le péssé et de ses services qu’elle eust pu ou pouroit prétendre aussy de tout le passé jusque à huy
    de laquelle somme de 600 livres estant payé pour le rachapt de ladite rente et ledit futur espoux l’ayant receue il demeure tenu et obligé l’employer en ce pais d’Anjou en acquest d’héritages de pareille valleur pour demeurer le propre bien maternel de ladite future espouse en ses estocques et lignée maternelle sans pouvoir estre mobilisée par quelques temps que ce puissent estre et à faulte d’acquest ledit futur espoux en a des à présent consittué et constitue à ladite future espouse et aux siens rente à ladite raison du denier vingt racheptable un an après la dissolution dudit futur mariage
    en faveur duquel ledit futur espoux a donné et donne à ladite future espouse en cas qu’il prédécèdde la somme de 600 livres tournois à prendre sur les deniers qu’il aura et en cas de non suffisance sur ses meubles et deniers qui proviendront et où ils seraient suffisants sur ses immeubles pour en jouir par elle ses hoirs et ayant cause en pleine propriété et à perpétuité
    sans que lesdits futurs conjointz puissent entrer en communauté de biens par an et jour ne autre temps nonobstant la coustume de ce pais à laquelle en ce regard ilz ont dérogé et dérogent et à ceste fin demeure ladite future espouze authorizée à la poursuite desdits droictz et disposition de ses biens à la réserve touttefois d’entrer en communaulté de biens touttes fois et quantes que bon leur semblera en passer acte vallable (ce point relatif à l’absence de communauté est rare, et mérite d’être souligné)
    et demeurent tous autres escripts faitz entre ladite Anne Fonteneau et sondit père en leur force et vertu assignant ledit futur espoux à ladite future espouse doire (douaire) au désir de la coutume de ce pais
    par ce que du tout ils sont demeurés d’accord et l’ont ainsi voulleu stipullé et accepté, tellement que audit contract de mariage et tout ce que dessus est dict tenir garder et entretenir et aux dommages et obligations lesdites parties respectivement etc renonczant etc dont etc
    faict audit Angers maison dudit Fonteneau en présence de Jeudic et Marie Fonteneau sœurs de ladite future épouse, et Me René Touchaleaume et de René Verdon praticiens demeurans audit Angers tesmoings etc adverty du sellé suivant l’édit du roy. Signé : M. Fonteneau, Pierre Bleiberg, Anne Fonteneau, Jeudic Fonteneau, Marie Fonteneau, Touchaleaume.

    Cette image est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Je la mets ici à titre d’outil d’identification des signatures, car autrefois on ne changeait pas de signature.

  • Avouez que notre Montagne de plomb était bien nommé car les armes à feu utilisent le plomb (ou la poudre). D’ailleurs à l’époque, pour faire les balles de plomb on lançait le plomb liquide en gouttes du haut d’une tour, et j’ai lu quelque part qu’à Angers c’était la Tour St Aubin !
  • Si j’aime tant les arquebusiers, c’est que j’en ai un, avec mon Pierre Poyet, arquebusier à Segré, et que je cherche toujours à comprendre où il avait appris. Il n’a pas appris avec la Montagne de plomb, puisqu’il était plus ancien !
  • Et je vous prie de m’excuser pour la francisation de Bleiberg, qui était faite pour vous illustrer les jolis noms de famille qui fleurissent en Allemagne. Certes ce n’était pas la Montagne de fleurs, plus jolie encore… etc… Et puis, à Nantes, port qui voyait arriver beaucoup d’étrangers, contrairement à Angers, qui en voyait, mais peu, on francisait les noms de famille… à l’époque.

  • L’arquebuse, arme à feu, a été remplacée vers 1570 par le mousquet, arme à feu portative des 16e et 17e siècles, et l’arquebusier, fabriquant d’armes à feu, fabriquait donc en 1643 des mousquets, à moins que notre Montagne de plomb n’en ait importées, et n’ai été que revendeur en Anjou ? c’est une question que je me pose.
  • Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet seule une citation ou un lien sont autorisés.

