Réception à la maîtrise de chirurgie, au ressort d’Angers, 1740-1752

Archives Départementales du Maine-et-Loire, série E

Avec ce billet, j’ai mis ce qui concernait les chirurgiens dans la catégorie Hygiène et Santé, et non plus dans celle Métiers, car je pense que c’est mieux ainsi, à moins que vous y voyiez un inconvénient.

Nous avions vu le 19 mai puis le 21 mai dernier, l’évolution du métier de chirurgien, en particulier la date de l’Ordonnance Royale du 24 février 1730, instituant la maîtrise en chirurgie.
Nous avions aussi des contrats d’apprentissage avant et un brevet d’apprentissage après cette date clef, apporté en commentaire de mon billet du 19 mai.

On appelle Brevet d’apprentissage, Un Acte passé pardevant Notaire, par lequel un Apprenti & un Maître s’engagent réciproquement ; l’Apprenti à apprendre un art ou un métier; & le Maître à le lui montrer pendant un certain temps, & à certaines conditions. (Dictionnaire de L’Académie française, 4th Edition, 1762)

Aujourd’hui, nous découvrons le diplôme de maîtrise en chirurgie, décerné à Angers par la nouvelle communauté des chirurgiens d’Angers. Vous en aurez d’autres, car il s’avère qu’au fil des réceptions à la maîtrise, la puissante communauté d’Angers ne se contente pas de maintenir les chirurgiens de campagne au rang inférieur (ils n’ont pas le droit de pratiquer de grandes opérations sans faire appel à un maître d’Angers, et ils sont visité une fois par an par l’un d’entre eux), mais nous découvrirons la prochaine fois qu’ils définissent leur zone de non concurrence. Enfin, vous voyez aussi une forme d’assurance contre les risques du métier

  • Jacques Godelier, Le Lion-d’Angers (49), 1740, folio 2
  • (Attention, les assemblées sont chacune rédigée par l’un des chirurgiens présents, jamais le même, et leur orthographe est parfois limitée, en particulier cette assemblée qui doit impérativement se lire phonétiquement, car elle contient beaucoup de perles orthographiques) En la semblée (sic, pour l’assemblée) des maistre (sic) chirurgiens de cette ville fait en leur chembre commune et de juridiction par l’ordre de Charles Galpin lieutenant du premier chirurgien du roy duement convoquée par billets par Jacque Goubeault leur procureur à la réquisition de Jacque Gaudelier aspirant à la maistrise pour le bourt (sic, pour bourg) et paroisse du Lion d’Angers où assistoit ledit Charles Galpin, Louis Nepveu, Jacques Goubeault, Charles Guitet, Louis Mouilleras, Charles Rataud, François Breteault, Cabriel Sillord, tous lesquels après avoir interogé ledit Jaques Godelier sur plusieurs faits de chirurgie et luy avoir fait faire quelques légères expériance l’ont tous trouvé sufisemment capable d’exercer l’art de chirurgie en ledit bourt et paroisse du Lion d’Angers et autres lieux circonvoisins dépendant de nostre ressort, di tenir boutique ouverte, di prendre bacens (d’y prendre bassins) et d’exposer toutte autre marque de chirurgien aux conditions néanmoints qu’il ne fera aux qu’un aprantif (aucun apprenti), et en outre soufrira les vissite par chasque un (chacun) an et pera (payera) pour droit quarente souls par chasque vissite et aussi aux conditions qu’ls ne faira aux qu’une hopération de concéquance cent (sans) y appelé quelques uns de maistre de cette ville ou autre maistre chirurgien de grands chedeufre (chef d’œuvre), fait Angers ce 15 novembre 1740

