Le curateur s’oppose au mariage de sa pupille, Saint-Lézin (49), 1736

Perrine Bouin, 22 ans, donc mineure, séduite par Brouillet, tente de résister au refus de son curateur à leur mariage… : 40 pages de comparutions, avant une triste fin...

Voici les 10 premières (AD49-1B336) : au début on est optimiste, puis le curateur démonte tout et démontre que Perrine a été séduite et tient à Brouillet :

Voici la retranscription : Le 3 juin 1736, devant nous Louis René Cyprien Chotard seigneur des Tombes conseiller du roy lieutenant particulier en la sénéchaussée d’Anjou conservateur des privilèges royaux de l’université dudit lieu a comparu le procureur du roy demandeur aux fins de remontrance du 28 mai dernier, répondue de notre ordonnance du même jour scellée au bureau de cette ville le 1er juin présent mois par par Delaage et de l’exploit d’assignation donnée en conséquence par Bossoreille sergent royal le 6 dudit mois contrôlé à Beaupreau le 9 suivant par Froger, lequel a dit que Perrine Boüin fille âgée de 22 ans lui a représenté qu’ayant été recherchée en mariage par René Brouillet marchand son cousin au 4e degré, elle avait agréé les recherches, que Vincent Denechau marchand son curateur aux causes et tous les parents les auraient également agréés, que même ledit Denechau son curateur trouvant le parti sortable et convenable aurait fait plusieurs démarches vers les parents dudit Brouillet pour parvenir au mariage mais que peu de temps après il est arrivé que ledit Denechau et quelques parents de ladite Brouin, sollicités de la marier avc un certain particulier ont changé de sentiment et refusé de donner leur consentement à l’accomplissement des promesses de mariage faites entre elle et ledit Brouillet, duquel elle est parente et qu’elle connaît lui être un parti convenable et même avantageux, tant parce qu’ils sont parents que parce que ledit Brouillet l’égalisera en biens, qu’il est un bon marchand, faisant bien son commerce et en état d’augmenter sa fortune ce qu’elle a représenté audit Denechau son curateur, lequel n’en peut ignorer puisqu’il est également parent dudit Brouillet qu’il n’y a que ledit Denechau et quelques parents maternels de ladite Bouin qui refusent de donner leur consentement au mariage proposé entre elle et ledit Brouillet ayant formé le dessein par sollicitations de la marier avec un autre non convenable mais que tous ses parents paternels et une parents des parents maternels continuent d’agréer les recherches dudit Brouillet, et sont prêts de donner leur consentement audit mariage.
Qu’au moyen du refus dudit Denechau son curateur aux causes, elle se trouve hors d’état par elle-même de parvenir à un établissement qu’elle désire par l’accomplissement des promesses de mariage faites avec ledit Brouillet pourquoi elle a eu recours à lui procureur du roy et la requête de l’aide de son ministère pour parvenir à l’établissement par elle désiré, que sur cette représentation faite à lui procureur du roy et voyant qu’il s’agit de l’établissement d’une fille âgée de 22 ans, et que suivant le récit qu’elle lui a fait, ledit Brouillet est pour elle un parti sortable et lors avantageux, et que le plus saine partie de ses parents désire l’accomplissement de ce mariage, elle nous a donné sa remontrance qui a été répondue de notre ordonnance cy-dessus datée en conséquence de laquelle ordonnance, il a fait assigner 8 parents tant paternels que maternels de ladite Bouin pour donner leur avis sur la destitution par elle requise dudit Denechau de sa tutelle être levée et nommé et institué un curateur au lieu et place dudit Denechau, ensemble donner leur avais sur le consentement du mariage proposé entre ladite Brouin et ledit Brouillet, et voir dire qu’en cas que lesdits parents soient d’avis du mariage, il sera permis auxdits Brouillet et Bouin de le contracteur en obtenant la dispense nécessaire et obtenant les autres formalités précisées par les ordonnances, qu’il a pareillement fait assigner à ce jour ledit Denechau pour voir dire qu’il n’aura moyen d’empêcher les conclusions cy-dessus par lui prises aussi comparus maître François Gouin avocat procureur de Pierre Provost marchand cousin issu de germain de ladite Bouin, Nicolas Morineau marchand tissier cousin germain de ladite Bouin, Martin Provost maréchal cousin remué de germain de ladite Bouin, Jacques Daviau marchand tissier cousin au 4e degré tant du côté paternel que maternel de ladite Bouin, Adrien Chotard maréchal aussi cousin tant du côté paternel que maternel de ladite Brouin, René Blanchard marchand menuisier cousin au 3e degré de ladite Brouin, Sébastien Blanchard aussi marchand meunier cousin au 3e degré de ladite Bouin, Michel Durand, grand oncle maternel de ladite Bouin, et fondé de sa procuration passée devant Hazard notaire royal à Cholet, le 11 de ce mois, contrôlé à Cholet le même jour par Eslin, lesdits Pierre Provost, Jacques Daviau, Adrien Chetou, René Blanchard, Sébastien Blanchard et Michel Durand présents en leurs personnes, lequel a dit qu’ayant eu connaissance des recherches faites par ledit Brouillet de ladite Brouin, et que même ledit Denechau son curateur aux causes avait proposé le mariage, ils ont agréé les recherches dudit Brouillet comme étant pour elle un parti sortable et convenable le connaissant pour un bon marchand faisant bien ses affaires et son commerce qu’ainsi le parti est pour elle avantageux et convient d’autant plus que l’un et l’autre sont parents, et que ledit Brouillet égalisera ladite Bouin en bien pourquoi ils sont d’avis que le mariage proposé entre ladite Bouin et ledit Brouillet soit contracté et pour tel être au moyen du refus mal fondé de la part dudit Denechaude donner son consentement audit mariage sont pareillement d’avis que ledit Denechau soit destitué de sa tutelle, et qu’il soit institué un autre curateur en son lieu et place, et de fait Gouin pour ledit Pierre Provst, Morineau, Martin Provost, Adrien Chetou, René Blanchard, Sébastien Blanchard et Michel Durant a déclaré qu’ils sont d’avis que ledit Jacques Daviau soit institué curateur aux causes et a personne et biens de ladite Bouin, quant à la discussion de ses droits réels au lieu et place dudit Denechau, lequel Daviau, présent en personne comme dit est a dit que pour l’amitié qu’il porte à ladite Bouin sa cousine, il accepte la curatelle de la personne de ladite Bouin, ledit Daviau a déclaré ne savoir signer (signé de tous les autres).

