Gilles Pointeau et Etienne Leroy, sergents royaux, emprisonnés à Angers : La Selle Craonnaise 1599

Si vous êtes fréquenté régulièrement ce blog, vous savez déjà que j’ai plusieurs actes concernant les prisons et surtout le paiement de la sortie de prison, car autrefois on payait les frais de geôle au geôlier en sortant.
Ici, l’acte semblait tout à fait anondin, puis à la fin, je découvre que les 2 sergents qui empruntent la somme pour pouvoir payer leur sortie de prison, passent cet acte de prêt dans la chapelle de la prison royale d’Angers, autrement dit ils sont sortants.
D’ailleurs, le prêteur n’est pas inconnu, car il est de la même région qu’eux, et je pense qu’autrefois pour ce type de prêt, on cherchait toujours ainsi un notable du même pays, en sorte un réseau de soutiens.

Cet acte est aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, AD49-5E121 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :

Le 1er mars 1599 après midy en la cour royale d’Angers endroit par davant nous Michel Lory notaire d’icelle personnellement establys honnestes personnes Me Pierre Poisson sieur de Gastines et Estienne Leroy et Gilles Pointeau sergents royaulx demeurant savoir ledit Lecerf sieur de Gastines en ceste ville paroisse st Maurille et lesdits Leroy et Pointeau au bourg de la Selle Craonnoyse soubzmectant chacun d’eulx seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens eulx leurs hoirs etc confessen debvoir et bailler dedans d’huy en 10 jours prochainement venant à honnorable homme Me Jehan Jacques Belet sieur de la Chapelle advocat au siège présidial de ceste ville à ce présent sipulant et acceptant la somme de 25 escuz sol vallant 75 livres tz à cause de pur et loyal prest faict présentement par ledit sieur de la Chapelle auxdits establis qui ladite somme ont eu prise et receue en notre présence et veue de nous en quarts d’escu et francs d’argent de 20 sols pièce au poids et prix de l’ordonnance, dont ils se sont chacun d’eulx seul et pour le tout tenus content ; et pour l’effet et entretenement des présentes ont lesdits Leroy et Pointeau prorogé juridiction par devant monsieur le lieutenant général de monsieur le sénéchal d’Anjou et gens tenant le siège présidial audit lieu par davant lesquels ils ont voulu et consenty veulent et consentent estre traités comme par devant leur juge naturel et ont renoncé et renoncent à tous delay et fins déclinatoires de juridiction et ont esleu leur domicile en la maison de Me Fleury Harangot advocat audit siège pour y recepvoir tous commandemants et actes de justice qui vaudront comme si faits estoient à leurs personnes et domicile ordinaires ; au paiement de laquelle somme de 25 escuz sol se sont lesdits establys obligés et obligent chacun d’eulx seul et pour le tout sans division de personnes ne de biens eulx leurs hoirs etc à prendre etc renonçant etc et par especial au bénéfice de division ordre et discussion de priorité et postériorité foy jugement et condemnation etc fait et passé audit Angers en la chapelle de la geole des prisons royaulx de ceste ville ou ont esté extraits lesdits Leroy et Pointeau après prisonnement en icelles présents René Rochereau notaire en cour laye demeurant à Denée et Pierre Aifault marchand demeurant en la paroisse de Saint Pierre des Echaubrougnes tesmoins

Les signes de richesse du meunier du Moulin Vieux : Montmartre Paris 1694

Donc, nous avons passé plusieurs jours sur divers signes de richesse de Jacques Fauvet et Ursule Renou meuniers du Moulin Vieux à Montmartre. Ils sont décédés laissant 5 enfants mineurs, ce qui laisse supposer qu’ils étaient encore relativement jeunes, probablement 40 ans ou moins.
Pourtant, leurs biens meubles témoignent d’aisance.

Aujourd’hui, je termine sur le point le plus criant de cette aisance.

Vous qui avez l’habitude de me suivre, vous savez combien j’ai aimé retranscrire et analyser d’inventaires après décès en Anjou. Et on y trouve rarement d’argenterie, réputée pour être un signe de richesse. Et dans cet argenterie j’ai relevé, toujours en Anjou, la présence d’une tasse d’argent. Je dis bien « une tasse », pas deux. Et ce point est déjà une grande intrigue pour moi, car dans un couple une seule tasse ne se comprend pas facilement. On peut même se demander si c’était madame ou monsieur ? J’avoue que je me pose toujours la question.
Et j’ai donc depuis longtemps sur mon site une page consacrée à cette tasse d’argent qui m’intrigue car une seule dans un couple.

Alors, venons en à nos meuniers.
C’est incroyable ils ont 4 tasses d’argent.

