16 septembre 1943 : 65ème anniversaire de la pluie de fer, d’acier et de sang sur Nantes

les 16 et le 23 septembre 1643 les Américains lachent 3 tonnes de bombes sur Nantes. Il y aura plus de 1 200 victimes car les bombes lachées à 4 000 m d’altitude par les superforteresses US frappaient plus à côté des cibles que dessus !
J’étais dessous, enfin pas tout à fait, car nous habitions la route de Clisson au niveau de la Croix des Herses. Mes oncles, qui étaient dans la maison en face, montèrent sur le toît voir, enfin, aux premiers bruits, mais par la suite descendirent comme tout le monde à la cave.
J’avais 5 ans, et mes parents nous emmenèrent dans la cave, nous racontant que le tonnerre grondait ! Que peut-on raconter d’autre aux enfants !
Le lendemain notre papa attelait Papillon à la charette à cheval, et nous partions tous pour Gesté, à 35 km. Je me souviens de maman tenant les rênes « Hue Papillon ! », mais aussi des cotes : tout le monde descend, et les adultes aident Papillon en poussant.

1914-1918 au 84e R.I.T. carnet de guerre d’Edouard Guillouard, photos Leglaive

Mon grand père maternel, au front du début à la fin, avait 3 enfants en 1914 ! Ce billet est écrit à la mémoire de tous ces enfants… car cela m’a beaucoup frappée…

J’ai mis il y a quelques années sur mon site le carnet de guerre 1914-1918 au 84e R.I.T. d’Edouard Guillouard, photos Leglaive. D’une rigueur et précision toute militaire, il m’avait fallu 2 mois pour le tapper et le mettre en pages, d’autant que je n’avais pas de légendes au photos (en vrac dans une enveloppe) et que beaucoup sont encore non identifiées.
J’avais alors découvert cette guerre comme on ne nous la décrit pas souvent :
Ils étaient parti pour quelques jours, alors la France n’a pas mis en route la fabrication massive de bottes, capes huilées, casques, etc… et c’est tardivement après des mois dans la boue, la pluie et le froid que ces équipements indispensables leur parviendront…
Mon grand père circule souvent à cheval, mais prend le train pour les rares permissions, puis apprend la lutte anti-aérienne car l’avion a fait son apparition.
Un nombre incalculable de nouveautés techniques voient le jour au fil du temps…

  • J 256 (8 mois 12 jours) arrivée des périscopes pour voir de la tranchée, sans être vu et surtout sans s’exposer
  • J 414 (1 an 1 mois 28 jours) : arrivée des casques
  • J 595 (1 an 7 mois 16 jours) : distribution de montres et de pipes
  • J 818 (2 ans 2 mois 26 jours) : arrivée des capes huilées
  • J 1002 (soit 2 ans 8 mois 28 jours) arrivée des masques à gaz
  • J 1126 : Edouard n’a encore jamais parlé de peur, malgré tout ce qui tombe autour de lui, mais manifeste soudain une « grande appréhension ». Il est envoyé suivre les cours de commandant, se doute bien qu’il aura du mal à suivre, faute d’études suffisantes, et craint de décevoir les supérieurs, qui l’ont nommé. Belle grandeur d’âme de ces hommes, que la peur de ne pas être à la hauteur de la mission qui leur est confiée ! Il apprend même la lutte anti-aérienne.
  • J 1378 (3 ans 9 mois 8 jours) : distribution de cigares

  • Voici le cheval, car ce fut sans doute, du moins en Europe, la dernière fois qu’il combattait lui aussi.
    Outre le carnet de guerre, j’ai le cahier d »Aimée Guillot, sa belle-mère, édifiant : Il commence ainsi :
    à la grâce de Dieu ! que nos chers disparus nous obtiennent force et résignation à accepter vaillamment ce qui arrive !

    Suivent un nombre considérable de prières, messes, lessive, jardin, raccomodage, visites aux tombes, etc… ponctuées de mauvaises nouvelles….

    Mais, ce qui m’a le plus frappée lorsque j’ai fait ces pages, c’est qu’Edouard Guillouard avait 3 enfants en partant en 1914.

    En réalité, en partant au août 1914, mon grand père laissait 2 enfants et une épouse enceinte de plus de 5 mois. C’est ma maman qui est née à l’automne 1914, alors que son papa était au front. Elle disait souvent qu’elle ne l’avait connu qu’à 4 ans, et elle avait auparavant un vague souvenir d’une apparition d’un militaire qui lui avait fait peur car elle ne réalisait pas que c’était un papa. Sans doute ce jour de la photo…
    Alors aujourd’hui, je pense à tous ces enfants, privés de papa pendant 4 ans, et encore plus à ceux qui ne l’ont pas vu revenir… car mon grand père eut la chance d’en revenir.
    Mais lorqu’il revint, sa boutique n’était pas en forme : c’est sans doute une chose dont on parle peu, quand on évoque les 4 années 14-48. Il avait un boutique de gros, livrant de Nantes à travers la Bretagne, de la quincaillerie. Les clients, eux aussi au front ou disparus, ne payaient pas ou mal, et les affaires avaient périclité, menées tant bien que mal par son père, alors très âgé. Ainsi, ceux qui étaient partis et en sont revenus, n’avaient pas fait fortune, c’est le moins qu’on puisse dire… et cela aussi il faut le souligner.

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet seule une citation ou un lien sont autorisés.