Vache en prison pour animaux : caution pour la libérer, 1634

Nous avions vu au sujet des cimetières d’autrefois, que l’absence de cloture, quasi générale, entraînait le vagabondage des animaux : porcs, vaches… Ici, une vache a été saisie pour vagabondage et mise en prisons pour animaux.

Voici donc d’abord un peu de vocabulaire. J’y ai ajouté la fourrière, afin que vous jugiez que c’était autrefois cette prison pour animaux, et que les animaux pouvaient être des vaches.

CAUTION. s. f. Pleige, qui respond, qui s’oblige pour un autre (Dictionnaire de L’Académie française, 1st Edition, 1694)

PLEIGE. s. m. terme de pratique. Celuy qui sert de caution. Il s’est offert pour pleige & caution dans cette affaire. Il vieillit.
Pleiger. v. act. Cautionner en Justice. Il vieillit. (Dictionnaire de L’Académie française, 1st Edition, 1694)

FOURRIÈRE. s.f. Office de la Maison du Roi & des Princes, dont les Officiers fournissent le bois pour le chauffage de la Maison du Roi & des Princes. La Fourrière a fourni tant de bois. Chef de Fourrière. Aide de Fourrière. Garçon de Fourrière.
Il se met aussi pour Le lieu où l’on met ce bois. Il faut prendre ce bois dans la Fourrière.
On dit, Mettre une vache, mettre un cheval en fourrière, pour dire, Saisir pour délit ou pour dette, une vache, un cheval, & les mettre dans une étable, dans une écurie, où ils sont nourris à tant par jour, aux dépens de celui à qui ils appartiennent, jusqu’à la réparation du dommage, ou jusqu’à la vente de la chose saisie. Les chevaux de ce Chartier ont été mis en fourrière. (Dictionnaire de L’Académie française, 4th Edition, 1762)

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E90 – Voici la retranscription de l’acte : Le 17 octobre 1634 avant midy a comparu devant nous Abel Peton notaire royal Angers résidant à Juigné sur Loire, Mahturin Baranger demeurant au bourg dudit Juigné lequel ayant eu advis que sa vache avait esté prise dimanche dernier dans les garennes et bois taillis et icelle par Jean Bouton, Jean Barault fermiers desdites garennes qui l’auraient mise ès prisons des bestiaux ordinaires dudit Juigné se seroit ledit Baranger adressé vers ledit Bouton et l’auroit sommé prié et requis par plusieurs et diverses fois luy rendre sadite vache, ce que ldit Bouton n’auroit voulu faire qu’au préalable il ne luy eust baillé bonne et suffisante caution de luy représenter ladite vache ou luy payer le dommage que sa vache auroit fait dans le git nouveau et bois taillis d’icelle
à quoy ledit Baranger obéissant sans néanmoings approuver par luy sur le prétendu dommage qui aurait esté fait par sadite vache, a présenté pour caution Jacques Delatouche voiturier par eau demeurant audit Juigné, à ce présent, qui a pleigé et cautionné ledit Baranger de ladite vache et s’est pour ce deuement soubzmis et obligé soubz ladite cour, icelle représenter et mettre entre mains dudit Bouton toutefois quantes dont l’avons jugé de son consentement et a iceluy Baranger promis acquitter ledit Delatouche de ladite caution par les mesmes voyes de rigueur qu’il y pouvoit estre cy après contraint ensemble de toutes pertes despens dommages intérests dont l’ay aussi jugé de son consentement au moyen de laquelle caution que ledit Bouton a eue agréable, iceluy Bouton a rendu audit Baranger ladite vache dont il s’en contenté sans préjudice du dommage dont il entant (entend) se pourvoir ainsy qu’il verra estre à faire,
dont et de tout ce que dessus en avons auxdites parties décerné ce présent acte pour luy servir ce que de raison
fait et passé audit Juigné à nostre tabler enprésence de Pierre Peton praticien et Abel Peton le Jeune clerc demeurant audit Juigné tesmoings, lesdit Baranger et Delatouche ont dit ne savoir signer comme aussi ledit Bouton et a iceluy Bouton fait signé à sa requête Jean Bouton son fils

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IL y avait une maison de la Tête Noire au Lion-Angers, 1622