  • Jacques Joachim Ricordeau, Ballots (53), juin 1741, folio 8
  • En l’assemblée des maistres chirurgiens de cette ville faitte en leur chambre commune et de juricdiction par l’ordre de Charles Galpin lieutenant du premier chirurgien du roy duement convoquée par billets à la manière accoutumée par Jacques Goubault leur procureur à la réquisition de Jacques Joachim Ricordeau aspirant à la maîtrise pour le lieu et paroisse de Ballots dépendant de nostre ressort ou assistoient messire François Paulmier conseiller du roy docteur régent en la faculté de médecine de l’université de cette ville et médécin royal, ledit Jacques Goubault, Charles Guitet, Louis Mouilleras, Charles Rateaud, François Bretault, Jean Baugé et Alexande Lachese tous maistres chirurgiens de cette ville lesquels après avoir interrogé ledit Joachim Ricordeau et luy avoir fait faire quelques légères expériences l’ont tous trouvé suffisament capable d’exercer l’art de chirurgie en le bourg et paroisse de Ballots et autres lieux circonvoisins dépendant de nostre ressort, d’y tenir boutique ouverte, d’y prendre bassin et d’exposer toutes autres marques de chirurgien aux conditions néanmoins de ne faire aucuns aprentifs en l’art de chirurgie et qu’il ne fera aucune opération de conséquence sans y appeller un maistre de cette ville ou autre maistre de grand chef d’œuvre, et qu’il souffrira les visites (sic) par chasquun an et payra pour droit quarente sols par visite affin qu’en cas de contestation il n’en prétende cause d’ignorence, fait à Angers ce 2 juin 1741

  • Daniel Pirré, Craon (53), février 1742, folio 16
  • En l’assemblée des maistres chirurgiens de cette ville fait en leur chembre commune et de juricdiction par l’ordre de Charles Galpin lieutenant du premier chirurgien du roy duement convoqué par billets à la manière accoutumée par Louis Mouilleras leur procureur à la réquisition de Daniel Pirré aspirant à la maîtrise pour la ville de Craon dépendant de nostre ressort ou assistoient messire François Paulmier conseiller du roy docteur régent en la faculté de médecine de l’université de cette ville et médécin royal, ledit Charles Galpin, René Berard, Louis Nepveu, Charles Guitet, François Lejean, Louis Mouilleras, Pierre Jouanne, Charles Rateau, Gabriel Sillord, Jean Baugé, Philippe Alexandre Lachese et autres soussignés tous maistres chirurgiens de cette ville lesquels après avoir interogé ledit Daniel Pirré sur plusieurs faits de chirurgie et luy avoir fait faire quelques légères expériences l’ont tous trouvé capable d’exercer l’art de chirurgie en la ville de Craon dépendant de nostre ressort et autres lieux circonvoisins, d’y tenir boutique ouverte, d’y prendre bassin et d’exposer toutes autres marques de chirurgien excepté la ville et bancs lieux (sic, pour banlieue) d’Angers aux conditions néanmoins de ne faire aucuns aprentifs en l’art de chirurgie ny allouer aux peines portées par les statuts article 35, savoir de cinquante livres d’amende, et de deux cents livres de dommages et intérest, en outre ne fera aucunes grandes opérations en chirurgie et que aux maladies de conséquence il y appellera un des maistres chirurgiens de cette ville ou autres maistres chirurgiens de grands chefs d’œuvre, souffrira les visites par chasquun an et payra pour droit quarente sols par visite affin qu’en cas de contestation il n’en prétende cause d’ignorence, fait à Angers ce 23 février 1742

  • Gervais Papin, Craon (53), février 1742, folio 17
  • En l’assemblée des maistres chirurgiens de cette ville faitte en leur chambre commune et de jurisdiction par l’ordre de Charles Galpin lieutenant du premier chirurgien du roy duement convocquée par billets par Louis Mouilleras leur procureur à la manière accoutumée à la réquisition de Gervais Papin aspirant à la maîtrise pour la ville de Craon dépendant de nostre ressort ou assistoient messire François Paulmier conseiller du roy docteur régent en la faculté de médecine de l’université de cette ville et médécin royal, ledit Charles Galpin, René Berard, Louis Nepveu, Charles Guitet, François Lejean, Louis Mouilelras, Pierre Jouanne, Charles Ratauld, François Bretauld, Gabriel Sillor, Jean Baugé, Philippe Alexandre Lachese tous maistres chirurgiens de cette ville lesquels après avoir interogé ledit Gervais Papin sur plusieurs faits de chirurgie et luy avoir fait faire quelques légères expériences l’ont tous trouvé capable d’exercer l’art de chirurgie en la ville de Craon dépendant de nostre ressort et autres lieux circonvoisins, d’y prendre bassin y tenir boutique ouverte, et exposer toute autre marque de chirurgien excepté la ville et bancs lieux (sic, pour banlieue) d’Angers aux conditions néanmoins de ne faire aucun aprentif en chirurgie ny alouer aux peines portées par les statuts article 35, savoir de cinquante livres d’amende, et de deux cents livres de dommages et intérest, en outre ne fera aucunes grandes opérations en chirurgie et que aux maladies de conséquence il y appellera un des maistres chirurgiens de cette ville ou autres maistres chirurgiens de grand chef d’œuvre, souffrira les visites par chasquun an et payra pour droit quarente sols par visite affin qu’en cas de contestation il n’en prétende cause d’ignorence, fait à Angers ce 24 février 1742

