Journal d’Etienne Toisonnier, Angers 1683-1714 (1702)

Numérisation par frappe du manuscrit : Odile Halbert, mars 2008. Reproduction interdite.
Légende : en gras les remarques, en italique les compléments – Avec les notes de Marc Saché, Trente années de vie provinciale d’après le Journal de Toisonnier, Angers : Ed. de L’Ouest, 1930

  • Le 2 janvier 1702 se fit l’ouverture du grand jubilé par une procession générale de l’église cathédrale en celle de St Aubin où Mr Lepelletier évêque d’Angers célébra la messe pontificalement sous le pontificat du pape Clément XI. Il doit durer deux mois et finir par une procession générale comme la 1ère ; il a été en même temps ordonné pour la campagne. En même temps s’est fait la mission fondée par feu Mr Subleau pour 30 capucins qui ont prêché et confessé pendant le cours du jubilé.
  • Le 14 (janvier 1702) mourut la femme de Mr Denys Guilbault avocat, avant veuve du sieur Audiau bourgeois ; il y a des enfants des deux mariages.
  • Le 15 (janvier 1702) mourut Mr Dupont avocat ; il fut enterré le lendemain dans l’église Sainte-Croix
  • Le 23 (janvier 1702) Mr de la Galaizière Boylesve épousa la fille de feu Mr Chotard de la Grellerie et de la demoiselle Tessier
  • Le 31 (janvier 1702) Mr Gouin avocat fils de feu Mr Jean Gouin, aussi avocat, épousa la fille du Sr Lusson fermier et de Anne Hullin, en l’église de la Trinité.
  • Le 8 février 1702 Mr Falloux élu en l’élection de cette ville épousa la fille de Mr Boisard de Marolle gentilhomme servant chez le roy et de la défunte dame Lefebvre de la Guyverderie
  • Dans ce même temps mourut la femme du Sr de Lépinière Boisard ; elle s’appelait du Planty Frain, fille de feu Mr du Planty Frain assesseur en l’élection et de la dame Boisard.
  • Le 13 (février 1702) Mr de Pantigné Rousseau, fils de Mr de Pantigné Rousseau, conseiller honoraire au présidial et de la défunte dame Butin, se fit installer dans la charge de conseiller audit présidial, cy-devant remplie par Mr Hameau du Marais
  • Le 30 mars 1702 mourut madame Eveillard veuve de feu Mr Eveillard président à la prévôté ; elle fut enterrée en l’église de St Michel du Tertre ; elle s’appelait de la Roche Avril ; elle a laissé trois garçons et une fille ; le premier est chantre de St Pierre, le 2e conseiller au Parlement de Bretagne, et le 3e est officier d’armée ; la fille a épousé Mr Gilles de la Bérardière.
  • Le 5 avril (1702) mourut Mr Blanchet de la Martinière, avocat ; son fils aîné est conseiller au siège de la prévôté vérificateur des défauts ; sa fille a épousé Mr Huslin de la Poissonnerie escuyer.
  • Le 18 (avril 1702) mourut mademoiselle Paunetier fille, âgée de 60 ans ; elle avait beaucoup de dévotion et de mérite, bienfaisante aux pauvres.
  • Le 26 (avril 1702) mourut Mr Macé, prêtre, docteur en théologie et chanoine de St Maimbeuf, âgé de 57 ans. Il avait beaucoup de mérite.
  • Le 1er mai 1702 Mr Toublanc de la Richelière docteur aggrégé en l’université des droits de cette ville et le sieur Bouchard marchand droguiste furent élus échevins à la place du Sr Mabit bourgeois et du Sr Buret marchand
  • Le 2 (mai 1702) mourut Delle Françoise Guillot, fille, âgée de 62 ans, sœur de ma femme ; elle était d’une grande simplicité.
  • Le 4 (mai 1702) mourut Mr de Grée Poulain, Sr de Vaujoie, mari de la fille de Mr de Changé Nicolon, assesseur en l’hôtel de ville, dont il a laissé deux enfants.
  • Le 5 (mai 1702) mourut la femme du Sr Favrie, préposé pour le recouvrement des finances et taxes imposées sur les officiers ; elle était fille de Mr Cochon avocat ; elle a laissé deux enfants.
  • Dans ce même temps mourut le Sr Denys Malville, greffier au présidial.
  • Le 22 (mai 1702) mourut Mr de Pantigné Rousseau, conseiller honoraire au présidial. Il avait épousé la fille du feu Sr Butin, greffier au criminel, duquel mariage sont issus un fils conseiller au présidial, un fils chanoine en l’église d’Angers et une fille mariée avec Mr de la Porte conseiller au présidial. Il y a encore d’autres enfants.
  • Le 29 (mai 1702) Mr Charlot des Loges, fils de Mr Charlot, escuyer, sieur des Loges et de la dame Deschamps, fut insitallé dans la charge de président au présidial cy-devant remplie dignement par Mr Gohier.
  • Le 30 (mai 1702) la fille de Mr Bruneau, avocat, et de la Delle Trochon, épousa le fils du feu Sr Destriché, bourgeois, et de la Delle Chaillant.
  • Le même jour, le sieur Boussac, épousa la Delle Dupont, fille du Sr Dupont, monnayeur, et de la Delle Baillif
  • Le 4 juin 1702 mourut la veuve de feu Mr Boylesve de la Galaisière ; son fils aîné est curé de Liré en Bretagne (sic), un cadet a épousé la Delle Chotard de la Grelleraye et une fille est veuve de feu Mr de Pincé Brulon.
  • Dans ce même temps mourut le sieur René Raffray, l’un des administrateurs de l’hôpital général de cette ville, où il était attaché depuis 20 ans avec beaucoup de zèle et d’affection, et cy-devant notaire royal en cette ville. Il n’a point laissé de postérité ; sa femme s’appelle de Fresne.
  • Le 10 (juin 1702) Mr René Pasqueraye, fils de Mr René Pasqueraye, avocat, plaida sa première cause contre moi, où je plaidais avec beaucoup de succès grâce à Dieu.
  • Le 12 (juin 1702) mourut la femme de Mr de Loubes de l’Ambroise écuyer ; elle s’appelait Moreau, fille de feu Mr Moreau notaire et de la dame Nouleau.
  • Le même jour mourut la femme du sieur du Perry Romain bourgeois ; elle s’appelait Duport.
  • Le 13 (juin 1702) mourut Mr Boucault de la Houssaie, doyen des conseillers au présidial.
  • Le 26 (juin 1702) Mr Volaige de Vaugirault conseiller au présidial épousa la fille de Mr Gandon, cy-devant lieutenant des eaux et forêts et de la Delle Chatelain.
  • Le 27 (juin1702) Mr Ayrault, avocat et fils de feu Mr Ayrault, sénéchal de Vihiers et de la Delle … épousa la fille du Sr Buret marchand, à présent juge consul et de la dame …
  • Dans ce même temps, le Sr Grézil des Ambillons, fils du Sr Grézil et de la Delle Nail, épousa la fille du sieur Marchais et de la Delle Saget.
  • Le 4 juillet 1702 mourut la femme du feu sieur Garciau, commis greffier au présidial ; elle s’appelait Jeanne Gaufestre ; elle a laissé plusieurs enfants ; son fils aîné greffier aux appellations, a épousé la fille du feu Sr Dupré Me chirurgien à Château-Gontier, une fille mariée avec le Sr Paytrineau cy-devant marchand de soie.
  • Le 11 (juillet 1702) Mr de la Béraudière de Maumusson, escuyer, épousa la fille de Mr Davy du Mottay et de la Delle Chotard.
  • Le 17 (juillet 1702) Mr Boguais de la Boessière, asseseur en l’élection de cette ville, fils de défunt Hector Boguais, marchand, et de Delle Sébastienne Guillot, épousa la fille du feu sieur de la Tousche Pasqueraye, bourgeois, et de la Delle Verdier.
  • Le 18 (juillet 1702) mourut la femme de feu Mr du Hardaz, avocat ; elle s’appelait Grudé ; elle a laissé deux filles, la première a épousé Mr André Gontard, avocat, et la cadette Mr Benoist Pasqueraye aussy avocat.
  • Le 19 août 1702 Mr Baudry, fils de Mr Baudry, bourgeois, et de la défunte Delle Bault, fut installé en la charge de conseiller au présidial cy-devant remplie par Me Maussion.