Il y avait une Tête Noire partout, car voici celle du Lion-d’Angers.
L’acte est très effacé, et j’en ai lu ce que j’ai pu. Je sais donc avec certitude qu’elle est sur la Grand Rue du bourg du Lion d’Angers. Elle ne devait pas être en parfait état en 1622 car le prix, déja peu élevé, de 360 livres, est payable sur 5 ans !
Au passage, les ventes de biens immobiliers non payées comptant, qui ressemblent à nos ventes avec prêt immobilier, si ce n’est que dans le cas des ventes d’antant on n’a aucun intérêt alors que maintenant les 5 premières années on ne pait que des intérêt.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E5 – Voici la retranscription de l’acte : Le 20 janvier 1622 après midy, devant nous Nicolas Leconte notaire royal à Angers, ont esté présents establiz deument soubzmis Marin Delaporte Sr de la Geraudière advocat conseiller eslu pour le roy en l’élection de cette fille demeurant en la paroisse Saint Maurice de cette ville soubzmettant etc confesse avoir vendu vend quitte cèdde délaisse et transporte par ces présentes promis et promet garantir fournir et faire valoir

à Maurice Boyvin sergent royal demeurant au bourg et paroisse de Neufville à ce présent lequel a achapté et achapté pour luy et Françoise Provost sa femme à laquelle il a promis et demeure tenu faire ratiffier ces présentes et à l’accomplissement d’icelles solidairement obligée et d’en fournir acte au pied des présentes audit vendeur dans un mois prochain à peyne et ces présentes néanmoins etc

une maison située au bourg du Lion d’Angers appellée la maison de la Teste Noyre (Tête Noire) composée de chambres basses et haultes et greniers au dessus avec deux cours joignant ladite maison la maison d’Ollivier Mesnière ( ? très effacé) d’autre costé la maison de (blanc) l’une desdites cours et d’un bout le pavé de la Grand Rue du Lion comme on va audit lieu

Item vend comme dessus une portion de jardin à prendre en un jardin situé au haut dudit bourg dont le surplus dudit jardin appartient à (blanc)
tout ainsi que ladite maison avecq lesdites cours et portion de jardin se poursuivent et comportent et que Adam Beslot fermier dudit vendeur a accoustumé en jouir, sans aucune réservation en faire etc…
ceste présente vendition cession delays et transport faite pour et moyennant la somme de 360 livres tz laquelle ledit acquéreur esdits noms a promis et demeure tenu payer audit vendeur en ceste ville savoir la somme de 60 livres dedans d’huy en ans et le surplus montant 300 livres d’huy en 5 ans

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Contrat de mariage de Jean Trochon et Suzanne Panetier, Angers, 1640

Contrats de mariage retranscrits et analysés sur ce blog.

Suzanne Pannetier est une nièce de Jean Pouriatz sieur de la Hanochaie, et plusieurs Pouriatz assistent à ce titre à ce contrat de mariage.

Le futur est épicier à Nantes, mais devra acheter les biens fonciers du patrimoine de sa femme en Anjou, ce point est spécifié. Sinon, tous les points de droit sont issus de la coutume d’Anjou.

La fortune est importante, avec une dot de 6 000 livres en 1640. Les témoins sont nombreux, et on compte beaucoup de prêtres parmi eux dont au moins 3 chanoines, rien que cela !
Les chanoines ont ceci d’intéressants qu’ils ont plus les plus fortunés des prêtres, si l’on veut bien excepter les évêques, et leur succession et tout à fait appréciée de leurs neveux et nièces…

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E6 – Voici la retranscription de l’acte : Le 4 janvier 1640 après midy, par devant nous Louys Coueffe, et Gilles Chauveau, notaires royaux Angers, furent présents establys et deuement soubzmis honorable homme Jehan Trochon marchand espicier demeurant en la ville de Nantes, fils de défuntz Me Charles Trochon vivant Sr de la Ménardière et Marguerite Cousin d’une part
et Me René Panetier greffier au grenier à sel de cette ville et Renée de Sarra son espouse de luy autorisée par devant nous quant à ce, et Suzanne Pannetier leur fille, demeurant en ceste ville paroisse St Michel du Tertre d’autre part,
lesquels mesmes ledits Panetier et sa femme chacun d’eux seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens leurs hoirs renonçant au bénéfice de divition discussion et ordre à priorité et postériorité, traitant et accordant le mariage futur entre ledit Trochon et Suzanne Panetier avant leurs fiances, ont fait convenu et accordé les pactions et conventions matrimoniales suivantes, c’est à savoir qu’iceluy Trochon de l’advis et consentement de ses parents et amis cy-après nommez, et ladite Panetier aussy de l’advis et consentement de sesdits père et mère se sont promis et promettent mariage et iceluy solemniser en face de sainte église catholique apostolique et romaine toutefois et quantes que l’un en sera requis par l’autre,