    Prix des couteaux et des ciseaux, Angers, 1673

    objet coûteux et rare (Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E)

    J’ai retranscrit de nombreux inventaires après décès, mais les objets familiers y sont peu détaillés, si tant est qu’ils soient variés. On trouve parfois une (pas deux) cuiller de fer avec la marmite. C’était une sorte de louche pour se servir de la nourriture qui y cuisait. J’ai rencontré le détail lorqu’il y a argenterie (rare, réservé aux gentilhommes ou équivalents), mais même dans ce cas, il ne s’agissait que de cuillers et fourchettes bien entendu. Donc, je n’avais jamais rencontré les couteaux avant l’acte ci-dessous, qui est un échange de marchandises entre marchands couteliers.
    Le couteau était probablement rare, en tout cas pas individuel, car il est assez onéreux.

    D’ailleurs, au sujet des couteaux, je me souviens dans mon jeune âge des couteaux qui n’étaient pas inox, et aussi des manches qui étaient en os, et avaient une fâcheuse tendance à vouloir se désolidariser de la lame… Ceci pour mémoire, car bien entendu les couteaux en 1673 avaient un lame de fer et non d’inox, qui viendra bien plus tard… Les couteaux de 1637 devaient ressembler aux couteaux de mon enfance. Si l’un d’entre vous en possède encore, merci d’envoyer photo.

    Voici la retranscription, dans l’orthographe réelle de l’acte : Le 4 juillet 1673 avant midy par devant nous François Crosnier notaire royal à Angers furent présents establiz et deuement soubzmis Jean Baptiste Justeau marchand Me coutellier demeurant en cette ville paroisse de Saint Pierre et Marye Moreau sa femme de luy autorisée quant à ce, lesquelz chacun d’eux sollidairement renonçant au bénéfice de division, d’une part,
    et Florent Moreau aussy marchand Me coutellier demeurant en cette dite ville paroisse Saint Maurice d’autre part, (manifestement beau-frère ou beau-père de Justeau. On fait affaire en famille. Le fait que le coutelier soit qualifié de « marchand maître » indique qu’il vend mais aussi fabrique car les maîtres sont généralement membres d’une corporation)

    entre lesquelles partyes a esté fait et conveneu ce qui s’ensuit, c’est à savoir que lesdits Justeau et Moreau sollidairement comme dit est ont promis et se sont obligez de fournir et bailler audit Moreau en sa maison en cette ville de la marchandise de couteaux et ciseaux de la façon dudit Justeau (avec cette expression, on est certain que Justeau fabrique des couteaux et ciseaux) scavoir

  • la douzaine de couteaux de table à raison de 9 livres la douzaine,
  • et les ciseaux à usage de femme aussy à raison de 9 livres la douzaine,
  • et les ciseaux de barbe et aux cheveux et les ciseaux à faire le crin à raison de 11 livres la douzaine,
  • laquelle marchandise lesdits Justeau et Moreau sa femme sollidairement comme dit est ont promis et se sont obligez délivrer audit Moreau savoir demye douzaine de couteaux et demye douzaine de ciseaux d’huy en trois mois prochains et ainsy à continuer de trois moys en trois moys, par les demies douzaines de cousteaux et cizeaux à chasque livraison jusques au parfait payement de la somme de 58 livres que ledit Justeau et Moreau sa femme ont recognu et confessé debvoir audit Moreau à cause de prest qu’il leur a faict tant ce jourd’huy qu’avant ce jour. Seul Florent Moreau sait signer.

    Les prix indiqués ne sont pas des prix de vente, mais des prix de revient entre couteliers. Ils sont élevés, et j’en conclue que le couteau et les ciseaux étaient des objets rares et en aucun cas individuel sauf familles aisées. Il est vrai que la nourriture étaient déjà coupée, et mélangée, un peu comme les potées avec des petits lardons… chez tous ceux qui vivaient de la terre… ne consommant que le porc, sinon la viande était consommée par les notables et gentilshommes.