A comparu me André Gontard avocat procureur de Vincent Denechau présent curateur aux causes de ladite Bouin mineure, demeurant à St Lézin, lequel a dit que les démarches pratiquées par le sieur Brouillet et ses parents pour faire contracter à ladite Bouin un mariage désavantageux sont contre toutes les règles

  • on a surpris la religion de Mr le procureur du roi dans le faux exposé qu’on lui a fait de la conduite dudit Denechau
  • l’huissier qui a donné l’assignation ne l’a donnée qu’à un des parents pour la distribuer aux autres après les avoir sollicités et n’a donné aucune assignation audit Denechau. Il n’a lu les mouvements qu’on se donnait que le vendredi au soir par l’écrit publié et la preuve qu’on n’a donné aucune assignation audit Denechau se manifeste par le rapport antidaté dont ont vient de prendre communication dans lequel on ne raporte point le domicile dudit Denechau ce qui emporte nullité de l’assignation à son égard
  • au fond ledit Denechau ayant été institué curateur aux causes par l’avis unanime des parents de la mineure par sentence de Chemillé du 8 avril 1734 contrôlé et insinué le 22 avril, il ne peut être destitué sans cause légitime et sans l’avis des plus proches parents tant paternels que maternels de ladite mineure or ici, non seulement il n’y a aucune cause légitime mais même on a fait appeler aucun des plus proches parents de ladite mineure tels que les oncles cousins germains et autres parents du 2 ou 3° degré, on s’est au contraire appliqué à convoquer les parents les plus éloignés parmi lesquels on a choisi les proches parents dudit sieur Brouillet qui recherche ladite mineure en mariage et qui tous ont été pratiqués par cabale, cependant suivant toutes les lois et l’usage lorsqu’il s’agit du mariage d’une mineure ce sont les plus proches parents des deux côtés que l’on consulte préabablement aux plus éloignés ; il est même déffendu par l’article 43 de l’ordonnance de Blois aux tuteurs de consentir au mariage de leurs mineurs sans le consentement des plus proches parents d’iceux sous peine de punition exemplaire, disposition tellement suivie dans l’usage que dans les sentences de curatelle on a coutume d’insérer les mêmes défenses, cela posé il ne s’agit que de faire voir que les parents assignés à la requête de Mr le procureur du roy sont très éloignés et qu’ainsi on ne doit avoir aucun égard à leur suffrage et qu’il y en a un grand nombre de plus proches qu’on a négligé de conséquence qui doivent être constamment appelés préalablement et à l’inclusion de tous les parents cy-dessus. Ainsi Pierre Provost le premier des parents cy-dessus ne l’est qu’au 3e degré de la mineure, pendant qu’il y a son père et qu’il y a d’autres parents qui seront cy-après nommés qui sont d’un demi degré plus proches. Nicolas Morineau qu’on a établi présent par erreur ou autrement n’est point présent ici et n’a donné aucune procuration, et d’ailleurs doit être exclus n’étant parent qu’au 3e degré et y en ayant de plus proches. Martin Provost n’est point ici présent et il ne paraît aucune procuration spéciale de lui ce qui est nécessaire dans une affaire de cette importance, et de plus il doit être aussi exclus n’étant parent qu’au 3e degré. Jacques Daviau ne peut être admis pour donner son suffrage n’étant parent qu’au 4e degré. Ces 4 parents paternels doivent donc être exclus puisqu’il y en a deplus proches qui seront nommés cy-après, quant aux parents maternels cy-dessus appelés, ils doivent être également exclus puisqu’ils ne sont tous parents qu’au 4e et 5e degré pendant que l’on n’a affecté de ne pas appeler les oncles maternels de la mineur plus en état de juger qu’ils sont les véritables intérêts, en effet pour entrer dans les détails Adrien Chetou n’est parent que du 4 au 5e, René et Sébastien Blanchard ne sont parents qu’au 4e degré et d’ailleurs très parents étant cousins germains de la mère dudit Brouillet qui recherche la mineure en mariage. Laurent Chetou n’est parent que du 4 au 5e d’ailleurs ne comparaît pas et n’a poit donné de procuration. Michel Durand partie postiche qu’on a établi dans le présent procès verbal et qui est un des moteurs de ce mariage qu’on dit être grand oncle de la mineure est l’ayeul de celui qui la recherche en mariage, ainsi l’on voit qu’il n’y a pas un des parents cy-dessus appelés dont le suffrage doit être admis, qu’au contraire on a dû seulement appelée les plus proches parents tant paternels que maternels qui sont au nombre de 12 sans compter le beau-frère de ladite mineure, dont le suffrage de devrait pas être négligé. Tels sont Joseph Chitou marchand tisserand à St Lézin, … Bouin marchand à St Maquaire, qui porte le même nom que le père de la mineure, et un autre du nom de Bouin marchand audit lieu, Jean Denechau marchand tisserand à St Lezin, Jacques Rousseau meunier à St Lambert, tous lesquels parents paternels sont parents du 2 au 3e degré de ladite mineure et sont par conséquent préférables aux parents au 3e et 4e degré, quant aux parents maternels qu’on a du assigner à l’exclusion de tous autres, il y a François Gelusseau notaire royal à Jaslais, Michel Gelusseau marchand tanneur audit lieu, Jean Gelusseau marchand cirier à Chalonnes tous trois oncles maternels de ladite mineure, et Michel Cebron marchand tanneur à Jallais grand oncle de ladite minaure ; il y a encore Vincent Gaudré maréchal à Jallais, et Jacques Menuau marchand taillandier à St Quentin tous deux oncles de ladite mineure à cause de leurs femmes.