en faveur duquel mariage lesdits Panetier et femme ont donné et donnent à leurdite fille en advancement de droit successif paternel et maternel et promettent solidairement donner et payer et bailler es mains desdits futurs conjointz dans le jour de leurs espousailles la somme de 6 000 livres tz en argent ou contrats de rente qu’ils seront tenus leur garantir fournir et faire valoir tant en principal que cours d’arrérages, lesquels contrats ils pourront reprendre toutefois et quantes que bon leur semblera remboursant les sorts principaux et arrérages lors escheus,
et outre habiller leurdite fille d’habits nuptiaux à elle convenables et luy donner ung trousseau honneste à leur discrétion,

de laquelle somme de 6 000 livres y en aura 1 000 livres meuble commun entre lesdits futurs époux et les 5 000 livres restant demeureront et demeurent à ladite future espouse et aux siens en ses estocs et lignées de nature de propre patrimoyne et matrimoyne, que ledit futur espoux sera tenu promet et s’oblige mettre convertir et employer en achats d’hériage bon et vallable en ce pays d’Anjou réputés ladite nature de propre sans que lesdites 5 000 livres acquises en provenant ne l’action pour les avoir et demander puissent tomber en ladite future communaulté et à faulte d’acquest ou employ luy en a dès à présent constitué sur ses propres rente au denier vingt rachaptable que luy ou les siens seront tenus rachepter et admortir un an après la dissolution de ladite communaulté et payer les arrérages de ladite rente depuis ladite dissolution jusqu’au jour dudit rachapt (la part des biens entrant dans la communauté est de 16,6 % ce qui est assez représentatif des pratiques rencontrées)

moyennnant lesquels dons et advantages ainsi fait par lesdits Panetier et sa femme à leur dite fille le survivant d’eux deux jouira pendant sa vie de sa part afférente aux bien du prédécédé (ce point préserve les parents, et lorsque l’un d’eux décèdera le survivant ne sera pas spolié)

pour le regard dudit futur espoux il a déclaré et assuré avoir en son patrimoyne en deniers meubles marchandises et debtes actives la somme de 5 000 livres toutes debtes acquitées comme il fera apprévier par inventaire qu en sera fait et qui demeurera attaché à ces présentes pour y avoir recours quand besoing sera

de laquelle somme y en aura aussy 1 000 livres qui entreront en ladite communaulté et les 4 000 livres restant luy demeureront et aux siens en ses estocs et lignées nature de propre patrimoyne et matrimoyne et les pourra colloquer et employer en achapt d’héritage pour luy tenir ladite nature propres et à faulte en sera raplacé sur les biens de ladite communaulté
laquelle communaulté de biens s’acquérera entre lesdits futurs conjoints du jour de leur bénédiction nuptiale nonobstant la disposition de la coustume de ce pays et duché d’Anjou, à laquelle en ce regard ils ont desrogé et desrogent
n’entreront en ladite communaulté les debtes passives dudit futur espoux sy aucunes il a créées avant ledit jour de la bénédiction nuptiale ains seront par luy payées et acquitées sur son bien sans que ladite future espouse en soit tenue
en cas de répudiation par la future espouze ou ses enfants ou héritiers à ladite communaulté, ils reprendront franchement et quittement toute ladite somme de 6 000 libres nonobstant qu’il y en ait 1 000 livres en meubles, ses habits bagues et joyaux et généralement tout ce qu’elle aura apporté à son mesnage et luy sera escheu et adveneu par succession donnaison ou autrement sans qu’ils soient tenus d’aucunes debtes dont ils seront acquités par ledit futur espoux encores qu’elle en feust personnellement obligée et pareillement cas de décès de ladite future espouse advenant sans enfants provenus dudit mariage ledit futur espoux remportera ses habits et autres choses à son usage comme aussy en cas de vente ou aliénation par les futurs conjoints de leurs propres, ils en seront respectivement raplacés et récompensés, mesmes ladite future espouse par préférence sur les biens de ladite communaulté s’ils y sont suffisants, sinon sur les propres dudit futur espoux qui y demeurent dès à présent obligés affectée et hypothéqués

lequel futur espoux a consenti et assigné sur tous ses biens douaire à ladite future espouse cas d’iceluy advenant suyvant ladite coustume

ce qui a esté stipulé et accepté par lesdites parties etc mesme lesdits Panetier et sa femme solidairement eux leurs hoirs etc

