Mathurin Lemarié, marchand de draps de soie, n’est pas dans la soie mais dans la m…, Angers 1592

La maison a certes des privaises (toilettes de l’époque) mais elles sont pleines et cassées, de sorte que la cave en est envahie !

Donc, ce jour, je vous emmêne loin de la fortune de feu Jean Ayrault président.
Pour vidanger il faut 4 hommes sur plusieurs jours !!
J’habite une ville qui ne connaît plus les fosses sceptiques, mais quand j’étais jeune, j’ai connu le camion du vidangeur, sur un lieu de vacances, en plein été, puisque c’est la saison où les touristes rencontrent le problème.
De nos jours il existe encore 5 adresses en Loire-Atlantique, mais les camions sont plus modernes, les fosses aussi.

Cet acte aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E1 – Voici ma retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 20 juin 1592 avant midy en la cour du roy notre sière Angers endroit par devant nous François Revers notaire d’icelle personnellement establyz honneste homme Nicollas Giffart Me orfèvre demeurant Angers paroisse saint Pierre d’une part et chacuns de Guillaume Guillois, Urban Bazouin, Mathurin Peloquin, et Mathurin Hodbin tous gagne deniers demeurants au faulx bourg de Bressigné en ceste ville d’Angers soubzmettant et mesme lesdits gaigne deniers chacun d’eulx seul et pour le tout sans division etc confessent savoir est lesdits gaigne deniers avoir promis et promettent curer et nettoyer bien et deument et oster toutes les immondicités des privaises

Selon le Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500) http://www.atilf.fr/dmf
PRIVAISE, subst. fém. Au plur. « Lieux d’aisances »

du logis ou de présent demeure Mathurin Lemarié marchand de draps de soie rue de saint Aubin de ceste dite ville d’Angers et porter toutes lesdites immondices en lieu requis et sans incommoder ne offenser personne et commenceront à ce faire lors que ledit Lemaryé deslogea dudit logis et continueront de jour à autre sans discontinuer
et ce fait netteront parements et osteront les immondicités estant en la cave dudit logis et qui y sont tombés à cause que la bote desdites privaises est rompue
et est fait le présent marché pour et moyennant la somme de 15 escuz sol sur laquelle somme ledit Giffart a présentement et à veue de nous payé et avancé auxdits gaigne deniers la somme de 4 escuz et ung quart d’escu pour le vin de marché qui sont 4 escuz 15 sols dont etc et le reste montant 11 escuz poyable par ledit Giffart auxdits gaigne deniers la besoigne faite sans que lesdits gaigne deniers soient tenus oster l’eu déversée si aulcunes y a
tout ce que dessus stipulé et accepté par lesdites parties respectivement à ce tenir etc dommages etc obligent etc mesme lesdits gaigne deniers etux et chacun d’eulx seul et pour le tout sans division etc à prendre etc et le corps desdits gaigne deniers à tenir prinson comme pour les deniers et affaires du roy notre sire par deffault de faire et accomplir du contenu en ces présentes renonçant et par especial au bénéfice de division d’ordre etc foy jugement et condemnation
fait et passé à notre tabler Angers en présence de honneste homme Jehan Gault Me cordonnier demeurant Angers et Michel Trouillet et Anthoine Joubert praticiens demeurant Angers tesmoins
lesdits gaigne deniers ont dit ne savoir signer

    et voyez la splendide du cordonnier GAULT !!!

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog

Contrat de 3 gagne-deniers pour curer des privés, Angers, 1601

Les gagne-deniers ne faisaient pas que de petites courses et autres petites commissions, ils enlevaient aussi les grosses commissions !
J’ai beaucoup aimé cet acte notarié, car il atteste qu’un notaire traitait aussi des marchés bien infimes à nos yeux, mais aussi pour le joli mot de PRIVAISE qui désigne dans cet acte les toilettes.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E70 – Voici la retranscription de l’acte : Le 22 juin 1601 en la court du roy notre sire Angers endroit par davant nous Michel Lory notaire d’icelle personnellement establys Zacary Mareau Me apothicaire demeurant en ceste ville paroisse de la Trinité d’une part
• et Mathurin Peloquin et Daniel Moitreuil et Pierre Morisseau gaigne deniers demeurant ès faulbourgs de Bresigné d’autre part
• soubzmectant etc confessent avoir faict et font entre eulx le marché que s’ensuit c’est à savoir que lesdits gaignes deniers ont promis sont et demeurent tenuz curez et nettoyer bien et duement de tous immondices les garderobes ou privaise

Privé. s. m. Retrait, aisance, l’endroit de la maison destiné à décharger le ventre. (Dict. de l’Académie française, 1st Edition, 1694)

dépendant d’une maison appartenant à la mère dudit Mareau sise près la porte Chapelière en laquelle est à présent (blanc) forbisseur et ce dedans d’huy en 8 jours prochainement venant et en porter les immondices en lieu quelles ne puissent incommoder,

    à Nantes, il faut attendre Mellier maire de Nantes début 18e siècle pour les faire mettre hors des murailles de la ville. Ceci dit les murailles de la ville n’englobaient pas la plupart des faubourgs !