    Par ces raisons, il est évident que l’on ne peut ny ne doit statuer sur la destitution dudit Denechau qu’on peut considérer comme injuriente, on ne doit non plus avoir aucun égard au suffrage des parents cy-dessus appelés pour donner leur agrément audit mariage car il n’y en eut jamais un plus dispos et moins convenable
    la parenté qu’il y a entre ladite Bouin et celui qui la recherche
    ledit Brouillet étant veuf avec un enfant de son premier mariage
    étant d’une fortune très inférieure à celle de ladite Bouin et sans aucune profession, toutes ces considérations sont plus que suffisantes pour s’opposer audit mariage et ledit Denechau ne peut y consentir sans trahir la confiance que les parents ont eu en le nommant. Si l’on adjoint à ces raisons déjà fors puissantes qu’il y a eu un rapt de séduction de ladite mineure de la part dudit Brouillet qui l’a engagé à se retirer de sa maison et du sein de sa famille pour la mener au château du Cazeau maison forte ou ledit Brouillet et Durand son grand-père fermier dudit Cazeau ont seuls l’entrée libre pour raison duquel rapt l’on proteste de se pourvoir. Il y a plus car ladite mineure a emporté avec elle en ladite maison du Cazeau la somme de 4 000 livres ou environ d’argent monnoyé à elle appartenant, lequel argent est en grand danger par les personnes qui aprochent ladite mineure, à quoy il est de l’intérêt de Mr le procureur du roy et du public de s’opposer aussi bien que de la fonction dudit Denechau.

    Par ces raisons, il conclu à ce que l’assignation qu’on dit lui avoir donné soit déclaré nulle, en tout cas à être renvoyé des fins de la remontrance de Mr le procureur du roi et ses parents cy-dessus qui l’ont sollicitée condamnés aux dépends et ou Mr le procureur du roy persisterait dans les fins de sa remontrance qu’il plaise dire que 4 des plus proches parents tant paternels que maternels cy-dessus dénommés de chacun côté soient assignés pour donner leur avis et ce sans avoir égard aux suffrages de ceux qui ont été assignés à la requête du Mr le procureur du roy, et que cependant par provision il soit condamné que ladite Bouin se retirera ou sera mise dans une communauté de cette ville dans laquelle il sera permis audit Denechau et à ses plus proches parents de la voir pour l’aider de leurs conseils.

    Suivent des pages et des pages de comparutions…, dont je vous fais grâce, et voici la fin de l’acte :

    Sur quoi nous avons donné acte desdites comparutions, dires, réquisitions, et oppositions cy-dessus, en conséquence ordonnons conformément aux conclusions du procureur du roi que ladite Bouin mineure sera tenue de se retirer dans une communauté religieuse de cette ville qui lui sera indiquée par le procureur du roi, jusqu’à ce que ait été ordonné définitivement…

    J’ignore ce qu’il advint par la suite de Perrine Bouin et de Brouillet… Une chose est certaine, même à 22 ans, on ne pouvait pas faire ce qu’on voulait… C’était seulement après 25 ans qu’on pouvait passer outre… alors que la vie était si courte…

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    Dispense de consanguinité, Méral, 1769 : Pierre Brielle et Jeanne Guinoiseau