fait et passé audit Angers maison desdits Sr et dame Panetier présents Me Pierre Trochon Sr de la Menardrye advocat au siège présidial d’Angers frère dudit futur espoux, noble homme Alexandre Bachelot conseiller du roy conseiller au grenier à sel de ceste ville, noble et discret Me Pierre de Sarra prêtre chanoine et official en l’église d’Angers, noble homme Me René Hamelin Sr de Richebourg substitut et procureur du roy, Jehan Verdier aussy conseiller du roy juge magistrat, Me Jacques Hamelin advocat audit siège, noble et discret Me Estienne Hamelin prêtre aussy chanoine en ladite église d’Angers, proches parents dudit futur espoux, Me René Panetier Sr de la Feranderye, noble homme Guy de Bonnaire Sr de la Prise, Thomas et Loys les Panetier frères et beau frère de ladite future espouse, Me Jacques Panetier Sr de la Terandière, Me Jehan Pouriatz Sr de la Hanochaie, Jacques Pouriatz aussi advocats audit siège, noble homme Philippe Feneu Sr de la Planche conseiller du roy assesseur en l’élection de ceste fille, François Heard Sr de Gastienière conseiller du roy en l’élection, vénérable et discret Me Loys Dutay prêtre chanoine en l’église St Maurille de ceste ville, Me Pierre Breard et Pierre de Sarra proches parents de ladite future espouse et autres



Cliquez l’image pour l’agrandir. Cette image est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Je la mets ici à titre d’outil d’identification des signatures, car autrefois on ne changeait pas de signature.

Bientôt d’autres Trochons, auxquels je n’ai pas compris les liens . Si vous les connaissez, merci de faire signe dans les commentaires ci-dessous.

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Achat d’un mauvais cheval, 1732

Nous avons souvent parlé du rôle de médiateur joué autrefois par les notaires. Voici aujourd’hui une bien curieuse médiation.

Un dame a fait manifestement une mauvaise affaire en achetant un cheval à la foire.

    Pour faire annuler son achat, elle le fait mener chez le notaire, qui dresse un acte valant procès-verbal du mauvais état du cheval.

    Mieux, le notaire garde le cheval dans son écurie pour que le vendeur vienne le reprendre et restituer la somme qu’il a touchée.

C’est merveilleux, un notaire compétent pour dresser un tel PV ! Cest pourtant un notaire royal, qui devrait normalement être occupé à des transactions plus importantes !
Mais cela montre en tout cas son influence, puisque c’est lui qui va agir près du vendeur.

L’acte qui suit est extrait des Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E30 – Voici la retranscription de l’acte : Le 7 juin 1732 sur les 5 h du soir, ont comparu devant nous Charles Billeault notaire royal résidant à Rablay Me Jacques Gabriel Adam clerc tonsuré licencié ès lois et Jean Foudrain vigneron demeurant paroisse d’Érigné

lesquels nous ont déclaré que jeudi dernier un nommé Asseray marchand demeurant au village du Chamt paroisse de Thouarcé aurait vendu à la foere (foire) de Vihiers un chevam jaune avec une raye de mulet, d’âge inconnu, à Delle Jeanne Bry veuve du sieur Gaspard Bascher demeurante à Boysserault paroisse d’Ambillou pour la somme de 50 livres 12 sols que ladite damoiselle Bascher luy paya comptant

lequel dit cheval se trouvé outre poussif et pour preuve de ce aurait un rossignol sous la queue lequel dit cheval ne paraissait point outre poussif lors dudit marché ladite damoiselle ne s’en estant aperçue que d’hier dernier qu’il rendit une médecine après l’avoir rendue ledit cheval se serait mis à pousser et les flancs à luy battre d’une manière qu’il paraît outre poussif

de tout quoy ledit sieur Adam et Jean Foudrin faisant pour ladite dame veufve Bascher nous ont requis acte pour leur servir et valoir ainsi que de raison pour se pourvoir contre ledit Asseray et de toutes pertes dépens dommages et intérests ce que leur avons octroyé,

lequel dit cheval ils ont relaissé audit bourg de Rablay en l’écurie de nous notaire pour que ledit Asseray ait à le retirer en rendant le prix dudit cheval
arrêté audit Rablay en nostre estude présents André Chupin marchand et Pierre Bourgeault charpentier demeurant audit Rablay témoins


Cliquez l’image pour l’agrandir. Cette image est la propriété des Archives Départementales du Maine-et-Loire. Je la mets ici d’exercice de lecture. Je ne suis pas certaine d’avoir bien lu ce qu’il a sous la queue, si vous savez merci de nous le dire…