  • Antoine Léauté pour St Laurent de la Plaine, le 4 mai 1742, folio 19
  • (orthographe et ponctuation originales, pas de lettres majuscules pour les noms de personnes…, retranscrit par Marie-Laure) « En lassemblee des maistres chirurgiens de cette ville faitte en leur chambre commune et de juridiction par l ordre de charles galpin lieutenant du premier chirurgien du roy duement convoquee par billets en la manier accoutumee par louis mouillera leur procureur a la requisition de antoinne leauté aspirant a la maitrise pour le bourg et la paroisse de St laurent de la plaine dependant de nostre ressort ou asistoient Messire francois paulmier conseiller du roy docteur regent en la faculté de Medecine de luniversité de cette ville et medecin royal rené berard louis nepueu jacque goubault charles guitet louis mouilleras charles ratault francois bretault gabriel sillor et philipe alexandre lachese tous maistres chirurgiens et apres que le di antoine leauté auroit esté interogé par rené berard louis nepueu jacque goubault charles guitet francois bretault et louis mouilleras sur plusieurs faits de chirurgie et luy avoir fait faire quelques legeres experiences auroit esté jugé capable dexercer lart de chirurgie au di bourg et paroisse de st laurent de la plaine depandant de notre ressort et autre lieux circonvoisins et luy ont donné pouvoir d’y tenir boutique ouverte d’y pendre bassinsnet dexposerbtoutes autre marques de chirurgien excepté la ville et banclieux d’angers les villes des ponts de cee ingrande chalonne cholet,craon chemille et autres villes dependant de nostre ressort aux conditions neamoins de ne faire aucun aprentifs en chirurgie ny aloué a peine de cinquante livres d’amande et de deux cents livres de domages et interest ainsi qu’il est porté par les statuts duement enregistrees articles trente cinq en outre ne fera aucunes grandes operations en chirurgie sans y apeller quelquun des maistres chirurgiens de cette ville ou autre maistres de grand chef doeuvre souscrira les visites par chasquune ( ?) et payra pour droit deux livres par visites et apres luy avoir leu et releu lacte de sa reception et luy avoir fait prester serment en tel cas requis et necessaire en foy de quoy il a signé le present acte fait aangers se quatre may mil sept cents quarente deux un mot raye nul. » Plusieurs signatures suivent : A Léauté . Paulmier . R Berard.L Nepueu .G Sillor.Goubault.Ch Guitet. Moullieras.

    Je dresse actuellement la table des réceptions à la maîtrise en Anjou, en triant par lieu, date, et nom de famille du chirurgien. Je peux cependant d’ores et déjà vous dire qu’ils ne sont pas nombreux. A la prochaine fois, si vous le voulez bien, avec un scoop total pour l’un d’eux, dont je ne reviens pas moi-même.

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    Brevet de barbier-chirurgien de la communauté de Laval, 1724

    pour André Thoreaux, à Cossé-le-Vivien, fils de chirurgien (Archives Départementales de la Mayenne, série 1J)

    Ce billet fait suite au contrat d’apprentissage de chirurgien en 1653 à Angers.

    Selon François Lebrun, les Hommes et la mort en Anjou aux 17e et 18e siècles, 1971,

    l’édit de novembre 1691, qui séparait la barberie de la chirurgie, n’a pas eu d’effet immédiat, et en province, les chirurgiens sont restés encore longtemps des barbiers, même après la fondation en 1731 de l’Acadamie Royale de Chirurgie. Il faudra attendre la seconde moitié du 18e siècle pour que les deux professions soient totalement séparées dans les villes possédant une communauté de maîtres chirurgiens. Il y avait une telle communauté à Angers, La Flèche, Baugé, Saumur, Château-Gontier pour l’Anjou. Mais, on peut classer les chirurgiens d’alors en 2 catégories : ceux qui exercent dans les villes possédant une communauté, dont ils font partie, et ceux qui exercent dans les petites villes dépourvues de telle communauté.