    Archives du Maine-et-Loire, série G

    La 4 janvier 1769, en vertu de la commission à nous adressée par monsieur le vicaire général de monseigneur l’évêque d’Angers, en datte du 23 décembre dernier, signée Houdbinne vicaire général, et plus bas Ch. Seuret, pour informer de l’empeschement qui se trouve au mariage qu’ont dessein de contracter Pierre Brielle et Jeanne Guinoiseau tous deux de la paroisse de Méral, des raisons qu’ils ont de demander dispense dudit empeschement, de l’âge desdites parties et du bien qu’elles peuvent avoir, ont comparu devant nous commissaire soussigné lesdites parties, scavoir ledit Pierre Brielle, âgé de 35 ans, et ladite Jeanne Guinoiseau, âgée de 31 ans, accompagnés de Pierre Brielle père dudit Pierre Brielle, père dudit Pierre Brielle, de Michel Boisramé son beau-frère, de Jacques Guinoiseau père de ladite Jeanne Guinoiseau, de Louis Chartier son oncle par alliance, tous demeurans dans la paroisse dudit Méral, qui ont dit bien connaître lesdites parties, et serment pris séparément des uns et des autres de nous déclarer la vérité sur les faits dont ils seront enquis, sur le rapport qu’ils nous ont fait et les éclaircissements qu’ils nous ont donné nous avons dressé l’arbre généalogique qui suit :

    de René Guinoiseau sont issus :

  • Jacques Guinoiseau – 1er degré – Anne Guinoiseau femme de René Brielle
  • Jacques Guinoiseau – 2e degré – Pierre Brielle
  • Jacques Guinoiseau – 3e degré – Pierre Brielle qui veut épouse Jeanne Guinoiseau
  • Jeanne Guinoiseau du mariage de laquelle il s’agit – 4e degré

    Nous avons trouvé qu’il y a un empeschement de consanguinité du quatrième au troisième degré entre ladite Jeanne Guinoiseau et ledit Pierre Brielle, ou ce qui revient au mesme du troisiesme au quatrième degré entre ledit Pierre Brielle et ladite Jeanne Guinoiseau. (on n’est jamais trop précis !!!)
    A l’égard des causes ou raisons qu’ils ont de demander la dispense dudit empeschement, ils nous ont déclaré que ladite Jeanne Guinoiseau est fille et âgée de 31 ans, sans avoir trouvé d’autre parti qui luy convient, ayant été seulement demandée il y a environ deux ans par un parent proche et qui ne luy convenait point, et que ledit Pierre Brielle, quoique son parent, luy convient à tous égards, que quoique ladite paroisse de Méral soit étendue, cependant les habitans sont presque tous parents ou alliés par les mariages qui de tous temps se sont contractés entre parents, nos seigneurs évêques ayant octroyé bien souvent de pareilles dispenses que les habitants de cette paroisse sont bien unis ensemble, qu’ils ont peine à parer à des mariages étrangers, que ce peuple naturellement timide, éloigné de ville, et habitans les bords de la Bretagne, et n’aime pas le caractère Breton, ne peut se résoudre à contracter mariage avec les Bretons, ce fait est constant, qu’il est rare de voir les habitans de cette paroisse contracter mariage avec leurs voisins, que si ladite Guinoiseau ne se marie avec ledit Brielle il y a lieu de craindre qu’elle ne trouvera point un party qui luy convienne si bien que celui qui se présente et ladite Guinoiseau demeurant avec une belle-mère depuis des années, elle désire recevoir un établissement qu’enfin ledit Brielle ayant demandé en mariage une fille qu’il n’a pu avoir et était âgé de 35 ans il désire épouse celle qui se présente.
    Et comme leur bien ne monte qu’à la somme de 700 livres en fond meubles marchandise et inventaire, ledit Brielle n’ayant aucun bien de fond, mais seulement 500 livres en meubles, bestiaux et marchandises, demeurant chez son père métayer et ayant 4 enfants et qui a déclaré appartenir du côté de leur mère déffunte en meubles, bestiaux et marchandises, 2 000 livres, en conséquence 500 L chacun, mais n’ayant point fait d’inventaire cette portion pourrait bien dans peu diminuer eu égard au malheur des temps, et ladite Guinoiseau n’ayant que 90 livres d’inventaire, comme il parait par l’acte qui en a été fait par devant notaire et qu’on nous a communiqué, et en bien de fond 14 livres sur lesquelles sont à diminuer les deniers royaux et les réparations ordinaires, lequelles parties n’ont point d’autre recours pour se soutenir dans un temps où les taux et autres impositions sont si onéreux, que la force de leur bras, et en conséquence ils se trouvent hors d’état d’envoyer en cour de Romme pour obtenir la dispense dudit empeschement ce qui nous a été certifié par lesdits témoins cy-dessus dénommés et qui ont déclaré ne scavoir signer fors ledit Jacques Guinoiseau père de ladite Jeanne Guinoiseau, fait dans la salle du presbitaire dudit Méral Signé : Guinoiseau

    Merveilleux n’est-ce pas ! Il semblerait que Mr le curé de Méral en rajoute un peu sur les Bretons…
    Car, je connais bien Méral pour l’avoir dépouillé autrefois. Tous les Mératais (il paraît qu’ils ne sont pas Méralais) n’ont pas eu une telle horreur des Bretons, la preuve, je descends des Goussé, des Marchandye, des Maugars, des Hunault, qui ont bougé, contrairement à ce raconte le curé de Méral en 1769. Il est vrai que c’était 150 ans avant !