POUSSIF, IVE. adj. Qui a la pousse. Il ne se dit proprement que des chevaux. Un cheval poussif.
Par extension & par plaisanterie, en parlant d’Un gros homme qui a quelque peine à respirer, on dit, que C’est un gros poussif. Et dans ce sens, Poussif est pris substantivement. (Dictionnaire de L’Académie française, 4th Edition, 1762)

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Soldat de milice déserteur à La Selle-Craonnaise, 1689

Ce site + blog, vous propose plusieurs traces des soldats de milice à travers les actes notariés :

    soldats de milice du Haut-Anjou
    tirage au sort
    impôt pour l’entretien
    décès près de Roanne
    Soldat de milice, Thorigné, 1689
    Milicien pour Saint-Lambert-du-Lattay (49), 1719
    Jean Martin, d’Ancenis, soldat de milice pour Montreuil-sur-Maine, en 1701

L’acte qui suit se situant en 1690, il convient de rappeler les dates importantes de la milice, généralement appelée la milice provinciale

La milice provinciale est crée au début de la guerre de la Ligue d’Augsbourg pour augmenter les effectifs de l’armée. Le 20 novembre 1688, levée dans chaque paroisse, en fonction de sa contribution à la taille, des célibataires de 20 à 40 ans. La population rurale fut alors à peu près la seule astreinte à la milice.
Équipés et soldés par leur paroisse, les miliciens étaient incorporés dans des compagnies commandées par un officier originaire de la Province, puis allaient rejoindre l’Armée.
Louvois dut menacer du fouet le 16 mars 1689, les hommes qui quitteraient leur village pour échapper à la milice.
Le tirage au sort, institué le 23 décembre 1692, rendit plus effective la contrainte. Des garçons se mariaient à la hâte, d’autres simulaient la folie ou se mutilaient l’index pour ne pas tirer au billet.
La hantise de la milice culmina pendant la guerre de succession d’Espagne, au cours de laquelle elle a fourni 46 % des effectifs engagés.
De 1708 à 1711, il devint plus difficile de payer la troupe que de la recruter, aussi le Rois substitua un impôt à la milice.
L’âge minimal est abaissé à 18 ans en 1693, il passera même un moment à 16 ans !
Il y eu souvent un billet noir sur 5, mais à travers les exemptions, les infirmités voire de fugitigs, on a parfois atteint un sur 4.
Les familles des garçons qui avaient tiré un bon numéro se cotisaient pour procurer au milicien une sorte d’indemnita. Quoiqu’il eut été interdit, depuis le 12 novrembre 1633, de « mettre au chapeau », les subdélégués fermaient les yeux. Ils ont même souvent autorisé les communautés d’habitants à affecter le produit des cotisations à l’engagement d’un milicien volontaire. (Selon L. Bély, Dict. de l’Ancien Régime, 1996)

L’acte qui suit est extrait des Archives départemantales de la Mayenne, série 3E1 Voici la retranscription de l’acte : Le 6 avril 1690 avant midy devant nous André Planchenault notaire de Craon y demeurant, furent présents establis et soumis chacuns de Pierre Bouesseau procureur marguiller de la paroisse de La Selle Craonnaise, Jacques Delanoë, André Denouault, Jean Epron, Michel Bodinier, Jean Gendry, René Douineau, Michel Grignon, tous particuliers habitants de ladite paroisse de La Selle,

lesquels ayant cy-devant nommé avecq le général des habitants de ladite paroisse de La Selle pour servir sa majesté dans sa milice Pierre Eschard lequel aurait déserté en sorte que s’étant trouvé hors d’état de pouvoir fournir un soldat pour marcher en compaigne au lieu où ladite milice sera commandée aller une compagnie de laquelle partit dudit Craon le jour de mardy dernier sous la conduite et le commandement de monsieur de la Pasqueraye capitaine de la compagnie dudit Craon, en laquelle le soldat de ladite paroisse doit estre incorporé