  • Le même jour mourut la femme du feu Sr Pasqueraye Me chirurgien en cette ville ; de son mariage sont issus Mr Pasqueraye avocat et la femme du Sr Esnault droguiste ; elle s’appelait Martin.
  • Le 24 (août 1702) mourut la femme du feu Mr Bault de Baumont ; elle a laissé deux garçons ; l’aîné a épousé la fille du feu Sr de la Marre Duport et de la Delle Grudé ; elle s’appelait Guilbault de la Boulaizière.
  • Le 29 (août 1702) Mr de Pantigné Rousseau, conseiller au présidial, fils de feu Mr de Pantigné Rousseau, aussy conseiller, et de la défunte dame Butin, épousa la fille du Sr Béguyer et de la défunte Delle Thibaudeau.
  • Le 30 (aôut 1702) mourut Mr Antoine Gasté cy-devant avocat au siège présidial et procureur du roy de l’hôtel commun de cette ville ; sa vie a été bien tracassée et il est mort de chagrin.
  • Le 9 septembre 1702 mourut la dame Rousseau de Millieu âgée de 30 ans ; elle s’appelait de Villemorge ; elle a laissé des enfants.
  • Dans ce même temps la fille de feu Mr d’Orvaulx de la Beuvrière et de la dame Letourneux épousa Mr de Bossard.
  • Le 16 (septembre 1702) mourut Mr Bernard, avocat ; il n’a point laissé de postérité ; sa femme s’appelle Bertelot.
  • Le 19 (septembre 1702) Mr de la Barre Bernard, fils de Mr Bernard, conseiller honoraire au présidial et de la dame Bodeau de la Beunoche, épousa la fille de feu Mr Hernault de Montiron, conseiller audit présidial et de la dame Pinard.
  • Au mois d’octobre 1702 mourut la femme du feu sieur Trioche de la Bétonnière ; il y a plusieurs enfants de leur mariage ; elle s’appelait Renard
  • Le 4 novembre 1702 mourut la femme du sieur Buscher, notaire royal ; elle s’appelait de la Haye ; de leur mariage est issue une fille mariée avec le sieur Quelier de Marcé, lieutenant de Mr le prévost.
  • Le 8 (novembre 1702) mourut à Beaupreau Mr François Raymbault de la Foucherie, maire de cette ville, élu le 1er mai dernier. Il en avait rempli les fonctions pendant plusieurs années en qualité de maire perpétuel, ayant traité de la charge érigée en titre mais ayant été remboursé, il a été continué pour 4 ans afin de s’acquérir la noblesse. Il a ordonné par son testament que son corps soit enterré dans l’église de Notre Dame de Beaupreau afinde ménager à la ville les grands frais qu’il aurait convenu faire si son corps avait été apporté en cette ville, comme il arriva en 1628 à l’occasion de l’enterrement de Mr du Martray Barbot avocat décédé maire, qui coûta à la ville plus de 8 000 livres. Le cœur de Mr de la Foucherie fut apporté en cette ville et mis dans le mur du chœur de l’église de St Michel du Tertre. La vigile, toutes les cloches de la ville sonnèrent à 7 heures du soir, à la réserve de celles de l’église cathédrale au refus du chapitre. Mr Lepelletier évêque d’Angers fit la cérémonie ; toutes les compagnies y assistèrent ; un prêtre de l’Oratoire fit son oraison funêbre ; toutes les communautés y vinrent chanter le marin un subvenite ; l’église était tendue en noir avec les armoiries de la vielle et du défunt ; il y avait des bandes de velours sur le drap noir ; le cœur était sous un dais avec des cierges blancs et noirs en grande quantité ; cette cérémonie a coûté 100 pistoles à la ville. Mr de la Foucherie avait un cœur plein de douceur et de charité et a été regretté de tout le monde ; il avait été longtemps à Rome banquier, où il avait amassé de gros biens. Il vint en cette ville où il épousa sa nièce Delle Jacquine Couraut fille des défunts Sr Couraut de Pretiat bourgeois, et de la Delle Raymbault, en conséquence de dispence de deux papes. (Note de Marc Saché : François Raimbault, sieur de la Foucherie, baptisé le 5 juillet 1641, avocat au présidial, banquier en cour de Rome, fut le premier maire perpétuel d’Angers nommé en vertu de l’édit d’août 1692 et installé le 20 avril 1693. Il avait acheté l’office 50 000 livres aux gages de 2 000 livres par an, plus 10 543 livres pour le paiement des droits royaux, les frais de provision et d’installation que la ville lui remboursa. Il fut prorogé dans ses fonctions lorsqu’en 1702 la mairie fut redevenue élective. Il fut élu le 1er mai de cette année même. Sa pierre tombale fut retrouvée en 1863 et son épitaphe fixe la date de son décès au 7 novembre 1702. Fils de Michel R. de la Foucherie, avocat au Parlement, il avait épousé, le 13 octobre 1692, sa nièce, Jacqueline, fille de n. h. Antoine Courau de Pressiat, sieur de la Roussière, et de Jeanne Raimbaud, sa propre sœur. Nous possédons deux jetons différents de ses mairats, l’un de 1696, l’autre de 1700 – Voir Registre du Présidial, p. 159 ; C. Port, Dictionnaire, t. III, p. 220 ; A. de Soland, Bulletin historique et monumental, années 1859-1860 pp. 76, 177 ; Adr. Planchenault, Jetons Angevins, p. 289 ; Gontard de Launay, Recherches sur les familles de maires d’Angers, t4 ; état civil de St Michel du Tertre)
  • Le 13 (novembre 1702) le sieur Vilson, fils d’un couvreur d’ardoise à Durtal, épousa la fille de défunt Mr Gasté, écuyer, avocat au présidial, et cy-devant procureur du roy de l’hôtel de ville et de la demoiselle Noirault ; on dit qu’il est riche des bienfaits d’une dame de qualité de Paris.
  • Le 15 (novembre 1702) Mr Cupif avocat fils de feu Mr Cupif, aussi avocat, et de la Delle Dootel, épousa la fille du feu Sr Urbain de Beauvais et de la Delle Lechamp.
  • Le même jour mourut le sieur Coquilleau de la Blestrie ; il avait épousé la Delle Davy, dont sont issus plusieurs enfants.
  • Le 21 (novembre 1702) Mr de Boumois Berthelot, fils de Mr de Boumois Berthelot, auditeur des comptes à Nantes, et de la feue dame Poisson, épousa la fille de Mr Lebloy, docteur régent ès droits en l’université de cette ville et de la feue Delle Gontard.
  • Le 22 (novembre 1702) mourut Mr du Boulay Chevaye gentilhomme ordinaire chez le roy, à sa maison de campagne près la ville de Beaufort ; il avait épousé la fille de feu Mr Poisson premier apothicaire du roy.
  • Le 24 (novembre 1702) mourut Mr Gilles Guilbault avocat âgé de 78 ans ; il a laissé plusieurs enfants entr’autres Mr Claude Guilbault aussy avocat.
  • Le même jour mourut le sieur Portier notaire royal.
  • Le 27 (novembre 1702) mourut la femme de feu Mr Gaultier de Chanzé, conseiller au présidial ; elle s’appelait Françoise Renou. De leur mariage est issu Mr Gaultier doyen de St Martin, Mr Gaultier de Landebry conseiller de l’hôtel de ville, et une fille décédée femme de Mr Boylesve de Goismard conseiller au présidial.
  • Le 16 décembre 1702 mourut la femme de Mr Baudry l’aîné, conseiller au présidial, âgée de 25 ans ; elle a laissé trois enfants ; elle était fille de feu Mr Paulmier avocat et de la Delle Ménard.
  • Le 13 prédécent mourut Mr François Babin, avocat au présidial, âgé de 89 ans, doyen de Mrs les avocats ; son fils aîné est chancelier de l’université et Me école ; il a laissé un autre fils prêtre et plusieurs autres enfants.
  • Le 16 (décembre 1702) mourut Mr Avril de Pignerolle Me de l’académie, âgé de 50 ans
  • Cette année, les grains ont été assez en abondance ; ily a eu peu de vin et peu de fruits.
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    NANTES LA BRUME, Ludovic GARNICA de la Cruz, chapitre XII Les portes de Neptune

    Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

    Le mois de mars s’éclipsait derrière le paravent du passé avec son attirail d’hiver. Le soleil montait plus haut dans le ciel, versant plus à pic ses mille flêchettes brûlantes, et comme un soupir de gai soulagement se dilatait en la ville.
    On était au samedi quatre avril. Le lancement de l’Hercule dans les chantiers de M. Réchamps devait avoir lieu vers quatre heures. René s’y rendit à pied le long de la Fosse.

    Le quai grondait du cahotement des va-et-vient. A l’entrée la maison des Tourelles où fut signé l’édit de Nantes pointait ses deux cônes. Tranquillement, en promeneur qui n’a pas les minutes à compter, René s’acheminait sous les arbres de la promenade de la Bourse devant l’embarcadère des Abeilles. L’ouverture des pontons est diadémée d’un croissant bleu à lettres blanches. Ou c’est un coquet pavillon en briques rouges près duquel soufflent doucement les naseaux des Abeilles corsetées de clair. Depuis la gare de la Bourse jusqu’au Bureau du port des files interminables de linges séchaient au courant de l’air. Les remous de bâteaux à vapeur flêchaient de la la bave laineuse aux flancs des lougres et des canots au repos.

    L’alignement des maisons bloquaient d’infinissables yeux. Au ras du trottoir les iris se multicoloraient de boutiques en buvettes. Au fond des orbites colorés causaient des cordiers ou buvaient des marins jargonnant en langues étrangères. Des stridences dures de cornes à chaque instant. Sobrement, des vieux cassés tiraient des chaînettes de chaque côté des rails. Un train passe à pas comptés, renâcle ; la bielle fulgure. La fumée se perd dans des arbres étiques, sur les toitures malpropres des hangars où s’adossent des signaux rouges et blancs.
    Labyrinthal enchevêtrement des rails, de becs de gaz isolés comme des piqûres de voile, de poteaux télégraphiques – étagères à bonnets de coton, – de piles colossales de sacs, des caisses entre lesquelles cerclaient les camions, les chevaux dolents tiraillant les wagons poussifs, des barriques aux culs verts ou rouges alignées.

    Alentour, les mains derrière le dos, flegmatiquement les douaniers, les débardeurs en blouses bleues, culottes grasses, les rentiers fumant leur pipe ou digérant.

    D’énormes bâches noires goudronnées calfeutrent les membres jaunâtres des planches. Les ventres gris des bidons de pétrole. Abcès sombres dans les gencives du quai. Parmi la dureté de l’ambiance, une petite guérité égaye sa robe blanche à rayyres bleues, près d’une panoplie-écriteau encadrée de crocs, – de la société des Hospitaliers sauveteurs bretons. Sur les blocs de fonte, quartiers de momies formidables, des voyous battent une manille. Dans les wagons vides, les enfants rajeunissent le port de leurs ébats.

    Les curieux, le nez en l’air, s’ébaubissent devant le pont transbordeur qui s’achève peu à peu. Son premier pylône est complètement terminé depuis le mois de novembre, le second fiit de grandir à son tour, et la rue, au sommet, le doigt en l’air, semble vouloir sans cesse monter plus haut, orgueilleuse de toucher le visage du ciel. Les hommes travaillent dans les replis des tiges de fer, semblables à d’infimes araignées tissant une toile inextricable.

    Plus loin, l’église Saint-Louis en un renfoncement cligne de l’oeil un bout de quai ; l’ange de sa flêche ferme les ailes sur le dôme en boule de billard. Le passage du Sanitat, curieux par sa voûte louche, protège le simple commerce d’une marchande de pommes de terre frites.
    Scellés au port par d’énormes amarres nouées, les navires ont replié les ailes du voyage. Les cheminées luisent comme des fleurs brutales au travers le réseau des mâts échevelés de cordages. Tout contre figées, les grues impassibles semblent lever des bras épouvantés. A l’arrière, à l’avant, sabrent la vue les noms internationaux ; quelques drapeaux flottent.

    Là bas, en face des Entrepôts de la Douane, cloportes sombres accoupis dans la boue nécessaire, au frontal perlé du titre en lettres d’or, le déchargement du sucre s’opère avec animation. Les chaînes grincent, decendent en plein estomac d’un vapeur, extirpent un à un les barils – ils pendent en l’air comme des gros crabes – les reposent sur le quai. Ils sont roulés, bousculés ; les hommes s’acharnent ; la fourmilière s’accentue ; la fumée même son ombre sur les visages. Puis ce sont des gures à bras que cinq manoeuvres tournent.Les crémaillères des roues craquèlent à chaque effort. Et les charges lentement s’élèvent, boulant une tâche sur l’horizon pur.

    Au-dessus, l’horloge des docks veille, fixant irrévocablement la mesure du temps. Son ordre va plonger au-delà du fleuve dans les chantiers de constructions navales, où les poutres érigent un gigantesque jeu de quilles. Des houles invisibles passent en grondant un bruit terrible d’enclume. La chanson du fer s’attendrissant aux doigts de l’homme. La coque d’un bâtiment inachevé semble un saumon énorme resté prisonnier entre les pieux.