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    Dispense d’affinité, Méral (Mayenne) 1757 : Thomas Leconte et Jeanne Marcillé

    Archives Départementales du Maine-et-Loire, série G

    Il y a affinité, lorqu’un veuf (ou une veuve) avait son conjoint décédé apparenté à cellle (celui) qu’il recherche en mariage. On a toujours des détails intéressants, même s’il faut tempérer :

  • ils disent toujours qu’ils ne savaient pas, en effet, difficile d’imaginer de se fréquenter en commençant par établir un arbre généalogique !!! Par la suite, il y avait toujours une langue assez bien pendue pour dénicher la chose et en parler au curé, si ce n’est lui qui vérifiait pour que le mariage ne soit pas annulé par la suite pour non conformité.
  • leur généalogie est orale, et peut être erronée, car de vous à moi, quand on n’a pas connu ses grands parents, ce qui est le cas le plus fréquent, difficile de s’en souvenir…
  • pour ne pas payer, ils peuvent en dissimuler un peu, même sous serment… enfin cela donne un ordre de grandeur. Dans le cas ci-dessous, pauvres (enfin très peu aisés). S’ils sont aisés, ils ont de quoi payer les frais en Cour de Rome, et ils ont droit (façon de parler) à la procédure lourde. Pour les pauvres, on règle généralement le problème au niveau de l’évêché, enfin, surtout dans un cas aussi léger que celui qui suit.
  • le cas ci-dessous évoque un enfant difficile, qui nous laisse sur notre faim… Serait-ce un enfant handicapé ?
  • enfin, ils disent toujours qu’on ne peut plus faire marche arrière car l’honneur de la fille est perdu. C’est un argument qui marche bien… donc on l’avance toujours, qu’on ait ou non couché ensemble. Ce qui signifie qu’on ne peut en tirer aucune conclusion hâtive.
  • Le 25 juillet 1757, en vertu de la commission à nous adressée par Monsieur le vicaire général de Monseigneur l’évêque d’Angers an date du 8 du présent mois de juillet 1757, signé Lepresle, vicaire général, et plus bas, par Monseigneur Jubeau secrétaire, pour informer de l’empêchement qui se trouve au mariage qu’on dessein de contracter Thomas Leconte maçon de la paroisse de Méral, veuf de Renée Fournier, et Jeanne Marcillé, fille de la même paroisse, des raisons qu’ils ont de demander dispense dudit empêchement, de l’âge desdites parties, et du bien précisément qu’elles peuvent avoir, ont comparu devant nous commissaire soussigné, lesdites parties, scavoir ledit Thomas Leconte âgé de 35 ans et ladite Jeanne Marcillé âgée de 31 ans, accompagnés de Renée Theard veufve de René Marcillé, mère de ladite Jeanne Marcillé, demeurante à Chantepie paroisse de Méral, de François Sommier son cousin demeurant paroisse de Saint Poix, de Jacquine Fournier veufve René Buhigné demeurante aux Planches à Méral, de Jeanne Fournier femme de Jean Monternau, closier à la Touche des Landes aussi en Méral. Lesdites deux Fournier sœurs de deffunte Renée Fournier, première femme dudit Thomas Leconte, tous lesquels thémoins ont dit bien connoître lesdites parties, et serment pris séparément des uns et des autres, de nous déclarer la vérité sur les faits dont ils seront enquis, sur le raport qu’ils nous ont fait, et les éclaircissements qu’ils nous ont donné, nous avons dressé l’arbre généalogique qui suit :

    de Jean Pierre et Renée Gaudin, souche commune, sont issus : (dur dur de faire un tableau au forma WIKI dans un blog, aussi visualisez bien gauche-droite les deux lignées)

  • Jean Pierre | 1er degré | Renée Pierre mariée à René Theard
  • Jean Pierre | 2e degré | René Theard
  • Renée Pierre mariée à Jean Fournier | 3e degré | Renée Theard mariée à René Marcillé
  • Renée Fournier première femme de Thomas Leconte | 4e degré | Jeanne Marcillé qui veut épouser Thomas Leconte
  • Ainsi, nous avons trouvé qu’il y a un empêchement d’affinité du 1 au 4e degré entre ledit Thomas Leconte et ladite Jeanne Marcillé ;
    à l’égard des causes ou raisons qu’ils ont pour demander la dispense dudit empêchement, ils nous ont déclaré que ladite Jeanne Marcillé est fille et âgée de 31 ans, sans avoir trouvé d’autre parti qui luy convient,
    que ledit Thomas Leconte est veuf et chargé d’un enfant difficile à élever et qu’étant tous les jours absent de sa maison à cause de son métier, il a besoin d’épouser ladite Jeanne Marcillé pour l’éducation et la garde de son enfant et pour le bien de ses affaires, que depuis environ 5 mois ils se sont recherchés de bonne foy pour le mariage sans qu’ils seussent (attention, participe du verbe savoir) qu’il y eut affinité entre eux,
    et que depuis quelques mois ils se sont vus avec tant de familiarité que le public en a été scandalisé au point même que s’ils ne se marient ensemble, il y a lieu de craindre et grande apparence que ladite Jeanne Marcillé ne trouvera point à qui se marier.
    Et comme leur bien ne monte qu’à la somme d’environ 200 livres en meubles, hardes ou marchandises, sans aucun bien de fond, ledit Leconte n’ayant qu’environ 50 écus (soit 150 livres) en meubles et hardes et ladite Marcillé n’ayant guère qu’environ 50 livres, ils se trouvent hors d’état d’envoyer en Cour de Rome, pour obtenir la dispense dudit empêchement,
    ce qui nous a été certifié véritable par lesdits thémoins dénommés de l’autre part qui nous ont déclaré ne scavoir signer fors ledit Leconte et ledit Sommier de ce ensuis,
    fait et dressé ledit procès verbal lesdits jour et an 25 juillet 1757 en notre maison presbitérale de Saint Poix. Signé F. Sommier, Thomas Leconte, Jarry curé de St Poix