ils ont esté obligés de nommer pour servir en ladite milice pour leur dite paroisse au lieu et place dudit Eschard le nommé Gerault de ladite paroisse et crainte qu’il déserte comme ledit Eschard, ils ont esté contraints de s’assurer de sa personne et l’emmener en cette ville de Craon pour le mettre entre les mains d’honneste homme Guillaume Boisgontier messager ordinaire dudit Craon en la ville d’Angers, demeurant audit Craon, à ce présent estably et soumis et obligé, lequel a promis et s’est obligé mener ledit Girault en ladite ville d’Angers et iceluy mettre entre les mains de monsieur de la Pasqueraie capitaine de ladite compagnie de milice dudit Craon demain au soir septième du courant et en apporter certificat signé de la main dudit Sr de la Pasqueraie, de l’acceptation ou du refus qu’il en fera et en cas de regus le laissera libre de s’en retourner auxdits establis lesquels pourla conduite, voiture et nourriture dudit Girault ont promis et se sont solidairement obligés chacun d’eux seul et pour le tout sans division et qui ont renoncé etc avec tous et chacuns leurs biens etc tant en leurs propres et privés noms que pour le général desdits habitants de La Selle payer et bailler dans le jour de lundy prochain venant audit Boisgontier lequel a reconnu que lesdits establis lui ont présentement mis entre mains la personne dudit Girault la somme de 12 livres à laquelle ils ont convenu pour ce que dessus est dit, dont de leur consentement nous les avons jugés,
fait et passé audit Craon en notre étude présents honnestes personnes Jacques Berchault marchand mégissier et Guillaume Lefrère hoste demeurant audit Craon, témoins à ce requis et appelés, lesdits establis, fors les soussignés, ont déclaré ne savoir signer de ce enquis et sommés de ce faire. Signé : Delanoë, Denouault, Bouesseau, Epron, R. Douesneau, Bertault, G. Lefrère, A. Planchenault

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NANTES LA BRUME, Ludovic GARNICA de la Cruz, chapitre XVII Fuséïdes, première partie

Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

  • Chapitre XVII
  • Fuséïdes
  • Par les chaudes ondées de soleils, ils allaient en canot sur la rivière. Elle tenait la barre, abritée sous une large chapeau de paille et elle était souverainement joyeuse de chanter ou de plonger ses doigts dans l’eau. L’esquif glissait avec le silence d’une hirondelle qui rase le sol. Les rives décolletées laissaient entrevoir leurs reins verts gonflés des fécondations de l’été. Aux flancs, les villas rivalisant de grâce et de coquetterie formaient les agrafes et les joyaux de leurs ceintures. Le cours sinueux de l’Erdre ouvrait des criques où se penchaient rêveurs les arbres engourdis, frôlait des promontoirs à pic, séjour d’un fouillis d’herbes et de fleurs, s’attardait alentour des meules de roseaux bruissant sans cesse comme un camp de sauterelles.
    Sur la semaine, rares étaient les importuns à leur tête à tête. A peine quelques barques d’étudiants fuyaient aux chocs vigoureux des rames, quelques pêcheurs tenaces s’obstinaient dans un coin, quelqes gros chalands chargés de pierres descendaient de Nort, halés par un remorqueur bruyant, ou vides, remontaient, la voile carrée emplie de vent. Aux environs de Sucé, ils choisissaient un gentil endroit bien calme où ils débarquaient. Tandis que la barque s’ensommeillait, les naseaux accrochés par une corde à un arbre voisin, ils erraient visiter les lieux la main dans la main. Leux chois, c’était toujours la pleine campagne s’étendant à l’infini, de l’herbe épaisse, au-dessus, des ombrelles de feuillages. Après avoir erré, cueilli des fleurs dont elle avait garni son corsage et ses cheveux, aussi sa boutonnière à lui, ils collationnaient de friandises et de baisers.
    Une promenade en canot, un lieu très à l’écart des curieux, une solitude entre deux êtres qui s’aiment, assaisonnés d’une molle chaleur, troublent bien des têtes, épanouissent bien des coeurs. Voici que monsieur l’Amour fait sa cueillette de fleurs vivantes. Les cheveux dénoués auront des brins d’herbe en prison, les jupes seront froissées. Pourquoi ce chapeau erre-t-il à l’anventure, ce soleil grivois s’excite-t-il sur les faveurs roses d’un pantalon épars ? Ah ! les tendres caresses sous le voûte libre du ciel bleu, joindre sa chanson d’amour à celle de la nature qui ne cesse jamais de s’aimer ! Les soupirs s’en vont emportés par le vent vers l’urne des cantiques sacrés. Mi-devêtue, Jeanne est si jolie dans son bain de verdure, qu’il s’affole de ses seins blancs luisant au soleil leur nacre et leurs boutons de rose.
    A ceuillir des fleurs dans les prés, à entendre les oiseaux chanter, Jeanne aima follement les fleurs et le chant des oiseaux. Elle en voulut dans leur jardin. Bientôt leur pelouse balança au vent un chevelure d’épingles d’or, de peignes blancs ; des volières installées alentour.