    Des estacades étendent leur ratelier à l’entrée du port. Les dragues tournoient leurs seaux vaseux. Les remorqueurs, traînant une flotille plurale de chalands, brutalisent l’eau tranquille à coups d’hélices. Les chaloupes tendent leurs voiles de couleur. Les yachts fusent le nez dans l’écume. Un lougre cheche une place. Incessamment bourdonnent les bateaux-omnibus entre Nantes et Trentemoult.

    Après la rue montante de l’Ermitage, bornée de rochers, l’escalier aux cent marches élargie à sa base ses perrons réguliers dominés parla statue de Sainte-Anne, le bras levé, hautaine de bénédictions sur l’ensemble du port de Nantes.

    Un formidable chaos bout dans le crâne du jeune homme, à l’étalage de la vie sanguine de la ville. C’est là que l’on bat la pâte de l’alimenation où puisent les intestins de la Cité. La flotte fluctueuses des fumées d’usines gonfle ses voiles au souffle des haleines du travail. Nantes, immense entrepôt de denrées coloniales pour le bassin de la Loire ! Nantes, parterre colossal d’usines métallurgiques, de raffineries, de savonneries ! Nantes, poitrine volcanique de triturations à charbons ! Nantes, épopée de l’outil, de l’industrie, du commerce ! Nantes, la véritable assoiffée du matériel, de l’utilitaire, du broyage perpétuel ! Nantes, qui s’entend seulement vivre par le bruit des treuils sur son port, son port que fauchent les mats en fête, que colore le halêtement des charrues du fleuve patiemment poussées par les hélices frondeuses. Les sirènes s’appellent, se répondent. Elles se comptent ; les poitrails sont hors de l’eau. Génisses énervées attendant l’assaut du mâle ; la carène s’assouplit pour le choc d’amour. Il passe un long frisson comme l’aile d’un albatros ivre de vin. La cuve déborde de sève épaisse, de chyle résorbant, d’un chrême luxuriant. Les déchets créent la vie, la cie crée les déchets. Tour à tour dans le cercle fatal écolue la transcormation des choses, le rite sacramental de baptême et d’onction. C’est Nantes qui s’accouche perpétuellement d’elle-même par la fécondation incessante de son gigantesque port.

    Les chantiers Réchamps grouillent en habits de fête. Le patron serre la main de ses ouvriers qu’il félicité chacun son tour. Et ils sont eux aussi joyeux à l’ombre du titan que refrènent de larges langes de bois et d’énormes ceintures de fer.
    René est là. Il vient de présenter ses hommages à la famille Lonneril. La jeune fille a sur lui attaché son oeil clair tintant d’un simple reproche. Il n’a pu soutenir intrépidement ce regard. Cependant il eut le vertige doucereux d’un symptôme de paix atterrissant à son âme.

    L’heure approchait du navire allant plonger ses flancs vierges dans la vulve éclaboussante de l’onde. Ayant sa femme au bras, M. Réchamps filt le tour du pont, attacha lui-même un bouquet rouge à la proue, puis le plus ancien des ouvriers hissa le drapeau rouge à la poupe. Et le maître parla. Il parla chaleureusement de fraternité profonde, d’égalité cordiale, d’union ineffritable. Il combla les coeurs d’espoirs, de bonheurs pacifiques. Son geste superbe semblait dessécher le lac qui les séparait du parfait domaine de justice, ses yeux poindre un horizon ensoleillé du cantique triomphal des travailleurs et des déshérités. Sur le silence respectueux et enthousiaste de la foule sa voix fripait des froufrous d’âmes réconfortées. Les coeurs s’élargissaient d’aimer ; les poings se serraient pour la lutte malheureusement imminente. La petite taille de l’amateur grandissait infiniment au choc des mots métalliques dont les étincelles emflammaient les autours. Sa main désignait la Ville. La Ville lointaine, un âté de toits moulés dans la gélatine grise, un volcan sourd où grondaient des laves d’idées contraires ; la Ville comme une citadelle à conquérir, un quartier malsain à pacifier de l’égoïsme et de la routine, une terre à défricher des mauvaises herbes de l’envie et de l’orgueil, pur y semer la bonté et la fraternité. Sa main leur montra le fleuve mousseux d’or et d’argent, la fiere brute qui ne supporte aucun obstacle, dévore les arbres, les navires et les hommes ; le fleuve qu’ils allaient dompter une fois encore à l’aide de leur travail commun : l’Hercule. Son hélice éperonnait l’au rageuse, soumise malgré sa force. Le Fleuve vaincu, au tour de la ville. Puisse l’Hercule porter un jour – précieuse comme un diamant – la victoire drapée dans les plis pourpres de leur flamboyant drapeau :
    Des centaines de poitrines entonnèrent une ovation cordiale à l’armateur. Tous regardaient leur travail avec orgueil. La joie d’avoir mis la main à une oeuvre fraternelle et d’émancipation future les faisait acclamer l’homme qui les commandait, l’homme qui se dévouait pour leur cause, qui leur offrait leur formidable exécution, sa conception, sa pensée, lueur rouge de ralliement, bélier tranchant de l’avant-garde, pivot défiant les assises ancestrales du capitalisme. Et quand la masse descendit, faisant flamber les poutres à son frottement, le nez coupait les plèvres de la Loire, chassait l’eau loin derrière lui, l’écume ballonnait alentour, lasse d’une lutte désespérée entre le fleuve et le navire. Illeur parut être le conquérant d’une première bataille et se reposer sur les flots comme un guerrier las sur le champ de ses exploits. Les maisons de Tretemoult s’estompaient de brume, le port s’emmaillotait de brouillard, les grues surgissaient pareilles à des machines de guerre qui sèmeront des cadavres au lever de la lumière, les navires échelonnés le long des quais se transformaient en colossals canons, gueules bées, attendant le signal pour vomir la mort, les maisons repliaient leurs manteaux, fortifiaient leurs façades. Tout était gris, terriblement gris, symptôme de combat. Et l’Hercule impassible se dandinait, sa silhouette allongée démesurément sur le crépuscule.

    Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

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    Journal d’Etienne Toisonnier, Angers 1683-1714 (1701)