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    Les sommations respectueuses : pour avoir de ses parents l’autorisation de se marier, même après la majorité (25 ans)

    Pour se marier, il faut l’accord parental, même après la majorité, laquelle est pourtant à 25 ans, ce qui est beaucoup, d’autant que la vie est courte jusqu’en 1880. Pour mémoire, en 1880, l’’espérance de vie à la naissance, autrement dit l’âge moyen au décès, était de 40,8 ans pour les hommes, 46,4 pour les femmes.
    S’il faut leur accord, c’est que leur présence et don en avancement d’hoir est obligatoire au contrat de mariage.
    On essuie parfois un refus. Eh oui, cela arrivait ! Vous avez l’un de ces refus dans la famille des Lemanceau de Champteussé sur Baconne. La mère (Françoise Loyseau veuve de Pierre Manceau) ne fit donc aucun contrat de mariage et aucun avancement d’hoir à sa fille, Catherine Lemanceau, 27 ans, qui veut épouser Jacques Lemesle ! Mais, après les 3 sommations respectueuses obligatoires et ses 3 refus devant notaire, elle fait un autre acte devant notaire, autorisant le curé à marier sa fille, mais précisant bien qu’elle n’entend faire aucun avancement de droit successif.

    En cas de refus (3 fois, ce nombre est obligatoire, c’est pour cela qu’on a toujours le pluriel à Sommations respectueuses) cela n’est pas rien, même majeur. Il faut aller voir tous les proches, pour tenter de les mettre de son côté, et de faire pression si possible sur le parent peu coopératif. Si le refus est toujours là, il faut demander au notaire d’assister physiquement à la demande d’autorisation, en la demeure du parent refusant, en compagnie de tous les parents favorables qui tentent encore de convaincre le refusant. Puis le notaire devait enregistrer le refus dans un acte, signé de deux témoins.

    Voici le mécanisme, expliqué par l’Encyclopédie de Diderot :

    SOMMATION RESPECTUEUSE : acte fait par deux notaires, ou par un notaire en présence de deux témoins, par lequel, au nom d’un enfant, ils requierent ses père & mère, ou l’un d’eux, de consentir au mariage de cet enfant. On appelle ces sortes de sommations, respectueuses, parce qu’elles doivent être faites avec décence, & sans appareil de justice ; c’est pourquoi l’on y emploie le ministere des notaires, & non celui des huissiers.
    Ces sommations ne peuvent être faites qu’en vertu d’une permission du juge, laquelle s’accorde sur requête, l’objet de ces sommations de la part de l’enfant, est de se mettre à couvert de l’exhérédation que ses pere & mere pourroient prononcer contre lui, s’il se marioit sans leur consentement.
    Mais pour que ces sommations produisent cet effet, il faut que l’enfant soit en âge de les faire, & qu’il ait trente ans, si c’est un garçon, ou vingt-cinq ans, si c’est une fille.
    L’enfant qui consent de courir les risques de l’exhérédation, peut se marier à 25 ans, sans requérir le consentement de ses pere & mere. Voyez l’arrêt de réglement, du 27 Juillet 1692, au journal des audiences.

    Ce dernier paragraphe, conjugué à tout ce que j’ai mis sur l’exhérédation sur mon site, explique tout. En effet, autrefois la dot, ou avancement de droit successif, était obligatoirement versée par les parents (lorsque l’un ou les deux vivent) lors du contrat de mariage. Dès lors, on comprend mieux que certains parents aient hésité à donner leur bien à quelqu’un qui ne leur revenait pas ! enfin, c’est ainsi que je vois les choses… Pas vous ?

    Et soyons réaliste jusqu’au bout. Si on trouve si peu de sommations respectueuses, c’est que la plupart du temps les jeunes gens en âge de se marier avaient déjà perdu leurs parents et hérité, et étaient libérés de curatelle après 25 ans, donc libres de se marier sans toutes ces formalités.

    Voici le dernier refus que j’ai relevé, qui ne me concerne en rien, mais illustre le mode de vie d’antant. Elle a 27 ans, et mis un oncle dans sa poche, mais rien n’y fait :