    Le dimanche, elle allait faire son choix sur la place du Bouffay. Les marchands d’oiseaux y avaient installé leurs cages dont les habitants remuaient, si vifs qu’on aurait dit les barreaux danser. Au milieu du chant des captifs, elle discutait ses préférences. Et les pigeons jaloux qui se battaient comme des députés, le gros ara vert qui dormait le cou dans les épaules, les tourterelles qui récitaient leurs litanies de nonnes éplotées, les serins papillonant leurs ailes jaunes et leurs gorgerins et… d’autres encore. C’était un coin de l’arche de Noé, le domicile d’où partaient l’ingrat corbeau et la timide colombe.
    Ensuite on se rendait par la rue d’Orléans sur la place de la Bourse où s’étalait dans un flot de chartés parfumées le marché aux fleurs. En route, on s’était attardé chez quelque pâtissier. Jeanne avait croqué plusieurs éclairs, barbouillé ses lèvres de crème. Ainsi, toute joyeuse, elle emplissait ses yeux d’une extase en flore, le long des boutiques de fleuristes, habillées de blanc comme une table ornée pour d’extrêmes onctions. Son âme s’égarait dans l’amoncellement des bouquets. La marchande en coiffe, les jupes troussées, les mains rougeaudes, l’incitait à respirer le poison de ses cassolettes « mises par le bon Dieu pour encenser la terre et les dames ». Son corsage garni, elle se suspendait au bras de son ami, plus tendre, plus coquetteuse. Ils évoluaient encore parmi les plantes rares emprisonnées dans de vulgaires pots. René ne pouvait s’empêcher de sourire en l’entendant marchander. Tenace, elle n’abandonnait jamais la proie convoitée avant une discussion terrible. Elle se proclamait victorieuse lorsqu’elle avait fait rabattre quelques sous.
    Jeanne épanouissait ses toilettes resplendissantes, orgueilleuse d’être plus belle que les autres promeneuses. Les heures que l’amour n’employait pas étaient, la plupart du temps, consacrées à l’apprêt de toilettes nouvelles, de coiffures curieuses, de chapeaux merveilleurs. René cédait à ses caprices. Il aimait la voir briller comme une chapelle toujours en fête ; il aimait l’entendre froufrouter près de lui, sentir la moire craquer sous ses doigts quand il la caressait sur ses genoux, connaître de nouveaux parfums en baisant son cou mutin ou sa nuque frisonnante.
    Ils s’éloignaient de la place de la Bourse laissant le soleil encenser les parasols géants et la statue de Villebois-Mareuil émergeant d’une touffe luxurieuse d’hommages comme serait un bouddha fêté en une pagode dont la voûte est bleue et le sole, l’écume de la marée des fleurs universelles.
    Ils prenaient quelquefois le bateau de Tretemoult. Ils déjeunaient à la terrasse d’un café, avec devant eux, la Loire sillonnée de barques. Ils fuyaient ensuite sur les berges du fleuve par les sentiers étroits, au travers des prairies chevelues, buvaient du cidre sur des tables moussues d’auberges champêtres. Parfois aussi, excités par la chaleur et les baisers, ils se laissèrent disparaître dans l’herbe haute et s’aimèrent librement sous les rideaux célestes.

    Sur le bateau-mouche, Jeanne rencontra une amie de pension qu’elle n’avait pas revue depuis longtemps. Elles se dirent bonjour amicalement.

  • Tu es avec ton mari ? demanda l’amie subitement
  • Surprise de cette question inattendue, Jeanne Rougit.

  • Oui, hésita-t-elle.
  • L’autre ne fut pas dupe de ce mensonge et reprit d’un ton plus froid où perçait le dédain.

  • Ah ! … moi, je suis mariée depuis trois ans avec un brave employé… au revoir… Je crois qu’il m’apelle.
  • Jeanne pinça les lèvres de dépit. Elle resta appuyée sur le bord du bateau. René la rejoignit. Elle le brusqua pour la première fois alors que des larmes silencieuses emprisonnaient ses yeux.
    René ne comprenant rien à cette mauvaise humeur, attendit pour l’interroger d’être avec elle dans leur chambre.

  • Pourquoi pleurait-tu ?
  • Je ne pleurais pas, c’est le vent, un grain de poussière.
  • Et ton mutisme, et ton humeur massacrante, était-ce aussi le vent, un grain de poussière ?
  • Tu m’embêtes ! C’est de ta faute si j’ai du chagrin.
  • Voilà qui est bizarre. Tu n’as fait que rire toute la journée. Je ne t’ai même pas contrariée et soudain tu me boudes.
  • On m’a insultée à cause de toi.
  • Où… qui… sur le bateau… ton amie de pension… Pourquoi ?
  • Parce que je suis ta maîtresse… là !
  • Il fallait ne pas lui dire si tu en as honte. Ce n’est pas inscrit sur ton visage.
  • Elle m’a demandé si j’étais mariée… J’ai hésité… Elle m’a tourné le dos.
  • Jeanne se mit à sangloter comme une enfant.