Alors, j’ai réfléchi plusieurs jours, et j’en suis venue à l’hypothèse qui suit. J’exclue l’hypothèse de timbale de baptême puisqu’ils ont 5 enfants pas 4.
Et me souvenant de l’inventaire de l’hôtellerie Feillet, qui contenait beaucoup d’argenterie, j’en viens à conclure que le Moulin Vieux recevait les promeneurs du dimanche et leur servait à boire, et ces promeneurs étaient distingués. Un peu une guinguette BCBG;

Cela pourrait rejoindre ce qu’on a écrit sur ces moulins, à savoir qu’ils attiraient les promeneurs, pour la vue, et proposaient consommation.

Cet acte est aux Archives Nationales, MC/ET/CXIV/6 Henri Venant notaire à Paris, 1694 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :


Item 4 tasses dont 3 a une coquille et l’autre à 2 anses, 2 clanis ?? dont l’un à sizeaux et l’autre à clefs, et un chiblet de hochet le tout d’argent poinçon de Paris pesant ensemble avec un hochet à la chesne 4 marc 3 onces 2 quarts prisés à la valeur à raison de 28 livres le marc qui fait ensemble la somme de 123 livres 7 sols 8 deniers
Item 3 petits morceaux d’un anneaux rompu 30 sols
Item une vie de saint Roberd ? en veau prisée 3 livres

Et maintenant je récapitule tous les signes d’aisance du meunier du Moulin Vieux :
Le meunier de Montmartre avait des rideaux aux fenêtres : Paris 1694
La meunière de Montmartre avait un mouchoir de dentelle d’Angleterre : Paris 1694
Le manteau imperméable du meunier de Montmartre était en bouracan : 1694
Et il possédait beaucoup de linge

Les miroirs du meunier du Moulin Vieux : Montmartre Paris 1694

Depuis quelques jours, nous entrons dans l’intérieur du meunier et de la meunière du Moulin Vieux, l’un des 14 moulins de Montmartre, et le plus ancien, et surtout ne regardez pas Wikipedia sur ce moulin : ils le commencent en 1730. Ouille !

Et à travers les biens meubles du meunier, je vous ai témoigné mon étonnement de trouver pour la première fois dans un inventaire des rideaux aux fenêtres :

Le meunier de Montmartre avait des rideaux aux fenêtres : Paris 1694

Et nous sommes alors partis en discussion sur les vitres aux fenêtres, ou plutôt l’abscence de vitres longtemps dans l’immense majorité de la population.

Avant de terminer demain en apothéose surprenante l’inventaire de ce meunier, laissez-moi aujourd’hui vous témoigner d’une autre bien assez remarquable, car infiniement rare en Anjou dans les innombrables inventaires que j’ai pu retranscrire et étudier.
Je veux parler du miroir.
Rarissime dans ce que j’avais déja vu en Anjou.
Et pourtant, le meunier et la meunière du Moulin Vieux de Montmartre, possèdaient 2 miroirs, dont l’un est qualifié de « miroir de toilette ».
Avec beaucoup de malice sans doute, je conclue que madame était coquette !!! Et je suis certaine que vous allez être de mon avis.

A demain, pour la fin de cette étude, et vous allez être surpris !!!
Odile

Au revoir Renée !

Pionnière, vous avez hanté jeune fille la salle des archives de la Mayenne après la guerre !
Les employés des Archives découvraient alors héberlués une chercheuse d’ancêtres. Heureux de voir enfin une personne fréquenter leur salle, ils étaient alors loin de se douter de la déferlante qui suivrait des années plus tard, envahissant leur espace.
Mais bientôt vous passiez à la pratique : créer une famille et assurer une descendance. Votre passion pour la généalogie alors mise en veille, vous fondiez une nombreuse descendance, de quoi alimenter à jamais les futurs chercheurs !
La tâche familiale accomplie, vous pouviez rallumer la flamme généalogique.
C’est alors que j’eu l’immense bonheur de faire votre connaissance, à l’époque où les contacts généalogiques étaient certes rares mais oh combien plus humains.
Et ce fut réciproque.
Nous entamions un long échange que seul le départ de l’une ou de l’autre pouvait tarrir.
Plus tard, quand votre santé vous le permettait, vous lisiez mon blog.
Cette révolution technologique vous l’aviez acceptée, certes vos doigts ne maîtrisaient pas le clavier mais hardiement le postal et sa plume.
Et c’était si beau ce que vous m’écriviez !
Non, Renée, vous n’êtes pas partie, car je vous garde à jamais en moi, même pas enfouie, mais vivante.
Car telle est ma mémoire !
Alors je vous dis au revoir Renée Chicoisne Mezin

Tandis qu’en Anjou on tissait le lin, à Paris le meunier dormait dans le chanvre jaune : Montmartre 1694

Surprenante différence dans les modes de vie au 17ème siècle, car en Anjou on cultive certes du chanvre, mais il vient en second plan, et dans les inventaires après décès les draps, nappes et chemises sont en lin.

Chez moi, dans ma mémoire familiale et mes habitudes, le chanvre fait des draps plus épais, et on les utilisait pour les vendangeurs, ou autres employés. Je possède encore 3 draps de chanvre, archivés au fond de l’armoire mais très, très rarement utilisés.