    Le 20 juin 1654 après midy, en présence de nous Jean Chedran, notaire royal à Angers et des témoins cy-après nommez honorable fille Agathe Boivin demeurant en cette ville paroisse St Pierre s’est transportée vers la personne d’honnorable homme René Boivin Me orphèvre en cette ville, son père, trouvé en sa maison située rue St Laud de cette ville dite paroisse St Pierre, auquel parlant ladite Agathe Boivin sa fille a dit estre âgée de 27 ans ou plus, avoir tousjours témoigné le respect et honneur qu’elle doibt à sondit père, lequel a eu agréable la recherche que Me Arnault marchand faict de sa personne et tous ses parents, a humblement supplié et requis ledit Sr Boivin son père de consentir au mariage dudit Marchand avecq elle et en passer contract, déclarant que son refus sans en rien le départir du respect et honneur qu’elle luy doibt, elle jouit des droits et privilèges de l’ordonnance au sujet dudit mariage, et à ce que dessus a aussy esté à ce présent honnorable homme François Cochon marchand demeurant en cette ville oncle de ladite Agathe Boivin, qui a prié et supplié ledit sieur Boivin son beau-frère de consentir audit mariage et que tous les autres proches parans de ladite Agathe Boivin en sont d’advis, ledit Boivin a dit ne vouloir… (AD49)

    Vous avez noté le terme respect à plusieurs reprises. Par contre, dans ce refus, je n’ai pas compris pourquoi le père refusant est dit avoir toujours eu pour agréable la recherche … ce qui signifierait (si j’ai bien compris) que le père n’est pas défavorable au mariage de sa fille, mais bien qu’il n’a pas envie de payer de dot.

    Et demain, je vous donne des dispenses de consanguinité en Haut-Anjou. Mais rassurez-vous, il y a des provinces où tout était plus rapide, car dans ma branche Bretonne (Merdrignac et Ménéac) j’ai une quantité très impressionnante de filles mariées à 15 voire 13 ans, et tout le monde était d’accord.
    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

    Mariage illégitime et enfants illégitimes

    , suite du billet d’hier.
    Avec exercice de paléographie.

    Parfois, le père, reconnaissait l’enfant dans son testament, mettant sans doute sa conscience en paix avant de paraître devant Dieu. Parfois, l’enfant est reconnu lors du mariage, même, s’il avait été déposé à sa naissance sans mention du nom de la mère. Nous possédons un acte notarié de cette nature, dont le nom restera du domaine de la vie privée…

    Le mariage aussi pouvait être décrété illégitime en cas de consanguinité découverte après coup, probablement par dénonciation…, entraînant les enfants issus de ce mariage dans l’illégitimité. Cette règle fut organisée au 4e siècle.
    Elle a été étudiée par Jack Goody dans son ouvrage l’évolution de la famille et du mariage en Europe, Armand Colin, 1985, préface de Georges Duby. Voici le résumé :

    Stimulés par les ethnologues et les démographes, les historiens depuis vingt ans se sont mis à scruter l’histoire des réalités familiales en Europe. Jack Goody refuse les idées reçues. Guidé par son expérience d’anthropologue acquise en Afrique, il entreprend d’interroger sur la longue durée les modèles de parenté, soucieux notamment d’expliquer les différences qui ont clivé le bassin méditerranéen au IV » » siècle. Il souligne ainsi le rôle déterminant joué par l’Église dans l’Occident médiéval.
    Secte minoritaire, elle devient alors une organisation dont les intérêts exigent qu’elle constitue et défende un patrimoine elle va ainsi construire un système de règles où sont proscrites des pratiques telles que l’adoption, le divorce, le concubinage, les unions entre proches. Prenant en main les institutions du mariage, des donations et de l’héritage, elle favorise la mobilité de la terre, son aliénation, donc sa dévolution éventuelle à l’Église, et l’accumulation du capital entre ses mains. Le mariage sur consentement mutuel, la liberté de tester, les préceptes de la morale conjugale qu’elle impose assurent son pouvoir spirituel mais aussi temporel, celui du plus grand seigneur foncier.
    Traduit d’un ouvrage tout récent, cet essai « remarquable et dérangeant « , selon Georges Duby, fournira aux historiens et aux anthropologues un cadre rigoureux de réflexion et il séduira par l’originalité de ses perspectives le public des non spécialistes désireux de mieux connaître l’évolution de nos structures familiales.
    Jack Goody, ancien directeur du département d’anthropologie de l’université de Cambridge et récemment chargé d’enseignement à l’École des hautes études en sciences sociales, est mondialement connu pour ses recherches africanistes et son effort pour concevoir les modèles familiaux dans leur complexité et leur universalité.


    Cet arbre de consanguinité, dressé au 11e siècle, est l’une des multiples représentations de la consanguinité à l’époque.
    L’actualité veut qu’un Colloque international ait lieu les 24-26 janvier 2008 à l’ENSSIB École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques Écritures : sur les traces de Jack Goody autre aspect de son œuvre.

    Ainsi, la préservation du patrimoine a fixé des règles. C’est ce que je viens de redécouvrir en préparant ce billet et surtout à la lumière d’un acte notarié que j’ai récemment lu et qui m’a refait voir les dispenses de consanguinité aussi sous cet angle, ce qui m’avait jusqu’à présent totalement échappé. Le voici :

    Pour progresser en paléographie, retranscrivez vous-même ce passage. Vous avez un zoom de cette vue pour mieux la retranscrire.

    Le 6 mai 1573, Julienne Bonvoisin, veuve de †Jean Colin juge magistrat à Angers, fille de Jehan Bonvoisin Sr de la Riveraye et de Jacquette Leconte, fait une demande à monsieur l’official, expéditeur des demandes de consanguinité, afin d’obtenir une dipsense de consanguinité du 3° au 4°degré avec Jehan Bonneau, en vue de mariage.