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet, seul un lien est autorisé, et il figure en clair ci-dessous

    Couteaux anciens (photos privées) :

    Laguiole

    Nontron

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    Drapier, serger, tissier : métiers différents, car tissus différents : drap, serge, toile

    J’ai oublié dans le billet d’avant-hier, de préciser ce qu’était le drap.
    Le billet dit « d’avant hier » se trouve reporté en date du 11 août 2009

    Voici 2 proverbes qui illustrent à merveille les qualités du drap : chaud et solide,

      La soye d’esté, le drap d’hyver (il est chaud)

      Quiconque se vest de drap meschant, deux fois pour le moins se vest l’an (il est solide)

    Le drap est

    « une étoffe de laine qui participe des qualités de la toile par son tissu, et de celles du feutre, par l’opération du foulage qu’on lui fait subir. »

    C’est la meilleure définition du terme drap que je connaisse. Elle se trouve dans l’ouvrage d’Auguste Vinçart, l’Art du teinturier-coloriste sur laine, soie, fil et coton, Paris, 1820.

    Voici la liste des planches de l’Encyclopédie Diderot, qui situe parfaitement le métier dans la laine et le foulon

    Voici une autre définition du drap :

    « Espece d’estoffe de laine. Bon drap. drap fin. gros drap. drap de Hollande, de Berry, d’Espagne. une aulne de drap. acheter, vendre du drap. faire du drap. habit de drap. tailler en plein drap. On dit aussi, Drap d’or. drap de soye, mais quand le mot de drap est mis seul, on entend tousjours qu’il est de laine. » (Dictionnaire de L’Académie française, 1st Edition, 1694).

    Mais je préfère sincèrement la première définition, car elle inclut les 2 principales caractéristiques du drap : solidité et chaleur.


    Métier du drapier avec ses détails. Navette anglaise et ses détails. (Encyclopédie Diderot)

    Il n’existe plus, enfin je ne trouve plus depuis longtemps de vêtements de qualité fait avec un tel tissu. Nous avons été, au fil de mon existence (70 ans) envahis par la petite qualité vestimentaire et les synthétiques, etc… voir même la guenille jettable. Quand je dis jettable, je fais allusion à une émission de télé sur les vêtements récupérés : les centres de tri croulaient sur des tonnes de vêtements à jetter car non réutilisables du fait de leur manque total de qualité, et leur problème étaient de faire face à ces déchets…
    Nos ancêtres, qui vivaient le plus souvent sans vitre aux fenêtres, avec tout au plus une cheminée dans la pièce, avaient tout de même la chance de connaître le drap, fait pour vêtements d’hiver inusables à tel point qu’au début de ce blog, nous chantions sa solidité dans une contine. Cette contine m’a beaucoup aidée pour comprendre l’importance du foulon et du drap : je suis heureuse d’avoir eu la chance de l’entendre dans mon enfance, allez l’entendre sur mon site, sur l’un des liens ci-dessus.


    épinçage des draps fins après le dégrais, et outils. (Encyclopédie Diderot)

    Mieux, le drapier faisait aussi de la ratine (le plus cher et le plus côté des draps de laine) : le mot viendrait du terme hollandais « gaufre », gaufrer, ou bien de « raster », racler. AU 13e siècle, « rastin » est une étoffe à poil tiré et frisé. Etoffe de laine, réputée très chaude, ancienne et répandue au point que le verbe « ratiner » désigne le procédé utilisé : frotter les draps pour lier le poil en petites mèches terminées par un bourrelet, en général à l’endroit du tissu.(Hardouin-Fugier E. & Coll. Les étoffes : dictionnaire historique, 1994)
    Ce même dictionnaire, donne, entre autres, car il y en a beaucoup :

