Thebaude Gaignard se retire de l’hôtellerie de l’écu de Bretagne en louant à son gendre, Angers 1606

table des autres actes traitant de retraite

Autrefois aucune retraite et René Delahaye a vécu plus de 83 ans, d’où un inventaire après décès assez pauvre : 1721 –    Autrefois la vie était courte, mais sans retraite on travaillait souvent jusqu’à la mort : Nicolas Laloy 72 ans, mort au travail   –    Retraite d’une veuve chez son gendre, Jacques Justeau, maréchal en oeuvres blanches, 1708   –    Les personnes âgées, sans retraite, isolées ou regroupées entre elles : Nantes Sud Loire 1846

introduction

La retraite de nos jours signifie s’arrêter de travailler et toucher une pension, mais née en 1938 j’ai connu des générations sans pension. La pension de retraite n’a été instituée qu’en 1945, encore fallait-il cotiser, ce qui ne fut pas le cas de tout le monde au départ. Auparavant on ne survivait que grâce à son bien propre, quand on en avait un peu. Mais la majorité des Français survivaient seulement avec un lit dans un coin chez ses enfants, quand on en avait, sinon dans la pauvreté la plus extrême.

L’acte qui suit traite d’hôtelleries d’Angers, et je vous ferai bientôt un récapitulatif de toutes les hôtelleries que j’ai traitées sur ce blog.

Retranscription de l’acte avec l’orthographe originale 

Cet acte est aux Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E8 – 

Le samedi 18 mai 1606 avant midy, par devant nous René Serezin notaire royal à Angers honneste femme Thebaude Gaignard veufve du deffunct sire Mathieu Bruneteau demeurant en l’hostellerye ou pend pour enseigne l’escu de Bretaigne forsbourgs Sainct Jacques, René Levieil mary de Charlotte Bruneteau et Michelle Bruneteau filles dudit deffunct Bruneteau et de ladite Gaignard se sont adressés vers et à la personne de honneste homme sire Pierre Jary mary de Sébastienne Bruneteau aussy fille de ladite Gaignard auquel ils ont remonstré que pour la vieillesse maladie et indisposition de la personne d’icelle Gaignard elle ne peult plus tenir et exercer ladite hostelerye de l’escu de Bretaigne tellement qu’elle est résolue de quicter et se demettre de l’exercice de ladite hostelerye qui aporteroit grand préjudice et dommage au bien de ladite Gaignard en … pour … ledit Jarry de prendre afferme ladite hostelerye à ce qu’elle soit continuée et exercée, à quoy par ledit (f°2) Jary a esté dict qu’il est hoste de l’hostelerye des Troys Trompettes de ceste ville et que son marché de louage d’icelle maison dure encores de la Sainct Jehan Baptiste prochaine en deux ans, que pendant ledit temps il ne sauroit aller demeurer en ladite hostelerye de l’escu de Bretaigne sinon que ladite Gaignard luy promis l’acquiter des dommages et intérests qu’il pourroit soufrir s’il ne pouvait ne louer ladite maison des Troys Trompettes le prix qu’il est obligé en payer par chacun an montant sept vingts treze (153) livres tz ce que ladite Gaignard auroit bien voulu et sur ce a esté faict et accordé entre lesdites partyes le marché qui s’ensuit c’est à savoir que ladite Gaignard en présence et du consentement desdits Levieil et Michelle Bruneteau à ce présents soubmis soubs ladite court et qui ont promis ne contrevenir à ces présentes, a baillé et baille à tiltre de louage et non autrement audit Jarry qui a pris et accepté tant pour luy que pour ladite Bruneteau sa femme audit tiltre pour le temps (f°3) et espace de 9 années qui commanceront au jour et feste de Sainct Jehan Baptiste prochainement et finiront à pareil jour savoir est ledit logis cours jardin et appartenances de l’escu de Bretaigne avecques la grange estable et superficie d’icelle sur la rue Barault forsbourgs St Jacques, ainsy que lesdites choses se poursuivent et comportent et comme en jouist à présent ladite Gaignard sans rien en retenir ne réserver pour desdites choses jouir et user par ledit Jary comme un bon père de famille et y tenir et entretenir pendant ledit temps l’hostelerye ainsy qu’il a esté accoustumé sans la pouvoir délaisser, à la charge dudit preneur esdits noms de tenir et entretenir lsdites maisons grange et estable en bonne et suffisante réparation de couverture terrasse careau et vitre et les y rendre à la fin dudit temps ainsy qu’elles luy seront baillé au commancement du présent bail et outre entretenir et rendre à la fin dudit temps les trilles (qui sont les treilles) dudit jardin ainsy en tel estat qu’elles luy seront baillées, payer et acquiter par ledit …

Retraite d’une veuve chez son gendre, Jacques Justeau, maréchal en oeuvres blanches, 1708

Meubles et location de la chambre, à La Chapelle-sur-Oudon, 49 (Archives Départementales du Maine-et-Loire, série 5E)

Après le décès de son époux Jean Bodard, maréchal en oeuvres blanches, Suzanne Lespron, mon ancêtre, s’était retirée chez son gendre Justeau, aussi maréchal en oeuvres blanches. Elle avait fait dresser la liste de ce qu’elle y avait emporté, et mieux, l’acte donne à la fin, le montant du loyer annuel versé à Justeau, 4 livres. Cet acte illustre le sort des veuves, et aussi le coût de la vie par des exemples concrets, ici le loyer de la chambre par an. Il nous livre également la présence d’un fils infirme.