  • Voyons, ma petite chérie, console-toi. Ce te sera une leçon pour ne plus parler à des amies qui n’en sont pas.
  • Alors il faudra que je sois une ours, que je me tienne à l’écart comme une criminelle, qu’on me fasse honte impunément. Je ne sortirai plus d’ici. Je me cacherai du matin au soir. Que je suis malheureuse !
  • En voilà une scène ridicule pour si peu de chose
  • Comment si peu de chose de m’insulter !… Tu ne m’aimes pas !
  • Quelle folie ! Couchons-nous, la nuit te calmera.
  • Ils se couchèrent en silence. Au lit, comme d’habitude, René enlaça son amie désireux de son corps tiède qu’il sentait à travers la chemise. Elle mit sa tête sur son épaule pendant qu’il s’attardait aux préliminaires de l’amour.

  • René, tu m’aimes bien ?
  • Oui, ma chérie.
  • Beaucoup.
  • Beaucoup.
  • Tu m’aimeras toujours ?
  • Toujours.
  • Tu ne me quitteras jamais ? Nous serons toute notre vie ensemble ?
  • Oui, mon aimée.
  • Alors, pourquoi ne m’épouserais-tu-pas ?
  • Tu y songes encore… Vien m’aimer. Le reste importe peu.
  • Réponds-moi ?
  • Nous avons le temps… c’est l’heure de l’amour.
  • Je veux que tu me dises oui ou non ?
  • N’es-tu pas heureuse maintenant ?… Je ne te refuse rien !
  • Je ne veux plus qu’on m’insulte ? Quand je serai ta femme, ils courberont la tête !
  • Orgueilleuse !
  • Je vois que tu ne veux pas puisque tu évites de me répondre.
  • Je t’aime, ma petite Jeanne
  • Non ! Laisse-moi !
  • Méchante qui va bouder !
  • Fiche-moi la paix !
  • Jeanne !
  • Zut !
  • Viens m’embrasser !
  • Zut.. zut… zut… zut.
  • Ils se tournèrent le dos. Le lit dont les ressorts avaient chanté quotidiennement les « nuictées » d’amour s’ennuya comme celui des ménages… prudes ou prudents.
    Ils se boudaient encore un peu lorsq’uarriva la Fête appelée Nationale.
    Au matin du 14 juillet, René fit une tentative de parfaite réconciliation.

  • Jeanne, veux-tu passer la journée à Nantes ?
  • Comme tu voudras, répondit-elle indifférente.
  • Cependant elle s’habilla le plus coquettement possible, coula des parfums sur ses épaules, sur ses mains et dans ses cheveux. Son chapeau mis, elle se regara une dernière fois dans la glace. René la surprit s’admirant. Du seuil de la chambre les parfums de son amie le troublaient, il désirait toujours cette femme aujourd’hui si délicieuse en sa robe de voile rose.

  • Jeanne, la voiture est prête, dit-il en contenant son envie folle de lui baiser la nuque, de la froisser dans ses étoffes légères.
  • C’est bien, je te suis.
  • Ludovic Garnica de la Cruz. Nantes la brume. 1905. Numérisation Odile Halbert, 2008 – Reproduction interdite.

    NANTES LA BRUME, Ludovic Garnica de la Cruz, 1905

  • 1 : le brouillard
  • 2 : la ville
  • 3 : la batonnier et l’armateur
  • 4 : le peintre
  • 5 : le clan des maîtres
  • 6 : rue Prémion
  • 7 : labyrinthe urbain
  • 7 : labyrinthe urbain – fin
  • 8 : les écailles
  • 9 : emprises mesquines
  • 10 : carnaval
  • 11 : le cul-de-sac
  • 11 : le cul-de-sac – suite
  • 11 : le cul de sac – fin
  • 12 : les portes de Neptune
  • 13 : Cueillettes d’avril
  • 14 : Moisson d’exil
  • 15 : Les courses
  • 16 : Une Fête-Dieu en 1903
    17 : Fuséïdes, première partie
    17 : Fuséïdes, fin
    18 : Villanelles
    19 : la hantise
    20 : Chevelure de sirène
    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet Merci d’en discuter sur ce blog et non aller en discuter dans mon dos sur un forum ou autre blog.