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  • Le 16 janvier 1701 mourut la femme de Mr Trouillet lieutenant particulier au présidial ; elle n’a laissé qu’un garçon ; elle s’appelait Martineau fille de feu Mr Martineau juge de la prévôté et de la Delle Gouin.
  • Le 26 (janvier 1701) mourut la Delle Trochon de la Martinnière, veuve du feu Sr Trochon, marchand de soie en cette ville ; elle s’appelait Avril ; elle a laissé un garçon et 2 filles, savoir Mr Trochon, juge de la Prévôté, la femme de Mr Dupont de la Morinnière conseiller au présidial et feu Madame Binet de Montifray
  • Le 29 (janvier 1701) mourut la femme du Sr Lefebvre de Chamboreau ; elle a laissé un enfant ; elle s’appelait …
  • Le 31 (janvier 1701) Mr Milon de la ville de Tours épousa Melle Lepelletier de la Lorie, fille de feu Mr Lepelletier de la Lorie, prévost d’Anjou et de la dame Lejeune.
  • Dans ce même temps mourut Mr de Lerat des Briottières ; il n’a laissé qu’un enfant de son mariage avec le feu dame Avril, marié avec la Delle Verdier de la Sorinière.
  • Le 19 février (1701) Mr Janneaux fut installé en la charge d’avocat du roy cy-devant remplie très dignement par Mr Martineau.
  • Le 24 (février 1701) mourut Mr Midorge receveur des tailles ; il laisse 100 000 écus à ses héritiers.
  • Le 5 mars (1701) Mrs Jacques Guin et Daigremont plaidèrent leur première cause.
  • Le 19 mars (1701) Mr François Delorme, fils de feu Mr Jean Delorme, avocat, et de la Delle Daulmeau, fut installé en la charge de conseiller au présidial cy-devant remplie par Mr de Lyvonnière Pocquet.
  • Le même jour le sieur Bory, fils du Sr Bory, notaire, et de la dame Cireul, fut installé en la charge d’élu en l’élection de cette ville cy-devant remplie par le Sr Legauffre de la Chauvelaie.
  • Le 3 avril (1701) mourut la femme de Mr Charlot des Loges, le Jeune ; elle n’a point laissé de postérité ; elle était fille de Mr de Crespy de la Mabillière procureur du Roy au présidial et de la dame Chauvel de la Boulaye.
  • Le 4 (avril 1701) Mr Gautreau, avocat et procureur du Roy de l’hôtel de cette ville, fils de Mr Gautreau, aussy avocat, et de la Delle de La Porte, épouse la filel du Sr Maillard notaire cy-devant sergent et cabaretier (je crois que je vais installer une page des doubles métiers curieux !)
  • Le 11 (avril 1701) Mr de Crespy, escuyer, Sr de Chauvigné, file de feu Mr de Crespy, escuyer, Sr de Chauvigné, et de la dame de Meguyon, épousa la filel de Mr de la Mothe, mon beau-frère, receveur des décimes et de défunte Delle Catherine Guillot.
  • Le 12 (avril 1701) le fils du Sr Lefebvre président à Ingrandes, et de la Delle Outin, épousa la filel du sieur Ollivier, marchand, et de la dame de l’Hommeau.
  • Le 17 (avril 1701) mourut le sieur Toutain, marchand de bois.
  • Le 19 (avril 1701) Mr Georges Daburon avocat, fils de feu Mr Pierre Daburon aussy avocat, et de la défunte Delle Audouys, épousa la fille du Sr Foureau de Barot cy-devant lieutenant de Me Le Provost.
  • Le 26 (avril 1701) mourut Mr de Vaugirault Vollaige veuf en 1ères noces de la Delle Talour de la Cartrie et en 2e de la Delle Lefebvre de Chamboureau. Il y a des enfants de ces 2 mariages.
  • Le 30 (avril 1701) mourut le sieur Legris, marchand de soie
  • Le 1er may 1701 les sieurs Chotard et de la Porte Trochon furent élus échevins.
  • Le 6 (mai 1701) mourut le Sr Richard, marchand droguiste confiseur.
  • Le 9 (mai 1701) Mr des Emeraux Leclerc, 2e président au siège présidial de cette ville, fils de Mr Leclerc des Emeraux et de la dame Charlot, épousa la filel de Mr Dumesnil, chanoine de l’église d’Angers, et cy-devant prieur de Daon, veuf de la Delle Cormier.
  • Le même jour (9 mai 1701) Mr Chauvel de la Boulaye fils de Mr Chauvel de la Boulaye conseiller au Requestes en Bretagne, et de la dame de Crespy, épousa la fille de Mr Lezineau docteur régent ès droits en l’université de cette ville et de la défunte Delle Boüard
  • Le 17 (mai 1701) mourut Mr Godes de Varanne, gouverneur de la ville et château de Landrecy, cy-devant capitaine aux gardes. Il a épousé la fille de feu Mr Leclerc de Saultray.
  • Le 31 (mai 1701) Mr Janneaux, avocat du Roy, fils de Mr Janneaux, avocat au présidial, et de la Delle Andrault, épousa la fille de feu Mr Maugin cy-devant contrôleur au grenier à sel, et de la Delle Lautraige.
  • Le 3 juin (1701) mourut Mr de la Rouerie Grimaudier, escuyer
  • Le 13 (juin 1701) Mr de Danne Audouin, fils de Mr Audouin, docteur régent ès droits en l’université de cette ville, et de feue dame Ménage, fut installé en la charge de conseiller au présidial cy-devant remplie par Mr Boucault de Mélian.
  • Le même jour Mr de Vaugirault fut installé en celle de Mr de la Varanne du Tremblier.
  • Le 17 (juin 1701) mourut Mr Delaunay, avocat, âgé de 46 ans
  • Le 21 (juin 1701) le sieur Jean Neveu de la Harmardière, veuf de la Delle Guynoiseau, dont il n’a point d’enfant, épousa la fille de feu Mr Pichard, avocat, et de la Delle Bousselin. Elle s’appelait Agathe Pichard.
  • Le 22 (juin 1701) mourut Mr François Leroyer avocat, âgé de 73 ans ; son fils âiné a épousé la Delle Gauld ; le cadet, contôleur au grenier à sel de Candé mademoiselle Poitraz et sa fille Mr de Chazé de Craye escuyer
  • Le 11 juillet 1701 Mr Menage, fils de feu Mr Ménage, très savant avocat du Roy et de la dame Doussier, fut installé dans la charge de conseiller au présidial, cy-devant remplie par Mr Dupont de la Morinière.
  • Le 15 (juillet 1701) mourut Madame Gourreau veuve ; de son mariage est issue une fille unique mariée avec Mr Michau de Montaran conseiller au grand conseil et trésorier des états de Bretagne. Elle s’appelait Périgault.
  • Le 9 août 1701 mourut la femme du Sr Audoüis de la Cléraudière bourgeois ; elle s’appelait Grézil .
  • Le 13 (août 1701) mourut la femme de Mr Boucault de la Houssaie, conseiller ; elle s’appelait Lepetit de la Besnerie.
  • Le 29 (août 1701) Mr de Flains Jourdan, conseiller au présidial, veuf de la Delle Deroye, dont il n’a point eu d’enfant, épousa mademoiselle de la Marre Colas.
  • Le 20 septembre 1701 mourut la femme de feu Mr Jousselin, docteur en médecine ; elle s’appelait Bernad ; de leur mariage sont issues 2 filles, la 1ère décédée il y a longtemps, avait épousé Mr Thomas de la Rousselière, conseiller au présidial, et l’autre, Mr Grandet, aussi conseiller audit présidial.
  • Le 2 (septembre 1701) mourut subitement la femme de Mr Grandet, conseiller honoraire au présidial ; elle était fille de feu Mr Jousselin, docteur en médecine et de défunte Delle Bernard.
  • Le 2 (septembre 1701) mourut la femme de feu Mr Boizourdy bourgeois, âgée de 77 ans ; elle a laissé plusieurs enfants, entr’autres Mr Boizourdy avocat du roy ; elle s’appelait…
  • Le même jour mourut la femme de Mr de la Rais Guéniveau, président en l’élection de Montreuil ; elle s’appelait Margariteau ; cette femme était fort belle
  • Le 12 décembre 1701 Mr Trouillet, lieutenant particulier au siège présidial et sénéchaussée, veuf de la dame Martineau, duquel mariage il y a un fils, épousa mademoiselle de La Jaille d’Avoine, fille de Mr de La Jaille d’Avoine, escuyer, et de la dame de Maillé de la Tour Landry.
  • Cette année a été assez fertile en bleds et en vin, grâce à Dieu.
  • Numérisation par frappe du manuscrit : Odile Halbert, mars 2008. Reproduction interdite.
    Légende : en gras les remarques, en italique les compléments – Avec les notes de Marc Saché, Trente années de vie provinciale d’après le Journal de Toisonnier, Angers : Ed. de L’Ouest, 1930
    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet

    NANTES LA BRUME, Ludovic GARNICA de la Cruz, chapitre XI le cul-de-sac

    début du chapitre XI : le cul-de-sac

    chapitre 1 : le brouillard 2 : la ville 3 : la batonnier et l’armateur 4 : le peintre 5 : le clan des maîtres 6 : rue Prémion 7 : labyrinthe urbainchapitre 7, suite8 : les écailles 9 : emprises mesquines 10 : carnaval11 : le cul-de-sac
    Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

    Coac… coar… ard… ac… ard…coc coa cco ard…

  • Phare, Populaire… vient de paraître
  • Les vendeurs de journaux se dispersaient en la ville, hurlant dans leur corne criarde et courant sans cesse à qui arriveraient les premiers au bout des multiples artèes. D’autres allaient prendre leur place coutumière près du kiosque des trams, ou faisaient la tournée des grands cafés.
    Sept heures et quart environ ; René se rendait au restaurant. Un camelot l’agaça : Phare, Populaire, m’sieu ! Il acheta un numéro de chaque.
    De nombreux trottins troussés jusqu’aux genoux se pressaient par les rues boueuses, montrant leurs mollets séduisants aux vieux marcheurs l’oeil au guet. Les magasins vidaient leurs employés, calicots inanes et coquettes vendeurs aux yeux cerclés par les doigts de l’amour, aussi les humbles miséreuses trop pauvres ou trops laides, les souffre-douleur d’ateliers dont on ricane au passage, l’apprentie qui se poudre et singe la première.
    Rue d’Orléans, à la devanture d’un marchand de comestibles, où sur la nappe blanche et propre d’architecturaient des plats succulents, sculptés de promesses alléchantes, une gosse se haussait sur la vitrine ; elle semblait fascinée, enflant ses narines. La gamine n’était pas grosse ; ses os se moulaient à sa robe noire mince pour l’hiver. Comment ne grelottait-elle pas sous cette minuscule pélerine qui lui tombait à peine aux coudes ? Pas de fourrures, pas de gants, des doigts bleuis, croisés sur son corsage, une petite frimousse pâle exsangue, adorablement jolie ; ses cheveux étaient enroulés en chignon, – comme une dame, quoi ! Flairant une nouvelle aventure, René l’aborda gentiment.

  • Aimeriez-vous ces plats ?
  • Oh ! oui, monsieur.
  • Voulez-vous dîner avec moi ? il y aura des choses aussi bonnes.
  • Je veux bien… Vous ne me ferez pas rentrer tard car je serai battue ?
  • Non ! J’irai vous reconduire.
  • Au restautant. Une salle étroite. Un feu de charbon rouge comme une blessure vive. La table bourrée de plats exquis ; une orgie d’excellents mets et de vins de choix. René en face la gamine. Il lui avait noué la serviette autour du cou ; sans crainte de se tâcher, elle fourrageait ses mains dans la graisse, le beurre et les sucreries. Elle dévorait gloutonnement, graissait ses joues, son menton, son nez, usait rarement de la fourchette, préférant la commodité à l’usage. René s’amusait fort intérieurement de la voir se gaver.

  • Tu avais faim, je crois ?
  • Dame, je n’avais pas mangé depuis hier soir. Et encore, c’est pas bon chez nous ?
  • Vous êtes nombreux chez vous ?
  • Y a le père, la mère et deux mômes de cinq et six ans… qui sont bien mignons… on n’est pas riches, monsieurs, on n’a pas de pain tous les jours. Le père est manoeuvre. Il travaille pas souvent. Il se cuite avec ses paies et nous bat tous quand il est saoul., autrement, il est pas méchant. La mère est estropiée. Elle est des jours sans se lever. Elle se plaint. Le médecin dit que c’est pas la peine qu’il vienne, qu’y a rien à faire. Quant aux moutards, ils n’ont pas de fricot comme ça eux.
  • Tu les aimes bien tes petits frères ?
  • Ils sont si mignons… on se prive pour eux. Les grands supportent mieux la misère que les petits… Veux-tu que j’emporte du poulet dans un papier pour leur donner avec des gâteaux.
  • Prends ce que tu voudras ; tiens, aussi cette pièce d’or.
  • Non : Maman me battrait… et le père donc, y m’en ficherait une tournée… Je leur donnera ça à manger en cachette ; ils seront contents… J’en ai assez… où vas-tu m’emmener maintenant ? Tu ne me feras pas rentrer tard ?
  • Sois tranquille… Embrasse-moi si tu es contente.
  • Elle s’essuya soigneusement la bouche et grimpant sur ses genoux, elle l’embrassa sur les deux joues.
  • Quel âge as-tu, douze ans ?
  • Des prunes… dix-huit ans au mois de mai prochain.
  • Tu mens… une gringalette comme toi.
  • J’ai pas profité, pardine. Nous, les pauvres, on peut pas se développer comme les riches, à boire de l’eau, du pain sec et quelquefois des journées à souffrir la faim et travailler quand même sous peine d’être jetée à la porte par la patronne.
  • Qu’est-ce que tu fais ?
  • Je suis chez une couturieur. Elle me donne quinze sous par jour… Et je ne paie rien ; je porte le tout à la maison… Ça nous fait pas beaucoup pour tous.
  • Ça ne m’étonnent pas si les devantures gourmandes te tentent.
  • Oh ! Elles ne me tentent pas. Je suis envieuse. Je le fais exprès.
  • Exprès ?
  • C’est un truc. Quand j’ai trop faim et qu’il y aura pas à la maison, je me colle comme ce soir contre la vitrine. C’est rare qu’il ne passe pas un vieux qui m’invite à dîner avec lui.
  • Ce soir, ce fut un jeune…
  • C’est la première fois.
  • Lorsque tu as dîné qu’est ce qu’ils te disent les vieux ?
  • Ils m’emmênent avec eux dans une chambre… Je couche avec, pardi.
  • Et ça te fait plaisir d’aller avec ces gens-là.
  • Ça m’est égal… ni froid ni chaud… faut payer avec ce qu’on a…les hommes ne donnent pas à mangers aux filles pour rien.
  • Tu ne sais donc pas que c’est mal ?
  • Mal !… et crever de faim est-ce bien ?
  • Tu te trouves heuseuse ?
  • Ça dépend… Quand j’ai bien mangé et que le père me bat pas, je suis contente.
  • Longtemps encore il l’interrogea. Elle répondait de sa voix simple, contant avec naïveté son humble vie d’héroïsme, de dévouements, d’abnégation, avec une résignation touchante et triste à pleureur ; une âme d’élite que la misère imbécile consuit à l’indifférence de la brute par les sentiers de la souffrance besogneuse. L’idéal tué à coups d’épingles ; sur son cadavre l’acceptation d’une existence bornée aux soucis pressant du vivre quotidien, avilissement naturel, comme fatal, du corps chétif idiotant l’âme.
    Il eut pitié de la pauvre fille. Il la caressa tendrement, presque dévotement, ainsi qu’une martyre nécessaire à la société. Il crut s’amurer avec une petite soeur longtemps absente, une petite soeur orpheline sans autre soutien qu’un grand frère. Elle s’était chattement pelotonnée dans ses bras. En ce nid chaud elle s’était endormie. Le silence. L’horloge tic-taquait, insupportable, régulière. René râvait, les doigts frisottant les boucles de la gamine. Son rêve puisé à la beauté de sa compagne lui mit soudain un désir comme un coup de fouet. Il se leva en sursaut.