Voici la retranscription de l’acte : Le 11 septembre 1708, dvt Claude Bouvet Nre Royal Segré, h. personne Suzanne Lespron veuve de †Jean Bodard vivant maréchal en œuvres blanches demeurant au village de Vrezée (c’est ainsi qu’on appelait autrefois la Verzée) à La Chapelle-sur-Oudon, gisant au lit malade mais par la grâce de Dieu saine d’esprit et de mémoire et d’entendement, laquelle craignant qu’après sa mort ses enfants vinssent du différent entre eux à cause des meubles qui sont en la maison de Jacques Justeau maréchal en œuvres blanches son gendre où elle est détenue malade, pour y obvier elle déclare avoir les meubles qui suivent

  • un lit garni où elle est à présent gisante dont le demi-tour est de Tirtainne garni de franche et franchette de soie, une couverture blanche plus que demie usée, une couette, un traverslit, et un oreiller le tout ensouillé de couetty, paillasse et charlit,
  • une paire de prisse (genre d’armoire) de pommier fermante à deux fenêtres, & de clef,
  • un bois de couchette couette et paillasse un traverslit de peu de valeur,
  • une table ronde de bois de noyer,
  • un charlit de bois de noyer (écrit noier), une couette ensouillée de couetty et un traverslit ensouillé de toille,
  • une poisle à frire, un grand poislon, et une passette d’airain, un rond aussi d’airain, une marmitte de fer avec son couvercle d’airain, deux petits chaudrons percés, et un autre petit chaudron, le tout de cuivre,
  • deux petits chenets, une crémaillère (écrit cramaillère), une broche à rostir, le tout de fer,
  • un vieil cabinet,
  • une vieille huche,
  • deux lampes et deux chandeliers de potin, l’une desquelles lampes est raccommodée de fer,
  • 19 livres d’étain, tant creux que plat, (c’est la vaisselle, toujours estimée au poids)
  • 8 draps de toille de brin et reparon, dont 2 usés,
  • 14 chemises à l’usage de ladite établie, desquelles il y a 9 presque neuves, et les autres plus demi-usées,
  • 3 nappes de brin,
  • une demi-douzaine d’essuismains,
  • 3 souilles d’oreillers, et 4 serviettes,
  • 16,5 livres de laine filée laquelle laine ladite établie déclare employer à faire faire de l’étoffe …,
  • plus 1 autre bois de couchette garnie d’une couette,
  • 1 traverslit, … lodier et paillasse qu’elle dérire relaisser à Pierre Bodard son fils, qui y est gisant infirme,
  • 6 chaises de bois foncées de jonc desquelles il y une de bois de chêne,
  • 2 futs de pippe de peu de valeur,
  • 1 fut de busse et quart de pippe,
  • 1 rouet à filer,
  • 1 saloire (écrit salouer) … à vanner, 1 crocher de fer, à pecher,
  • le tout qu’elle veut être partager entre sesdits enfants après son décès, ce que ledit Jousteau et Suzanne Bodard sa femme ont reconnu devant nous avoir vu en ladite maison,
    voulant au surplus ladite Lespron que son testament passé devant †Me René Guyon notaire royal audit Segré le 27.11.1703 soit exécuté selon sa forme … laquelle exhorte sesdits enfants de discuter leurs droits dépendant des biens qu’elle leur relaisse le plus pacifiquement que faire se pourra,
    fait et passé au village de Vrezée maison dudit Jousteau en présence de François Bodard marchand et de Jean Bodard maréchal en œuvres blanches enfants et gendre de ladite établie, et encore de François Bodard Me cordonnier et Louis Bigot tailleur d’habits à Segré,…
    et à l’égard du louage de la chambre qu’elle occupe chez ledit Justeau et femme, ils ont convenu entre eux et ladite Lespron s’oblige leur payer de louage par chacun an 4 L, et entretiendra ladite chambre bien carrelée (AD49)

    Si je compte bien, il y a 5 lits dans la pièce, et elle dort donc seule, son fils handicapé aussi, et sans doute une servante. C’est rare de voir autant de lits devenus individuels, je suppose que ce sont les lits qui ont fait toute la vie de Suzanne Lespron, devenus vides depuis le mariage de ses enfants et son veuvage, mais qu’elle a conservés jusqu’à la fin de ses jours. D’ailleurs, tout le reste semble bien être tout ce qu’elle avait du temps de son époux et dont elle ne se sépare pas encore. Il semble que la présence d’un fils handicapé a fait que ses enfants n’ont rien partagé de ses meubles de son vivant, car généralement, les veuves se ratatinent beaucoup.

    En ce WE de Pentecôte, vous vous reposez, mais préparez vous à un billet extraordinaire : Lors d’une succession, prenez une hôtellerie, un serrurier, un orfèvre… et vous allez vivre un moment haut en couleurs, rarissime dans un acte notarié… car vous pouvez ajouter une grande dose de mystère, mieux que dans n’importe quel roman.
    Je suis en train de le préparer, malheureusement, je ne peux laisser le titre (la fameuse case en haut, et le sous-titre), en forme d’énigme, car les moteurs du WEB n’analysent pas la recherche des trésors et les énigmes, mais bien des termes plus substantiels, donc vous aurez la réponse dans le titre… désolée de cette forme concrète des méthodes du WEB. Mais sincèrement préparez vous à une affaire rocambolesque…

    A ce propos, savez-vous que ce site est visité par des auteurs, qui glanent la vie d’antan pour leurs écrits. Eh bien, ils ne vont pas être déçus, vous aussi d’ailleurs…

    Odile Halbert – Reproduction interdite sur autre endroit d’Internet seule une citation ou un lien sont autorisés.