    L’exemple qui suit illustre à la fois le rôle d’une communauté de ville, mais aussi la possibilité donnée à un chirurgien de campagne d’obtenir ce précieux brevet de leur communauté, manifestement réservé aux meilleurs chirurgiens de campagne. Enfin, il illustre aussi la non-séparation des deux métiers de barbier et chirurgien, malgré l’édit de 1691, c’est dire qu’il a fallu beaucoup de temps pour qu’il entre en vigueur partout.

    Voici donc un brevet de barbier chirurgien pour Cossé le Vivien, devant la communauté de Laval, pays du Maine, en 1724 :
    (attention, nous passons en retranscription d’un texte ancien, donc en orthographe réelle de ce texte) : Nous Jean Couanier lieutenant du premier chirurgien du roy, et Jean Lechauve notre greffier pour la ville, comté, ressort et élection de Laval, à tous ceux que ces présentes lettres voirons (sic, pour verrons), Salut, Scavoir faisons que sur la requeste à nous présentée par André Thoreaux natif de Cossé le Vivien, fils d’André Thoreaux vivant Me chirurgien audit bourg de Cossé et Louise Gendry ses père et mère, disant que depuis plusieurs années il auroit fait son aprantissage de chirurgien en la maison de son père et ensuite exercé l’art de chirurgie dans plusieurs villles du Royaume, comme Rennes, Laval, et autres villes, avec honneur et sans reproche, ainsy qu’il nous aparoist par son brevet d’apprentissage et certifficat de service
    aspirant à la Maistrise de chirurgie, pour le bourg de Cossé et autres lieux circonvoisins pour à quoy parvenir il auroit offert subir les examens et faire les chefs d’œuvres à ce requis et nécessaires au pied de laquelle faisant droit nous luy aurions donné jour au vingtième octobre mil sept cent vint quatre, pour donner communiquation de sa requeste aux maistres de la communaulté et subir ses examens, sommmaire, auquel examen, il auroit suffisament satisfait,
    c’est pourquoy nous luy aurions donné jour à ce représenter au vingtième novembre suivant en notre Chambre de Juridiction pour y subir son second examen, auquel dit jour il auroit comparu et auroit suby sondit examen, qui estoit des maladies des os, des playes en général, et particulières, auxquels examens et questions à luy faittes il auroit suffisament safistait, c’est pourquoy nous l’aurions admis à ce représenter en notre ditte Chambre le dix huit décembre suivant, pour y faire son chef d’œuvre qui estoit des seignées et des bandages ce qui auroit esté fait en présence de Me François Vincent Doüard, conseiller du Roy, médecin ordinaire de sa Majesté, et de tous les maistres de ladite communauté, auquel chef d’œuvre et interrogations à luy faittes il auroit suffisament satisfait ainsy qu’il aparoit par lesdites actes de chaque jour,
    Pour ces causes, avons icelluy Thoreaux en vertu du pouvoir à nous donné par sa Majesté par lois du mois de septembre mil sept cent vingt trois, receu et recevons par ces présentes Maistre barbier, chirurgien pour ledit Cossé et lieux circonvoisins, pour doresnavant, exercer l’art de chirurgie, tenir boutique ouverte, prendre user et jouir des privilèges tout ainsy que les autres maistres de campagne, à la charge par ledit Thoreaux de ne faire aucun raport ny entreprendre aucune grande opération sans appeler l’un des maistres de la ditte ville de Laval, ce qu’il a promis exécuter, et après avoir d’icelluy Thoreaux pris le serment en tel cas requis et accoustumé, nous avons signé ces présentes de notre main et fait aposer le cachet de nos armes et fait contresigner par notre greffier de juridiction, le dix huit décembre 1724. Signé Lechauve, Taulpin.