      « desdites parties tel ne se pourra condamner le
      mariage qu’il y a entre ledit Bonneau et
      Julienne Bonvoisin et quant auxdits constituants
      ils ont voulu et consenty, veulent et consentent
      ledit mariage et que les enfants qui
      proviendront du mariage soyent déclarés
      légitimes et habiles à succéder et desrogeant
      comme dès lors et dès lors comme dès à présent tiennent
      lesdits enfants qui proviendront dudit mariage légitimes
      et habiles à succéder tout ainsi que si lesdits
      Bonneau et Julienne Bonvoisin ne se touschayent
      d’aucune consanguinité et à l’entrement de tout »

    Cet acte qui vient de me faire prendre conscience de l’importance autrefois de la transmission du patrimoine. Je n’avais pas vu la consanguinité sous cet angle jusqu’à présent. Demain nous voyons la succession des bâtards, puis nous verrons le premier acte notarié rencontré au cours d’une vie. A votre avis, quel acte rencontrait-on d’abord au cours de sa vie ? Et avez-vous le temps ce WE de répondre à mon jeu paléographie d’hier.

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.

    Illégitime, bâtard : termes infâmants, heureusement disparus

    L’INSEE nous apprend que désormais en France, 50,5 % des enfants naissent hors mariage, soit plus d’un sur deux.

    ILLÉGITIME. adj. Qui n’a pas les conditions, les qualités requises par la loi pour être légitime. Enfant illégitime. Mariage illégitime.
    BÂTARD, ARDE. adj. Qui est né hors de légitime mariage.
    MARIAGE. s.m. Union d’un homme & d’une femme par le lien conjugal. Le mariage est un contrat civil & un des sept Sacrements de l’Église. (Dictionnaire de L’Académie française, 4th Edition, 1762)

    L’enfant né hors mariage autrefois était exclu des successions… et bien souvent exclu de la société. Cela commençait parfois par un baptême noté à l’envers ou en fin du registre (ou les deux), le plus souvent marqué du terme infâmant illégitime ou bâtard. Mais pas toujours, car rien n’autorisait les prêtres à commettre ces mesures vexatoires, et bon nombre d’entre eux se montraient plus ouverts, voire même accueillants.

    Ainsi à Lonlay-le-Tesson (Orne), le prêtre notait l’acte en son rang, et miraculeurement il obtenait toujours le nom du père de la sage-femme. Celle-ci, personne jurée, était seule habilitée à donner le nom de la mère, et avait mission de lui faire dire le nom du père dans les douleurs de l’enfantement. Lequel père ainsi noté, était le père ou ne l’était pas, car il était facile de faire endosser une paternité, quoique la peur de l’enfer a dû faire dire le plus souvent la vérité à la plupard de ces filles.
    A Chanveaux (Maine-et-Loire), le prêtre accueillait tous les enfants nés hors mariage de la paroisse voisine de Challain. Il est vrai que Chanveaux était une si petite paroisse que le prêtre n’avait guère de travail sur ses registres, tandis que sa voisine Challain était débordée… mais tout de même, quand on lit les 2 registres, on a le sentiment que Challain se débarassait du problème… et à Chanveaux, ces enfants étaient notés en leur rang, ce qui est déjà une grande marque de reconnaissance. Comme quoi on ne doit jamais faire de statistiques de enfants naturels sur une paroisse.

    J’avoue ici, que lorsque je lis des sépultures, et que je vois de ces petites âmes parties en bas âge, je me dis aussitôt que ce fut mieux ainsi. Et oui, j’ai ces mauvaises pensées lors de mes lectures de registres !
    Parfois, ces filles obtenaient, devant notaire une maigre indemnité du père, lorsque celui-ci avait bien voulu le reconnaître. Parfois même j’ai vu tel père doter dès la naissance l’enfant.

    Ceci dit, après tant de lectures de registres, je ne suis pas certaine que toutes les paternités légitimes soient vraies, car la paternité endossée a existé, ne serait-ce que parce qu’autrefois on ne pouvait pas divorcer, donc il fallait bien faire la paix en famille et trouver une solution, surtout une solution honorable pour sauver l’honneur de la famille.

    J’ai trouvé un acte notarié tout à fait surprenant, dont je ne citerai pas les noms car s’il existe des descendants ils pourraient m’insulter pour avoir dit la vérité (ma BAL est ainsi polluée) : monsieur avait engrossé une autre, et madame prenait à son compte l’enfant à venir pour sauver la famille. Il suffisait ensuite d’alerter trop tard la sage-femme officielle et le tour était joué.
    Je me souviens être restée longuement interdite devant cet acte, dont à vrai dire je soupçonnais l’existence, tant le poids de la famille était énorme… et le poids des intérêts patrimoniaux encore plus…
    Demain, soit je vous parle des grandes lignes de l’évolution de la famille et du mariage en Europe, selon l’ouvrage de Jack Goudy, Cambridge 1983, soit je vous parle du droit de succession de bâtards. A vous de voir.

    Par ailleurs, pour que vous puissiez vous échauffer les neurones, je vous propose un exercice de paléographie pratique : trouver l’erreur dans l’acte suivant (la solution viendra ensuite bien sûr). C’est un baptême à Château-Gontier en 1574 :

    Cette image est la propriété des Archives Départementales de la Mayenne.
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