  • Partons, dit-il à voix basse.
  • Somnolente encore elle se laissa conduire par la main. L’air frais de la nuit la réveilla complètement.

  • Où habites-tu, petite ?
  • Rue des Carmélite… on rente ?
  • Oui.
  • Tu ne fais pas comme les autes ?… Tu me trouves mal ?
  • Non !… Je te plains de tout mon coeur et je t’aime pare que tu es une souffrance immérité dont les goujats seuls peuvent abuser.
  • Alors, c’est pas pour ça… que tu m’as offert à dîner ?
  • Non !… C’est parce que tu m’as fait pitié.
  • Dis-tu vrai !… Tu as peut être dégoût des vieux d’avant toi !
  • Il ne répondit pas. Elle secoua la tête.
  • C’est pas possible que tu m’aies donné à manger pour la peau… Tu me connaissait pas… Tu me carottes.
  • Crois ou ne crois pas, petite amie, reprit avec sévérité René. Je n’ai aucun mépris de tes antérieurs. Je n’en ai qu’une grande compassion. Fais ce que tu voudras. Sache cependant qu’il y a de bons coeurs, des âmes susceptibles d’obliger leur prochain pour le bien ou comme réparation de l’inégalité des fortunes. Si tu penses parfois à moi, rappelle-toi que je t’ai aimée en maudissant le sort qui t’a jetée dans la vie… Au revoir, mignonne, je m’appelle René de Lorcin ; j’habite ru Saint-Pierre. Si tu as faim, viens chez moi ; tu auras ce que tu voudras sans te demander en échange qu’un baiser de soeur, et une promesse de ne plus retourner avec ses autres qui profitent de leur charité.
  • Des larmes brillaient aux cils de la jeune fille.

  • Bonsoir, monsieur, merci… voulez-vous que je vous embrasse ?
  • Il se pencha. Elle entoura son cou de ses deux bras et lui dit imperceptiblement à l’oreille.

  • Si vous voulez, je vous aimerai de tout mon coeur… je sor le soir à sept heures rue d’Orléans.
  • Avait-elle menti ? Etait-elle partie ? Ne se rappelait-elle plus son adresse ? René ne la revit pas et ne sut jamais ce qu’elle était devenue.

    Le lendemain matin avant de se lever, il s’étirait, retardait le moment de sauter sur la descente de lit. Les journaux achetés la veille gisaient sur la table de nuit. La tête hors des draps, il les parcourut par ci, par là. Un titre l’attira : Suicide d’un banquier. Il fut stupéfait, épouvanté…

    « … Hier, vers quatre heures et demie, une détonation retentissait dans le cabinet de M. Delange, banquier, rue de la Barillerie. Les employés se précipitèrent. Ils trouvèrent leur patron encore assis dans son fauteuil de cuir, couvert de sang, la cervelle éclatée, un oeil hors de l’orbite. On courut prévenir la police… »

    René se leva comme un fou, s’habilla en deux tours de main et courut chez le peintre.

  • Tu as sans doute appris la triste nouvelle et tu viens m’apporter tes condoléances, lui dit Charles en le voyant entrer.
  • Mon pauvre ami, je viens de lire le journal. C’set affreux. Je tiens à te renouveler mon amitié et me mettre à ton service pour tout ce dont tu pourrais avoir besoin.
  • Charles sourit douloureusement.

  • Ne pas abandonner le fils d’un suicidé, c’est déjà la meilleure preuve de l’amitié. Merci ! Autour du cadavre vont s’agiter les spectres de la haine. Ils remueront la mare de sang de mon père pour m’en éclabousser la face. Leur rancune ne pardonnera pas les pertes d’argent. Toucher la bourse, c’est toucher plus qu’à la vie. Vae victis ! Je vais apprendre ce que va ma couter mon dédain de leurs préjugés, de leurs routines, de leurs allurs de gens bien pensants. Ils vont souffler sur mes ailes orgueilleuses et lointaines l’odeur cholérique de leurs méchancetés satisfaites ; ils s’en donneront à coeur joie dans le sang caillé du suicide.
  • L’enterrement fut triste, presque une fuite. René et quelques rares amis, peu de parents honteux accompagnèrent Charles derrière le cercueil de son père. La ville semblait pressée de se débarasser d’un pustule soudainement crevé.

    Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

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    Nicolas Travers : un grand Nantais issu du Craonnais

    Peu ou pas connu à Craon, commémoré à Nantes par une rue Travers joignant la place du Change à la place Sainte-Coix, Nicolas Travers (1674-1750) est un historien de Nantes et un théologien janséniste censuré pour ses publications subversives.

    Il naît à Nantes le 10 août 1654, 11ème enfant de Pierre Travers et Françoise Lanier, qui en auront 14. Ses biographes le donnent dernier des 7 enfants, car ses parents en perdent autant en bas âge. Il en était souvent ainsi autrefois !

    Sa mère, Françoise Lanier, est Craonnaise. La famille Lanier, bien connue à Craon, est détaillée sur mon site, et la branche des Travers y est détaillée en pages 4 à 6

    Ses parents ont sans doute noué connaissance lors d’un voyage d’affaires de Pierre Travers à Craon, pays de toile. Il est toilier, Me brodeur, et notaire, mais plus généralement connu comme maître brodeur. Le mariage est célébré à Craon le 4 juillet 1660. Pierre Travers n’est pas venu seul de Nantes, distante de 95 km, c’est à dire plus de 2 journées de cheval, ou une journée en changeant de cheval. Il est accompagné de son beau-frère Guilbaud.

    Nicolas fait ses humanités au Collège de l’Oratoire, y subit l’influence de Port-Royal. Devenu prêtre, il est nommé vicaire à Saint-Saturnin de Nantes, après un court passage à Héric et Treillières.
    Il entretient une correspondance avec les savants comme Dom Lobineau etc…, se mêle de polémique archéoloque, et publie sur le thème de la subornidation aux évêques, ou plutôt de l’insubordination.
    Censuré, il est condamné par lettre de cachet à résider chez les Augustins de Candé, où il va séjourner de 1745 à 1748, et en sort sur sa promesse « de ne plus imprimer quoi que de fût sur les affaires de l’église.»
    J’aime bien ce petit clin d’oeil à Candé, située à mi-chemin entre Craon et Nantes ! Signe pour Nicolas Travers d’un exil forcé sur les terres d’Anjou, dont il est originaire par sa mère. J’ajoute ici, ce que vous pouvez voir dans les 14 actes de baptême à Nantes des enfants de Françoise Lanier, que la famille du Craonnais a régulièrement visité les Travers à Nantes.