• et lesquelz gaignes deniers commenceront à curer lesdites privaisez dedans lundi prochain et et y depuis qu’il y auroit immondices seront tenuz continuer jusque à ce qu’elles soient bien et duement nettoyées sans pouvoir vacquer à aultre besoigne de nettoyage de garderobes
• et est ce fait pour en payer et bailler par ledit Mareau auxdits gagne deniers la somme de 3 escuz deux tiers vallant 11 livres tz sur laquelle somme de 11 livres tz ledit Mareau a présentement advancé auxdits Peloquin Moitreuil et Maurisseau la somme de 20 solz tz et le reste montant 10 livres tz ledit Mareau a promis payer lors que lesdites privaisez seront bien et deument nettoyées
• tout ce que a esté stipulé et accepté par les parties respectivement et à quoy tenir dommaiges etc obligent respectivement etc mesme lesdits Peloquin Morteul et Moriceau chacun d’eux seul et pour le tout sans division etc à prendre etc mesme le corps desdits gaigne deniers à tenir prinson comme pour deniers royaux par faulte d’accomplir le contenu cy dessus

    non mais, on travaille correctement ou pas !!!

etc renonczant etc et par especial au bénéfice de division d’ordre discussion etc foy jugement condemnation etc fait et passé à notre tabler Angers en présence de Aulbin Bienvenu et François Rouault praticiens audit Angers tesmoings
• lesdits gaigne deniers ont dict ne scavoir signer.

    Tout ceci me rappelle ma jeunesse. Nous allions à Montean-sur-Loire chez une grand’tante. Pour aller aux toilettes, on laissait aux enfants les aisances de la cour : une petite pièce munies d’un ban de bois percé de plusieurs trous, dont un ban plus petit muni d’un plus petit trou. Le papier journal pour se nettoyer ! Je n’ai jamais bien compris pourquoi autant de trous ? Etait-ce pour venir en famille ?

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog. Tout commentaire ou copie partielle de cet article sur autre blog ou forum ou site va à l’encontre du projet européen

Les cochons de ville autrefois : du recyclage des déchets verts à l’orgue à cochons de Louis XI

J’ai eu la chance il y a 15 ans de faire partie de l’équipe bénévole qui retranscrit les délibérations municipales de la ville de Nantes au 16e siècle. C’est ainsi que j’ai pris conscience de l’hygiène des villes d’alors, en particulier de l’égoût à ciel ouvert que constituaient les ruelles, et des cochons qui allaient et venaient librement. J’avais écrit un article sur ce sujet énorme, et je vous le publierai bientôt, c’est promis.
Ainsi, une grande partie des ordures, étaient recylées directement ! Ne parlons pas de l’hygiène, inexistante !

Plus récemment, toujours à Nantes, j’ai travaillé à la Biscuiterie Nantaise, alors située place François II, c’est à dire proche du centre ville. Une ancienne ouvrière me racontait avoir connu les cochons place François II, rassurez vous, ils n’étaient pas sur la place François II elle-même, mais sur la terrasse de l’usine. En effet, toute industrie alimentaire, autrefois comme de nos jours, génère des déchets exactement comme toute ménagère. Donc, je peux témoigner que jusqu’au milieu du 20e siècle, les cochons étaient encore sur place…

Ceci dit, les cochons, largement utilisés dans ce but de recyclage par nos ancêtres, ne sont pas silencieux. Et c’est ainsi que j’en arrive à l’anecdote célèbre de Louis XI et les cochons. Cette anecdote suit le jour maudit de la fête de la musique, diversement apprécié en France : béni par certains, mais maudit et très mal supporté par d’autres, dont je suis, car peu amateur de décibels imposés. Les plus chanceux ayant la possibilité de choisir alors une éclipe sur la côte… pour fuir le bruit…

Or donc, Louis XI aimait prendre des bains de foule à travers la France, et vint souvent en Anjou, pas uniquement à Béhuard, comme nous l’avons vu hier. Il aimait alors passer par dessus ses conseillers, et questionner directement les notables du coin, histoire d’entendre par lui-même les problèmes des Français… Sur ce point, il ne lui a manqué que la télévision pour être plus moderne que les autres….

Louis XI, importuné du grognenement des cochons qu’il rencontra dans une de ses promenades angevines, en allant de Beaugé ou de Segré à Pouancé, dit, en plaisantant, à l’abbé Baigné qui le suivait ordinairement « faites-nous donc quelque belle harmonie avec le chant de ces oiseaux ». L’abbé n’y manqua par, et fit construire une vaste machine imitant l’orgue, mais élevée sur une base divisée par cases, dans lequelles il logea des porcs, depuis le cochon de lait jusqu’au pourceau. Des pointes de fer placées sur ces cases et mises en jeu par un clavier, piquant ces animaux, leur arrachaient des cris qui ressemblaient pas mal aux sons de l’orgue de cette époque reculée. Cette singulière invention amusa le roi, et, par conséquent la cour. Louis XI récompensa l’abbé, mais l’histoire nous dit que l’ayant rencontré peu après, il lui redemanda l’abbaye qu’il lui avait donnée depuis quelques années ; l’abbé Baigné répondit au roi qu’ayant été quarante ans à apprendre les deux premières lettres de l’alphabet A, B, il le priait de lui accorder autant de temps pour apprendre les deux suivantes C, D (abbé cédez). Le roi, enchanté, lui accorda sa demande et y ajouta d’autres bénéfices. (selon J. Bouchet, Annales d’Aquitaine, t77). »

Ouf, la fête de la musique 2008 m’a épargnée car la municipalité avait opté pour d’autres quartiers cette année… Pour celle de 2009, mon plan sera soit l’hôtel extra-muros, soit la voiture au vert, soit le casque anti-bruit… Les municipalités devraient distribuer gratuitement des casques antidécibels… ou un hébergement au vert…

Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

PS : voici la vache tueuse (relevée par Marie), rue Toussaint à Angers, 1650 :