    Drap : Du bas latin « drappus », terme lui-même qui proviendrait du celtique. Mot générique désignant tout un ensemble de tissus divers, un peu comme le mot « étoffe ». Sa fabrication est liée au très ancien élevate du mouton. On ne peut donc ici qu’indiquer les procédés les plus courants de sa fabrication.- La qualité de la laine est déterminante pour le produit fini. La chaîne est composée de fils à forte torsion, la trame de floches. Sa torsion est contraire à celle des fils des chaînes, condition qui détermine le bon déroulement du foulage. Le drap est tissé en écru, puis teint en pièce. – L’achèvement consiste à fouler, laver, lainer, teindre, sécher, ramer, raser et apprêter à chaud. Inutile de souligner les multiples usages du drap depuis des temps immémoriaux et les faits économiques liés au drap, depuis l’élevage des ovins jusqu’à la vente, foire, transport, concurrence, groupements sociaux, en passant évidemment, par sa fabrication et sa mécanisation. Des régions entières ont eu, pendant des millénaires, leur civilisation marquée par la fabrication des draps, en particulier le nord de la France. – Le succès du drap dans la mode est éternel ; Mallarmé l’évoque pour l’année 1874 : « Un paletot-blouse en drap blanc avec col marin en pareil »
    Drap d’Alep : chaîne en soie, trame en laine.
    Drap l’Alma : sergé à côtes en laine ou laine et soie.
    Drap d’argent, drap d’or : terme générique désignant des étoffes somptueuses
    Drap de Baye : lourde tenue de deuil
    Drap de Beaucamp : sergé lourd, grossier, à chapîne en lin et à trame en laines colorées.
    Drap de chasse : uni, à chaîne en soie fine et trame en coton lourd à côtes horizontales
    Drap de Damas : fabriqué à Damas au 14e et 15e siècles, qui se distingue du Damas. Il est précieux, brodé d’or et d’argent.
    Drap de dame : très léger et doux, comparable à la flanelle, légèrement foulé, tiré à poil.
    Drap de France : fabriqué en Angleterre dans la dernière moitié du 19e siècle
    Drap de gros bureau : drap français grossier, blanc ou teint en noir ou gris.
    Drap de Lyon : riche soierie
    Drap de Paris : fin sergé à effet granité, fabriqué à la fin du 19e siècle.
    Drap de pauvre : serge grossière, non teinte, brune mais jamais noire, utilisée au début du 19e par les ouvriers
    Drap de soie : étoffe de soie très fournie en chaîne, tissée à tension rétrograde.
    Drap de velours : étoffe épaisse avec un poil doux, fabriquée en Angleterre dans la dernière partie du 19e siècle pour confection féminine.
    Drap militaire : les règlements du 18e siècle interdisent de le tirer ou aramer en large ou en longueur ; on doit au contraire le laisser sécher sans aucune extension. Teint en laine en bleu céleste, beu de roi, vert, marron ou bien teint en pièce et foulé avant la teinture, c’est le cas pour l’écarlate, le cramoisi, le rose, l’aurore, le jonquille, le noir et le drap garance, qui a été le plus employé dans les régiments d’infanterie et de cavalerie pendant la Première guerre mondiale.
    Drap mortuaire : étoffe de velours noir étendue sur la bière d’un mort pendant les obsèques (Hardouin-Fugier E. & Coll. Les étoffes : dictionnaire historique, 1994)

    Et la serge dans tout cela ? Le serger fabriquait une étoffe de laine, la serge, qui était plus ordinaire que le drap, moins cher, moins chaude, moins solide, mais très répandue. Avec le drap on fait les vestes, les manteaux, les culottes d’homme, le tout d’hiver, et avec la serge les jupes de femme, les vestes légères…, là encore tout de même pour l’hiver, le reste du temps tout est en lin et chanvre et relève du tissier.

    En conclusion, laissez-moi vous compter que lorsque j’ai débuté en généalogie, il y a fort longtemps, j’ai bien entendu rencontré les marchands de draps de soie. J’imaginais alors que certains dormaient dans des draps de soie. Il n’en était rien, et ce n’est que bien plus tard que j’ai compris qu’il s’agissait de marchands de tissus de soie, dont les dames nobles et notables raffolaient, lorsqu’elles avaient les moyens de se le permettre, pour quelques vêtements plus beaux que ceux du quotidien.

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.