    Son oeuvre la plus célèbre est l’ « Histoire civile, politique et religieuse de la ville et du comté de Nantes », qui de devait paraître qu’au 19e siècle, en particulier grâce à l’historien Dugast-Matifeux, son biographe. Cet ouvrage est encore incontournable pour tous les historiens de Nantes.

    Sa sépulture est rédigée à la fois à Saint-Léonard, paroisse dans laquelle il est décédé le 15 octobre 1750, et dans celle de Sainte-Croix, dans laquelle il avait demandé à être inhumé.

  • En savoir plus :
  • Dugast-Matifeux, Nicolas Travers, historien de Nantes et théologien, in Annales de la Société Académique de Nantes, 1856, pages 250 à 326

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    Prête-nom au 17e siècle

    Voici une vieille méthode de dissimulation d’un véritable destinataire dans un contrat : le prête-nom

    Prête-nom : Celui qui prête son nom dans quelque acte où le véritable contractant ne veut point paraître (tous dictionnaires, mêmes anciens)

    J’avais rencontré cette pratique, que je considère comme regrettable, lors des ventes de biens nationaux pendant la période révolutionnaire. Ici, je la rencontre en 1625 d’une manière qui m’intrigue car le véritable prêteur, qui dissimule son nom, est un Chesneau, et l’emprunteur Marie Chesneau. On peut croire qu’ils sont proches parents, même s’ils demeurent loin l’un de l’autre, je suis certaine qu’ils ont une origine commune. Le frère (hypothèse de parenté) a voulu dissimuler qu’il prêtait lui-même de l’argent à sa soeur ? Je reste songeuse sur les motifs d’une telle dissimulation.

    Enfin, le patronyme PECCATTE ne m’est rien, mais je le trouve en Normandie, et je parie qu’il est d’origine normande, d’ailleurs il est en 1625 près de Lassay-les-Châteaux, qui touche la Normandie.

  • L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6. Il comporte 4 actes attachés ensemble :
  • 1-Constitution d’une rente hypothécaire par Mathurin Peccatte et Marie Chesneau
  • Voici la retranscription de l’acte : Le 23 septembre 1625 avant midy par devant nous Louis Coueffe notaire royal Angers furent présents establis et deuement soubzmis Mathurin Peccatte marchand demeurant à Niort près Lassay pays du Maine (Niort-la-Fontaine, à quelques km à l’ouest de Lassay-les-Châteaux, Mayenne) tant en son privé nom que au nom et soy faisant fort de Marie Chesneau sa femme à laquelle il promet faire ratiffier ces présentes et obliger solidairement avec luy à l’effet et entretien et bailler lettres de ratiffications et obligation valable d’huy en 15 jours prochains venant,
    et Pierre Chesneau Me cousturier demeurant en ceste ville paroisse Saint Maurice
    lesquels eux et chacun d’eux seul et pour le tout sans division de personne ni de biens eux leurs hoirs, confessent avoir ce jour d’hiy vendu créé et constitué et par ces présentes vendent créent et par hypothèque … à Me Nicolas du Chardonnet demeurant en ceste ville à ce présent et acceptant et lequel a achapté et achepté pour luy ses hoirs la somme de 18 livres 15 sols de rente hypothécaire annuelle et perpétuelle payable et rendable franche en ceste ville eux leurs hoirs audit acquéreur ses hoirs chacun an en sa maison en ceste ville à pareille jour et date premier paiement d’huy en un an prochain venant et à continuer,
    laquelle somme de 18 livres 15 s de rente lesdits vendeurs eux et chacun d’eux esdits noms solidairement … ont assigné et assignent généralement sur tous et chaxuns leurs biens meubles immeubles rentes présents et futurs quelqu’ils soient avec pouvoir audit acquéreur ses hoirs et ayant cause de demander et faire déclarer toutefois et quant il plaira pareille assiette …
    et auxdits vendeurs leurs hoirs de l’admortir quand bon leur semblera
    et est faite ladite vendition création et constitution de rente pour la somme de 300 livres tz payée au veu de nous notaire par ledit acquéreur auxdits vendeurs qui s’en contentent …

    et a ledit Peccatte esdits noms esleu son domicile en la maison de honorable femme Marye Rimon veufve pour y recepvoir tout exploitz et actes …
    fait et passé audit Angers à notre tablier présents Me François Valleau et Gervais Seure

  • 2-Contre-lettre de Mathurin Peccatte
  • Le 23 septembre 1625 devant Louis Coueffe notaire Angers … Mathurin Peccatte marchand demeurant à Niort près Lassé pays du Mayne tant en son nom que se faisant fort de Marye Chesneau sa femme … lequel a recogneu et confessé qu’à sa prière et pour lui faire plaisir seulement Pierre Chesneau Me coustellier demeurant en ceste ville s’est en sa compagnie constitué vendeur solidaire sur tous ses biens futurs vers Me Nicolas Chardonnet de la somme de 18 livres 15 sols de rente hypothécaire …

  • 3-Nicolas Chardonnet reconnaît avoit été prête-nom
  • Le 23 janvier 1625 après midy par devant nous Louys Coueffe notaire royal Angers, fut présent estably et deument soubzmis Me Nicolas Chardonnet demeurant en ceste ville lequel a recogneu et confessé que la somme de 300 livres qu’il a ce jourd’huy payée et fournye à Mathurin Peccate marchand demeurant à Niort près Lassé (Lassay) pays du Mayne et Pierre Chesneau Me coustelier Angers, et pour laquelle ils luy ont vendu et créé et constitué sur tous leurs biens 18 livres 15 sols de rente hypothécaire annuelle et perpétuelle par contrat passé par nous notaire, appartenait audit Chesneau qui la luy avait mise entre mains à l’effet dudit contrat sans qu’il en ait déboursé aucune chose et luy a seulement presté son nom pour lui faire plaisir au moyen de quoy ledit Chardonnet a consenty et par ces présentes consent que ledit Chesneau se fasse payer et continuer chacun an de ladite rente contre ledit Peccatte et Marye Chesneau sa femme …

  • 4-Ratiffication par Marie Chesneau
  • Le 1er octobre 1625 avant midy par devant nous Jacques Duboys notaire en la court royal du Mans demeurant à Rannes fut présent estably et deuement soubzmise Marie Chesneau femme de Mathurin Peccatte marchand à ce présent qui l’a authorisée par devant nous quand à ce demeurant à Niort près Lassay pays du Mayne, laquelle après que nous notaire luy avons fait lecture de mot à autre du contrat de constitution de 18 livres 15 sols de rente hypothécaire annuelle et perpétuelle vendue et créée et constituée par ledit Peccatte en son nom et soy faisant fort d’elle et par Pierre Chesneau Me coustelier à Me Nicolas Chardonnet moyennant la somme de 300 livres de principal payée contant et de la contrelette consentie par ledit Peccatte esdits nom audit Chesneau portant promesse d’indemnité de ladite rente dans un an prochain passé par Coueffe notaire royal Angers le 20 septembre dernier qu’elle a dit bien entendre et l’avoir agréable et ratiffie …

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