    Selon Lucien Bély, Dictionnaire de l’Ancien Régime, PUF, 1996,

    même en 1780, très peu de chirurgiens sont maîtres ès arts, et ils forment un corps très hétérogène. Une petite minorité est installée dans les villes d’importance, possède savoir et culture mais sont fort coûteux. Mais l’immense majorité (ce sont les termes de l’auteur) possède un faible bagage. Il sont moins dispendieux et répandus dans les campagnes. Il va même jusqu’à dire qu’ils sont parfois illettrés, peu considérés, peu rétribués, mais passent pour « les médecins du peuple…. Appelés, y compris dans les cas graves ou même désespérés, dans la mesure où une unique visite constitue un lourd fardeau pour beaucoup de leurs clients, il leur est en principe interdit de pratiquer les grandes opérations que, d’ailleurs, ils n’ont pas appris à exécuter. Et, même s’ils proposaient pour ce faire à leurs clients l’intervention d’un médecin ou d’un chirurgien de la ville, ces mêmes clients seraient dans l’incapacité de leur régler honoraires et déplacements, à supposer qu’ils demandent ou acceptent de les consulter. »

    Ce sont sans doute ces dernières lignes qui expliquent tout. Je suis née en 1938, avant la Sécurité Sociale, qui ne vit le jour qu’en 1946. Je ne me souviens donc que du système actuel, et je peine à imaginer le fardeau de nos ancêtres devant la maladie à payer… Je pense pourtant que la clef de notre compréhension de ces chirurgiens de campagne est bien là, et comme j’ai déjà trouvé des frais de chirurgien de campagne, je vais les retrouver pour vous illustrer ce propos en chiffres une prochaine fois, et aussi une épouvantable opération qui me concerne directement le tout première moitié du 18e siècle. A une prochaine fois, si vous le voulez bien…
    Demain, je réponds à une question qui vient de m’être posée sur le Petit et le Grand cimetière.

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    Chef-d’oeuvre de serrurier, Château-Gontier, 1757 pour être admis dans le corps des maîtres serruriers de la ville, ayant statuts

    Nous avons vu que le l’apprentissage d’un serrurier durait 4 ans, passons au chef-d’oeuvre.

  • Et d’abord, pourquoi un chef-d’oeuvre ?
  • Les maîtres serruriers étaient regroupés en corporations ayant des statuts, et pour y être admis il fallait réaliser un chef-d’oeuvre, fixé par les confrères.

    Voici la retranscription de l’acte : Le 20 mai 1758 Dvt Nre royal à Château-Gontier, Pierre Gambier, compagnon serrurier à Château-Gontier, prie Michel Ribay, Estienne Perrel, Jean Ricou, René Bonnomet, et Pierre Houdbine, maîtres serruriers, Dt à St Rémy, St Jean et faubourg d’Azé, de bien vouloir le recevoir dans leur corps et communauté promettant pour cet effet de leur porter respect et confraternité en véritable confrère,
    lesquels acceptent à condition que ledit Gambier fasse un chef d’œuvre qui consistera en une serrure dont la clef sera forée et encavonnée, dont la ferrure représentera une fleur de lys, laquelle serrure sera de 7 pelles séparés et un demi tour au milieu. (j‘ai découvert en tappant ce texte la notion de décor dans ce métier, et j’ai aussitôt été voir les planches de l’Encyclopédie Diderot. C’est extraordinaire tout ce qu’un serrurier faisait : depuis les fenêtres lorsqu’elles avaient des vitres, les espagnolettes des fenêtres, les innombrables serrures d’armoires, coffres, portes, les barreaux aux fenêtes, comme la fenêtre que nous avons vu dans le billet sur le prix du lit, etc…et le tout avec ferrures décoratives, et je vous ai mis quelques exemples, puis j’ai pesé la seule clef en ma possession, sur mon armoire, et elle pèse 60 g, et je pense donc que la plupart des clefs de coffre et armoire étaient de cet ordre, les portes allant surement jusqu’à 100 g et au delà dans les châteaux)

    Le 30 décembre 1757 Joseph Jolly, compagnon serrurier, de présent à Château-Gontier chez Lucas Jolly son frère, marchand, demeurant rue de la Poislerie, demandait la même chose aux mêmes. Jolly s’oblige faire un chef d’œuvre qui consistera en 6 pelles séparées, clef forée formant un trèfle partant sa queue et encouronnée, le tout en parement.

    Mais au fait, je viens de réaliser que le serrurier possédait autrefois une forge, que son travail de serrurier fabriquant les serrures, etc…, était à la forge. Les planches de l’Encyclopédie Diderot m’ont éblouie sur le sujet, tant les oeuvres étaient élaborées (serrures multiples et complexes) et artistiques (on vient de voir la fleur de lys sur une serrure, un trèfle sur une autre).

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