  • Bilan actuel de l’industrie textile en France :
  • Une de mes nièces m’a posé la semaine dernière la question du tissage en France, car elle pensait qu’il avait presque disparu. Puisque je connaissait encore les Toiles de Mayenne, entre autres, j’ai donc tenté de faire le point en 2018, et il ne semble pas tout à fait négatif, mais semble plus ancré en spécialités et haut de gamme. Nous avons en effet de très nombreuses spécialités régionales qui sont loin de disparaître.
    Et le lin et le chanvre en sont.

    Ils tissent encore le lin dans le Nord, entre autres.
    Mais les Toiles de Mayenne font partie de notre patrimoine du Maine-Anjou.

    Et ils tissent le chanvre.

    Union des industries textiles

    Annuaire de l’industrie textile

  • le chanvre jaune du meunier du moulin Vieux à Montmartre
  • Le meunier du moulin Vieux de Montmartre possède beaucoup de linge, plusieurs douzaines de draps, plusieurs douzaines de chemises, le tout en chanvre jaune. J’ai découvert le chanvre jaune sur le site de l’usine actuelle de tissage du chanvre dans le sud.
    Donc le meunier est aisé, car il en possède beaucoup. Et le chanvre jaune est manifestement très utilisé à Paris, alors qu’en Anjou on prise le lin. Enfin, c’est une constatation basée sur un seul inventaire à Paris, mais le fait que tout y soit en chanvre semble bien signifier que le chanvre domine à Paris.

    Enfin, je tiens à souligner aussi ici que la chemise est en elle-même un signe social. Si vous le souhaitez je peux vous refaire son histoire en tant que linge de corps, car je me souviens que lorque j’ai découvert il y a quelques années que l’immense majorité de mes ancêtres n’en avait pas, et portaient à même la peau des tissus plus rudes et peu souvent lavés, pour dire jamais… je fus très choquée, tant on oublie tout cela, si ce n’est qu’en résumé notre nez a perdu la mémoire des odeurs puissantes qui constituaient leur quotidien, à commenceer par la leur.
    Odile

    Le manteau imperméable du meunier de Montmartre était en bouracan : 1694

    Je poursuis l’étude des choses remarquables dans l’inventaire du meunier Jacques Fauvel, sur la butte de Montmartre, décédé avant 1694.

    Il avait un manteau en bouracan.

    Bouracan (Barracan, Baracan, Barragan) : Les auteurs des 17e et 18e siècles pensent que le terme vient du mot italien « baracane », ou bien de l’espagnol « varocino » ou « varonico », car l’étoffe convient aux Espagnols appelés « Varones », à moins que les reliefs de l’étoffe n’évoquent simplement des barres. La plus ancienne mention espagnole du tissu date de 898. Au 12e siècle, Pierre le Vénérable en interdit l’usage aux moines de Cluny. Au 16e siècle, le mot désigne une étoffe de soie aussi bien que de laine. Au 17e siècle, c’est un gros camelot ou une étoffe tissée en poil de chèvre. Au 18e siècle, c’est un sergé serra, à chaîne double ou triple, en laine parfois additionnée de chanvre et à trame en fil retors et fin, teint en fil ou en pièce, noir, rouge, bleu ou brun. On ne le foule pas, on le fait bouillir dans l’eau claire avant de le passer à la calandre. Le bouracan de belle qualité est lisse et fin. A l’inverse du camelot (sergé de trame), le grain du bouracan est produit par un sergé de chaîne. On appelle « rouleau de bouracan » une pièce apprêtée, roulée et empointée. Principaux lieux de fabrication : Abbeville, Amiens, Lille, Rouen, Valenciennes. Les bouracans sont tous régis par le règlement général d’août 1669 et l’arrêt du Conseil du 19 février 1671 ; cependant, les longueurs sont dépassées jusqu’à 49,58 m. Il sert à confectionner des manteaux de pluie jusqu’au 20e siècle, où, au bout de 11 siècles d’existence, on le retrouve en tapis de table ou en dessus-de-lit. (E. Hardouin-Fugier & Coll., Les étoffes, Dictionnaire historique)

    Eh oui, nous avons inventé le téflon en 1938 etc… et nous n’utilisons plus les laines foulonnées et bouillies etc… imperméables, mais nous aurions mis le bouracan désormais en dessus-de-lit. Je me demande bien à quoi il ressemble en dessus-de-lit.

    Ah, au fait, on ne dit plus imperméable, mais déperlant. Et c’est à base de chimie sans aucune matière naturelle ! Nos ancêtres étaient écologiques sans le savoir, mais ils nous ont laissé une planète en meilleur état que nous ne la laisserons.

    Cet acte est aux Archives Nationales, MC/ET/CXIV/6 Henri Venant notaire à Paris, 1694 – Voici sa retranscription (voir ci-contre propriété intellectuelle) :